C'est le télescope spatial le plus évolué jamais réalisé en Europe: dans une semaine, GAIA doit être lancé depuis la Guyane, avec la mission de réaliser un catalogue 3D du ciel, en localisant avec une précision inégalée un milliard d'étoiles de la Voie lactée.
Construit à ToulouseConstruit à Toulouse par Astrium, pour le compte de l'Agence spatiale européenne (ESA), GAIA sera "cent fois plus précis" que son prédécesseur Hipparcos, et observera "10.000 fois plus d'étoiles", a précisé mercredi Frédéric Arenou (Observatoire de Paris), responsable de la validation des données GAIA.
Lancé en 1989, Hipparcos avait fourni les coordonnées célestes de quelque 120.000 étoiles, avec une précision déjà 10 à 100 fois plus grande que les catalogues précédents, établis à l'aide d'instruments au sol.
Avec GAIA et ses deux télescopes en carbure de silicium, chacun constitué de trois miroirs incurvés et rectangulaires, les arpenteurs de l'espace accèdent à une autre dimension. Le satellite pourra "voir" des objets dont la brillance est 400.000 fois plus faible que ceux visibles à l'oeil nu. Les étoiles les plus brillantes seront localisées avec une précision comparable à la capacité d'observer un cheveu humain à une distance de 1.000 km.
Vers un atlas du ciel
Les distances dans l'espace sont considérables, d'où la difficulté à les mesurer.
Mais lorsqu'on connaît la distance d'une étoile, on peut déterminer ses principales caractéristiques, sa luminosité réelle, son âge, sa masse, sa température...
GAIA permettra de réaliser une cartographie tridimensionnelle de la Voix lactée, un atlas du ciel, mais aussi de reconstituer l'histoire de la formation de notre
galaxie, a fait valoir Frédéric Arenou.
L'ère du Big Data
"Dans moins de deux ans, on aura un premier catalogue de tout le ciel", a souligné de son côté François Mignard (Observatoire de la Côte d'Azur), responsable de la participation française à GAIA.
Si tout se passe comme prévu, GAIA sera lancé jeudi 19 décembre au matin par une fusée Soyouz, depuis Kourou, en Guyane.
Pendant cinq années, il traquera les étoiles depuis une orbite autour du Soleil, à une distance de 1,5 million de kilomètres de la Terre. Chaque étoile sera observée environ 70 fois.
Le satellite sera positionné sur un emplacement privilégié -le point de Lagrange 2- qui suit le mouvement de la Terre dans son déplacement autour du Soleil.
Outre la chasse aux étoiles, GAIA, grâce à la précision des ses instruments, pourra observer des planètes extrasolaires. "On espère détecter plusieurs milliers d'exoplanètes", a indiqué Frédéric Arenou.
Dans son viseur également, des dizaines de milliers d'astéroïdes.
"Il va y avoir un véritable déluge de données", a prévenu Jean-Yves Le Gall, président du CNES, l'agence spatiale française, qui va assurer le traitement des données scientifiques.
"On est entré dans le monde du Big Data", a renchéri Véronique Valette, chef de projet GAIA au CNES.
Un péta-octet de données
GAIA va représenter plus d'un péta-octet de données à gérer, soit un million de milliards d'octets, c'est-à-dire la capacité de 250.000 DVD, ou encore l'équivalent de 2.000 ans de musique en écoute continue, a-t-elle précisé.
"Si on mettait une seconde à traiter une étoile, il faudrait 30 ans de calcul", a-t-elle ajouté.
Le centre de traitement des données du Centre spatial de Toulouse, un des six centres dédiés aux données GAIA en Europe, s'est doté d'une puissance
de calcul de 6.000 milliards d'opérations par seconde.
Pour préserver toute la précision des mesures de GAIA, le satellite sera surveillé en continu depuis le sol par un réseau de télescopes, de sorte qu'on connaîtra sa position à 100 mètres près.