Ils sont sous le coup d'une arrestation ou de la peine de mort dans leur pays où l'homosexualité est toujours considérée comme un crime ou un délit. De plus en plus de migrants LGBT demandent l'asile à la France. Nous en avons rencontré deux à la fondation "le Refuge" à Toulouse (Haute-Garonne).
À l'occasion de la journée mondiale de lutte contre l'homophobie qui a lieu le mercredi 17 mai, coup de projecteur sur les droits LGBT en dehors de la France. La fondation "le Refuge" accueille à Toulouse deux jeunes migrants qui ont quitté leur pays. Voici leurs témoignages.
Peine de mort en Iran
Vala est arrivé en France il y a peu. Ce jeune gay est originaire d'Iran. Un pays où la charia fait loi et où l'homosexualité est passible de la peine de mort encore aujourd'hui.
Âgé de 23 ans, Vala a vécu caché quasiment toute sa vie pour éviter la sentence impitoyable des mollahs iraniens.
On me disait, il faut faire sortir ce mal de ton corps, il faut aller voir un exorciste.
Vala, migrant iranien
Aujourd'hui, c'est encore la peur au ventre qu'il témoigne de ce qu'il a vécu dans son pays. Il craint d'être reconnu ou dénoncé par des agents iraniens infiltrés en France.
Il préfère témoigner sous couvert de l'anonymat : "J'ai subi des violences psychologiques, physiques et sexuelles. C'était la partie la plus dure de ma vie. J'avais rencontré une personne, je pensais que c'était l'amour de ma vie et lui, il n'a pas assumé ça. Il avait tellement peur que pour prouver qu'il n'était pas gay, il m'a emmené dans la montagne avec des amis. Et il a été violent envers moi pour leur prouver qu'il n'était pas homosexuel. Donc on m'a frappé. J'étais là par terre. J'ai même toujours une cicatrice, une boule dans le ventre. Et c'est un petit souvenir de ce qu'il m'a fait. Maintenant, j'arrive à en parler beaucoup plus facilement parce que j'ai compris que ça fait partie de mon passé, mais ce n'est pas ça qui me définit. Ce n'est pas de ma faute."
Après sa fuite, Vala s'est retrouvé sans papiers et sans protection en France. Il a fini par contacter la Fondation "le Refuge" qui lui offre aujourd'hui un toit et une aide pour faire sa demande d'asile auprès des autorités. Car Vala le sait : plus question pour lui de retourner en Iran même s'il a laissé toute sa famille dans son pays.
Le poids de la religion
Un aller simple, c'est aussi ce qu' a réalisé Amine, ressortissant algérien. Amine n'a pas hésité à traverser la Méditerranée sur une embarcation de fortune pour fuir sa condition d'homosexuel en Algérie.
Là-bas, être gay est un crime passible de plusieurs années de prison. Sans parler du poids de la religion, l'islam. Amine a dû fuir son père, un fervent religieux.
Il préfère lui aussi ne pas montrer son visage, tant qu'il n'a pas obtenu de droit d'asile : "Quand j'étais en Algérie, je jouais deux rôles hétéro et gay et ça, c'est trop difficile pour moi. Mon père est toujours très pratiquant à la mosquée. Et il m'a dit, tu as sali la religion, tu as sali la famille. Je me rappelle qu'il m'a frappé, il m'a dit, tu n'es plus mon fils. Alors j'ai quitté la maison. J'ai traîné à droite à gauche. Quand j'ai quitté la maison à l'âge de 18 ans, j'ai demandé de l'aide. Les gens voulaient bien m'aider. Mais quand, ils ont appris que j'étais gay, ils m'ont violé."
Quand je vois des familles se promener main dans la main dans la rue, je me dis pourquoi je n'ai pas droit à ça moi aussi ?
Amine
Amine a demandé le droit d'asile à la France il y a plusieurs mois. Il vit aujourd'hui d'un petit boulot de livreur. Un salarié Uber lui a sous-loué son compte. Cela suffit à son bonheur, car à Toulouse, Amine peut vivre sa vie amoureuse comme il l'entend. Il a même un petit copain.
La force de rebondir
Pour les migrants, être LGBT est un peu comme une double peine. Ils doivent subir le regard et les lois d'un pays qui ne veut pas d'eux, traverser les mêmes épreuves que tous les migrants, l'exil, les camps de réfugiés et la longue attente de papiers et espérer pouvoir vivre en paix une sexualité qu'ils n'ont pas choisie, mais qui s'est imposée à eux.
"Ils ont une capacité de résilience absolument incroyable", confie Catherine Prieto, déléguée départementale de la fondation "le Refuge". "Quand ils arrivent ici, ils ont déjà eu plusieurs vies. Ils ont encore la force de se relever. Je ne sais pas comment j'aurais fait à leur place. Ils m'impressionnent énormément".
Les blessures de Vala et Amine sont encore à fleur de peau. Mais les deux jeunes migrants veulent croire en un monde meilleur. Ils envisagent de rester en France. Vala voudrait faire sortir d'Iran sa famille qui l'a toujours soutenu. Amine espère qu'il reverra un jour sa mère et ses frères et soeurs, dont le petit dernier, né après son départ. Et surtout que son père l'acceptera enfin tel qu'il est un jour.