C’est un record historique. Depuis le début de la pandémie, le chômage a explosé en France avec plus de 6,5 millions de chômeurs inscrits au Pôle Emploi au dernier trimestre. Hadrien Clouet, sociologue de l’emploi et du chômage à l’université de Toulouse analyse la situation.
Interviewé à France info, Hadrien Clouet, le sociologue de l’emploi et du chômage a commenté les conséquences de la pandémie sur l’emploi. Le jeune enseignant de l’université Toulouse 2 Jean Jaurès explique notamment la problématique de l’offre et de la demande. En cette période de crise sanitaire, la peur du chômage est encore plus forte et les demandeurs d’emplois sont prêts à faire des concessions dans un contexte où l’offre est très faible, soit une offre d'emploi pour 10 chômeurs.
Hadrien Clouet ce soir au JT de 24h @publicsenat au sujet des emplois non pourvus en France pic.twitter.com/72d3zI52yw
— CSO Sciences Po/CNRS (@CSO_SciencesPo) September 25, 2015
Chômage : la loi de l’offre et de la demande
"Quelque soit la pression que l’on met sur l’individualité des chômeurs, quelques soient les efforts qu’on leur demande de faire, il n’y a de toute façon pas assez d’emplois en face pour accueillir tous les chômeurs", explique le sociologue.
Pour faire face à l’augmentation des inscrits à Pôle Emploi, l’organisme a embauché des conseillers. Malheureusement, explique Hadrien Clouet "ces embauches sont là pour courir après une crise qui est en cours, puisque ce sont des embauches en CDD sur 18 mois, des embauches non pérennes qui visent juste à résorber une situation d’urgence".
Mais la situation la plus inquiétante précise le chercheur c’est la double crise dans laquelle entre Pôle Emploi.
On a un effet ciseaux avec beaucoup plus d’inscription de chômeurs entrant et en même temps beaucoup moins d’offre. On le voit dans les dernières statistiques publiées, c’est un record historique, plus de 6,5 millions de personnes sont inscrites, toutes catégories confondues au dernier trimestre alors que Pôle Emploi n’a collecté que 600 000 offres.
Crise sanitaire et peur du chômage
Une enquête publiée par l’UNEDIC montre que de nombreuses personnes ont commencé à réduire leurs espérances et ambitions sur le marché de l’emploi.
70% des chômeurs expliquent avoir été contraints d’abandonner des projets professionnels et 90% d’entre eux sont prêts à faire des concessions pour retrouver un emploi.
"Deux tiers sont prêts à renoncer à un niveau de salaire et plus de la moitié sont prêts à accepter un emploi à temps partiel, ils sont donc dans l’acceptation de la précarité", détaille l’enseignant.
Le chômage : une question de santé ?
"Le chômage a toujours été une question de santé". Les chômeurs sont davantage soumis à des risques cardiovasculaires, à la dépression, au suicide. Dans le cadre d’une crise sanitaire motivée par une pandémie, il y a plus de personnes qui perdent leur emploi et qui se retrouvent dans une situation de danger sanitaire par privation de l’emploi, selon Hadrien Clouet.
Les chômeurs stigmatisés
Le chômage est un facteur d’isolement, d'endettement, de replis sur soi, de pertes d'autonime et financières. A toutes ces difficultés se greffe un discours stigmatisant.
Je pense aux propos tenus sur les chômeurs que l’on entend depuis quelques années, du style les chômeurs qui partent aux Bahamas ou encore il suffit de traverser la rue pour trouver un emploi. On ne fait que redoubler la pression sur les chômeurs en les renvoyant à leur responsabilité individuelle alors qu’il y a 10 chômeurs pour une offre d’emploi.
Des conseillers à l'emploi bienveillants ?
Depuis plusieurs années, les demandeurs d’emploi sont soumis à des obligations drastiques comme celles d’accepter des emplois moins bien payés, ou encore de travailler loin de leur domicile. Le gouvernement a d’ailleurs mis en place des équipes spécialisées pour effectuer des contrôles. "La mesure n’a pas persuadé ces conseillers à l’emploi qui n’appliquent pas la législation, ils n’ont aucune envie que ces chômeurs acceptent des emplois qu’ils jugent inacceptables".