Grève des avocats : la cour d'appel de Toulouse s'inquiète du retard que prennent les affaires et audiences

Le mouvement de grève des avocats qui dure depuis 5 semaines préoccupe la cour d'appel de Toulouse. Elle pointe du doigt notamment un renvoi de plus de 70% des affaires. 

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La cour d'appel de Toulouse est inquiète. Depuis le mouvement de grève des avocats, les dossiers ont pris du retard. Dans un communiqué, le procureur général Franck Rastoul et le premier président de la cour d'appel Jacques Boulard dénoncent des conséquences de cette grève "sans précédent, d’une particulière gravité sur les délais de traitement des affaires entraînant un préjudice majeur pour les justiciables". Ils s'appuient notamment sur deux chiffres : 

  • "Sur les 13 517 dossiers audiencés entre les 6 janvier et 7 février au sein de l'ensemble des juridictions du ressort, 9 663 ont fait l'objet d'un renvoi soit 71,49% des affaires."
  • "16 dossiers criminels audiencés devant les cours d'assises du ressort ont été renvoyés et ne seront pas jugés avant plusieurs mois."
Les dossiers d'appel des affaires familiales, eux, sont renvoyés en janvier 2021. Quant à ceux des pôles sociaux (affaires liées aux handicaps, maladies, ehpad, allocations etc.), ils sont renvoyés en octobre 2021. "Les gens nous appellent tous parce qu'ils pensent qu'on s'est trompé d'année sur leur convocation", précise le parquet général de Toulouse.

Pour autant, Manuel Furet, bâtonnier des avocats du barreau de Toulouse souligne que ces retards ne datent pas du mouvement de grève, et avant ce dernier, ils ne venaient pas des avocats : 

J'ai un dossier qui a mis plus de deux ans à être audiencé ! précise Maître Manuel Furet.


La méthode des avocats grévistes dénoncée


Avocats et cour d'appel se renvoient donc la balle concernant les retards. Mais pour le parquet général de Toulouse, les avocats sont allés trop loin dans leurs démarches : "ils ont fait des centaines de demandes de remise en liberté, ils viennent à plusieurs dizaines à leur audience pour la repousser". De cette manière, les avocats grévistes espèrent paralyser les juridictions et donc bloquer le système pour faire pression sur le gouvernement. Mais "la situation est grave", souligne le parquet général qui évoque même une "guérilla judiciaire" et un risque majeur pour les services saturés :

On craint un loupé : une remise en liberté de criminels par exemple, précise un représentant du parquet général de Toulouse.


Un risque que dénie Manuel Furet : "les demandes de remise en liberté concernent de toute façon des personnes présumées innocentes".

Le parquet général de Toulouse explique que dores et déjà, en conséquence de ces centaines de demandes de remise en liberté, les audiences se sont multipliées pouvant atteindre jusqu'à plus de 200 par jour. En temps normal, la cour d'appel s'occupe de 25 dossiers par semaine en moyenne. Autre conséquence : des juges sont appelés en renfort, et ils ne sont parfois pas du tout spécialisés dans les affaires qu'ils doivent traiter en urgence.


Droit de grève versus devoir de continuité du service public


Dans le communiqué, la cour d'appel ne remet pas en question le droit de grève des avocats. Néanmoins, elle rappelle que ce droit doit être concilié avec "la continuité du service public qui a également le caractère d’un principe de valeur constitutionnelle et la protection des libertés individuelles dont l’autorité judiciaire est la garante". Pour l'instant, la grève continue au barreau de Toulouse, et en France en général.
 
En tous cas, tous les soirs les juridictions font part de leur situation au ministère de la Justice. "Et grâce à ce rapport de force, la ministre de la Justice a fini par nous écrire, donc ça sert à quelque chose!" explique Maître Furet. Le bâtonnier de Toulouse affirme en revanche que le communiqué de la cour d'appel de Toulouse a été rédigé sous les recommandations du ministère puisque ce dernier aurait reçu les procureurs généraux la semaine dernière.

La cour d'appel de Toulouse quant à elle, rappelle que la justice doit être rendue dans un délai raisonnable mais aussi dans un climat serein et en l'absence de pression sur la prise de décision par le magistrat.
 
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