Les images satellites nous aident à comprendre le monde, à évaluer le réchauffement climatique ou à mener une guerre. Avec l'intelligence artificielle, il est désormais possible de les truquer. Des Deepfakes géographiques qui représentent une grande menace. À Toulouse, la start-up 3IPK aurait trouvé une solution.
En novembre 2022, l'image avait suscité l'émoi. Elle montrait une photo satellite de l'éclairage public en Europe à l'exception de l'Ukraine. Le pays était plongé dans le noir après un bombardement. Même si des millions d'Ukrainiens étaient privés d'électricité à ce moment-là, tout était faux. Dans la famille des Fakenews, les experts parlent de "DeepFake géographique".
Réaliser un photomontage sur une vue satellite peut avoir des conséquences désastreuses.
En effet, l'image satellite nous aide à comprendre le monde.
Depuis longtemps, elle permet de mener une guerre ou d'espionner un pays. Elle devient une preuve pour dénoncer le réchauffement climatique ou la déforestation en Amazonie.
Pour les journalistes, elle offre un moyen pour enquêter sur les crimes de guerre en Syrie ou sur le génocide culturel des Ouïghours.
Or, les cas de Deepfakes géographiques se multiplient avec l'intelligence artificielle.
Dès 2021, le chercheur Bo Zhao de l'université de Washington, a démontré que la nouvelle génération de l'IA offre la possibilité de créer des images satellites réelles et indétectables.
Une parade conçue depuis Toulouse
Face à cette prolifération des fausses images satellites, la start-up 3IPK mise sur une certification numérique.
Fondée en 2019 à Bratislava en Slovaquie, 3IPK développe des solutions pour sécuriser des données sensibles telles qu'un fichier Excel ou un vol d'avion.
Depuis août 2023, une partie de son équipe s'est délocalisée à Toulouse, pour s'attaquer au sauvetage de l'imagerie spatiale.
Pour la jeune pousse, l’enjeu est de garantir l'authenticité de l'image satellite.
L'idée est de concevoir une certification numérique stockée dans une blockchain (une technologie de stockage sécurisée et fonctionnant sans organe central de contrôle).
Lorsqu'un utilisateur téléchargera une image satellite, il pourra être certain que cette image a été prise par tel satellite et visualiser les modifications réalisées sur le cliché.
Juraj Zamecnikco-fondateur de 3IPK
"D'autres méthodes d'empreintes numériques existent, mais l'avantage de 3IPK est de ne jamais modifier la donnée, ni de visualiser l'image" insiste le concepteur.
La technologie de la start-up a retenu l'attention de Thalès Alenia Space et de l'Agence Spatiale Européenne (ESA). Les deux identités veulent sécuriser leurs propres données satellitaires et les premiers tests sont concluants.
"Les cas d'usages sont nombreux" complète Juraj Zamecnik.
Exemple dans la Défense. L'IA est capable de déplacer une unité militaire sur une carte satellite, d'une vingtaine de km. Une petite modification difficilement identifiable.
Juraj Zamecnik
L'ancien ingénieur de chez Airbus espère commercialiser sa solution avant l'été 2024.
D'ici là, il s'apprête à boucler une levée de fonds de 7 millions d'euros afin de mettre un terme à ce nouveau fléau de Fakenews.