D'après une étude publiée par Atmo Occitanie réalisée entre 2019-2020, l'air serait imprégné de 27 pesticides différents. La présence de fongicides est importante, conséquence du printemps chaud et humide qui a favorisé des maladies comme le mildiou.
Des pesticides dans le sol, dans nos aliments, mais aussi dans l'atmosphère. En Occitanie, les habitants en ont précisément respiré 27 différents entre octobre 2019 et septembre 2020 d'après l'Atmo, l'observatoire régional de l'air. Des traces d'herbicides, de fongicides et d'insecticides ont été observées dans chacun des lieux de mesure.
Pour cette deuxième année d'étude menée par Atmo, les prélèvements ont été réalisés dans l'Aude et le Gard viticole, les Pyrénées-Orientales, le Tarn-et-Garonne et dans le Lauragais, cinq lieux choisis pour leur diversité de production.
Le Tarn-et-Garonne, département le plus exposé
Avec plus de 78.000 exploitations, l'Occitanie est classée deuxième région agricole française. Trois grands types de culture se dégagent: la viticulture (très pratiquée dans le Languedoc-Roussillon), l'arboriculture (dans le Tarn-et-Garonne et les Pyrénées orientales), et la grande culture du blé et du maïs dans le Lauragais. "Il ne s'agit pas de pointer du doigt les responsables, mais de faire un diagnostic sur l'exposition de nos concitoyens" assure Dominique Tilak, directrice générale d'Atmo Occitanie. Pas question donc de faire le procès de l'agriculture intensive, mais plutôt de dresser le bilan.
Et pour la deuxième année consécutive, c'est dans le Tarn-et-Garonne que le plus grand nombre de pesticides a été relevé. Viennent ensuite, l'Aude, le Lauragais, le Gard et les Pyrénées-Orientales.
Parmi les 27 molécules identifiées, "on observe des présences de fongicides plus importantes qu'avant" souligne Dominique Tilak, directrice générale d'Atmo Occitanie. Après un hiver 2020 anormalement doux et un printemps particulièrement chaud, de nombreuses cultures ont été touchées par une prolifération de champignons comme le mildiou.
Des perturbateurs endocriniens interdits depuis 1998 identifiés
Au total, 23 perturbateurs endocriniens ont été retrouvés. En première ligne le folpel, un fongicide classé cancérigène probable aux États-Unis et suspecté cancérigène en Europe. Suivent ensuite le pendiméthaline, et le lindane... une molécule interdite en France depuis 1998. Sa lente dégradation dans l'environnement, explique pourquoi il est l'insecticide, 24 ans après son interdiction, encore le plus quantifié en Occitanie. Rien que dans l'Aude, il a été retrouvé dans 96% des échantillons.
"Il n'y a pas lieu de s'inquiéter" veut temporiser Pascale Berthommé, ingénieure sanitaire de l'Agence Régionale de Santé. "On parle de substances présentes en nanogramme par mètre cube, au niveau des quantités globales c'est infime" rajoute t-elle.
La pollution globale de l'air est pourtant la deuxième cause de décès évitables après le tabac et devant l'alcool. Et si des normes ont été établies concernant l'eau et l'alimentation, la contamination de l'air ambiant et intérieur par les pesticides ne fait en revanche l'objet d'aucune réglementation en France et en Europe.
Si les chiffres restent homogènes d'une année sur l'autre en Occitanie, avec les effets probables ou avérés des pesticides sur la santé, l'observatoire environnemental veut développer une stratégie de surveillance de l'exposition de la population.
Une couverture du territoire en gruyère
Certains territoires restent encore hors du radar de l'Atmo, notamment le nord de l'Occitanie. L'année dernière, l'étude comptait 9 lieux d'intérêt, dont les zones urbaines de Toulouse et Montpellier. Un chiffre inférieur dans la nouvelle étude dû à la difficulté de convaincre les communes et les partenaires d'installer des capteurs sur leur terrain.
"L'enjeu n'est pas de stigmatiser des lieux ou communes" veut rassurer Agnès Langevine, présidente d'Atmo Occitanie. Tout l'intérêt est de pouvoir analyser ces données sur le long cours, afin de pouvoir dresser des comparaisons et suivre les évolutions des pratiques en agriculture.
Avec la multiplication des études, on voit que la profession agricole a tout intérêt à valoriser les améliorations de pratique
Agnès Langevine, présidente d'Atmo Occitanie
En 2021, des mesures de pesticides, désormais identifiés comme polluants d’intérêt national, ont été lancées dans le cadre d’un suivi national initié par le ministère en charge de l’Environnement. Cette large campagne d'exploration des perturbateurs endocriniens dans l'air débutera cette année en Occitanie.
Elle comprend près de 70 molécules, dont le glyphosate. Le cuivre et le souffre, utilisés comme alternative aux produits phytosanitaires dans l'agriculture biologique, seront également mesurés pour mesurer la transformation des exploitations et des pratiques. Les résultats seront accessibles à l'automne 2023.