Le président de la République se rend aujourd’hui à Toulouse dans le cadre de la réunion des ministres européens chargés de l'Espace. Il devrait aborder la stratégie spatiale européenne et vise, selon l’Elysée, à faire de cette thématique "une des incarnations de la présidence française du Conseil de l’Union européenne".
Emmanuel Macron prononcera son discours à 14h30 au centre des congrès P. Baudis, dans un contexte particulier de double présidence européenne (présidence française du Conseil de l’Union européenne et présidence de l’Agence spatiale européenne). Il sera accompagné du ministre de l'Economie Bruno Le Maire et de la ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, Frédérique Vidal.
Sur la table, des "sujets phares portés par l’Union européenne" : les constellations de connectivité (ou satellites de communication, un projet du commissaire européen Thierry Breton pour booster la couverture du réseau Internet) et les débris spatiaux, que l’Europe essaie "de mieux gérer et de mieux suivre", de façon plus centralisée, précise l’Elysée.
Reconquête spatiale
Au mois d’octobre dernier, le président de la République dévoilait les contours du "plan France 2030", un plan d’investissement de dizaines de milliards d’euros destiné à remettre la France sur "le chemin de l’indépendance".
Dans ce cadre, il avait augmenté l’enveloppe consacrée au dossier spatial de 1,5 milliards d’euros, notamment pour faire face à "l’émergence d’acteurs privés" (comme Elon Musk avec le projet SpaceX), qui reçoivent le soutien d’agences spatiales.
Emmanuel Macron devrait aujourd’hui réaffirmer la place de l’Europe et de la France dans la conquête spatiale et "s’approprier ces nouvelles méthodes", "extrêmement stratégiques si l’Europe souhaite avoir une place dans le domaine spatial à terme".
De quelle façon l’Europe peut-elle se positionner face à ces acteurs privés, pour se montrer compétitive dans les domaines scientifiques, militaires et industriels ? Comment intégrer la question du climat et la protection de l’environnement dans la recherche spatiale ?
Quid de la "constellation Breton" ?
Selon l’Elysée, Emmanuel Macron évoquera les futurs lanceurs. Ariane 6 devrait lancer ses premiers satellites à la fin de l’année. La constellation Breton fera également l’objet d’un débat. Première constellation de satellites européenne, elle devrait assurer à l’Europe une souveraineté dans le domaine numérique civil et militaire.
"L’Europe est un peu en retard sur les constellations", relève Didier Schmitt, directeur de la stratégie à l’ESA (Agence spatiale Européenne). "Space X notamment est devant nous, l’enjeu est donc de se démarquer."
Baptisé Connectivity, ce projet chiffré à 6 milliards d’euros devrait mettre fin aux zones blanches en doublant les infrastructures terrestre dédiées à la connectivité, mais également sécuriser les communications et parer les cyberattaques. Toute la question sera ainsi de savoir comment les Vingt-Sept se positionneront sur ce projet qu'Emmanuel Macron souhaite faire adopter.
Les débris spatiaux dans le viseur
Ferraille, pièces de fusées ou satellites inactifs… Des millions d’objets inertes flottent désormais dans l’espace. On estime la masse des débris spatiaux à 9 600 tonnes. D’après The Satellite Encyclopedia, 93% des déchets sont produits par la Russie, la Chine et les Etats-Unis et seulement 3,3% par la France (un peu plus de 500 objets recensés).
Les déchets représentent un risque non négligeable de collision avec les satellites en service et "mettent nos astronautes en danger", avait estimé la ministre des Armées Florence Parly fin 2021, à propos de la destruction d'un satellite en orbite par l'armée russe.
Or, face au déploiement massif de constellations de satellites et de lanceurs, ces objets indésirables risquent de se faire plus nombreux encore. Leur gestion fera ainsi l’objet d’une concertation européenne afin de s’assurer que "l’espace ne devienne pas une zone de non-droit", insiste l’Elysée.
Les enjeux seront donc de renforcer la surveillance de l’espace pour détecter rapidement ces déchets spatiaux, améliorer leur gestion à l’échelle européenne et porter ces nouvelles règles (space traffic management) au niveau international.
Explorer, encore
Copernicus, un programme de collecte de données spatiales utilisé notamment pour surveiller l’évolution du climat et du niveau des mers, et Galileo, le GPS européen ultra-performant, constituent de "vraies forces européennes" pour l’Elysée.
Emmanuel Macron devrait ainsi les évoquer et poursuivre sur le terrain de l’exploration spatiale. Avec en filigrane le sujet de la souveraineté militaire de la France, mais aussi de la lutte contre le réchauffement climatique.
Car l’espace représenterait un poste d’observation particulièrement efficace. Et "dans le domaine de l’observation de la Terre et notamment du changement climatique, nous sommes les champions du monde, il faut le souligner et nous devons rester leaders", souligne Didier Schmitt.
L’objectif sera aujourd’hui, précise l’Elysée, "d’essayer de faire émerger un consensus, ou des pistes d’ambitions possibles pour l’exploration européenne". En collaboration avec des start-ups dans le domaine de l’aérospatial, qui devraient intervenir dans la journée.