Le centre Teleperformance de Blagnac, près de Toulouse, est aujourd'hui menacé. C'est le sentiment des salariés après l'annonce vendredi 15 novembre 2024 d'une réduction drastique de la surface des locaux et d'un plan de départs volontaires de 600 personnes sur tout le groupe. Des nouvelles qui surviennent dans un contexte de déclin du site haut garonnais.
La société Teleperformance, leader mondial des centres d'appels, compte 13 antennes en France dont une, près de Toulouse, à Blagnac (Haute-Garonne). Elle a annoncé qu'elle va se séparer de plusieurs centaines de collaborateurs. Selon les informations de "La Lettre", l'entreprise "prévoit de supprimer quelque 600 postes en France, soit près d'un tiers de ses effectifs locaux, sous la forme de départs volontaires. Le groupe se dit en sureffectif chronique et se plaint de pratiquer des prix trop élevés par rapport à la concurrence".
Les sites de référence ne sont plus à Toulouse
Le site de Blagnac était le plus important de France, la vitrine de Teleperformance avec 1.800 salariés, des locaux gigantesques de 6.000m2, des espaces détente et des salles de formation. En 2011, il est passé à 800 salariés et depuis, l'effectif n'a fait que chuter.
Aujourd'hui, d'après Samira Alaoui, déléguée syndicale CGT, il reste un peu plus de 120 salariés en CDI et les intérimaires ont été remerciés. "On n'a plus personne, c'est-à-dire qu'ils ont laissé mourir Blagnac. Ça a été fait exprès. Ils ont viré, viré, viré. Là, aujourd'hui, on n'est même pas 124 CDI". Finie la vitrine, le prestige. Teleperformance est devenu le leader mondial des centres d'appels, mais ses sites de référence sont ailleurs : Bordeaux, Orléans, Le Mans et Villeneuve d'Ascq.
Quand ce vendredi 15 novembre, les salariés ont appris en CSE que la surface des locaux allait être diminuée de 60%, ils ont vu leurs soupçons se confirmer. À cela s'est ajoutée la nouvelle de la suppression de 600 postes via un plan de départs volontaires à l'échelle de l'Hexagone.
"On ne va rester que sur un étage, explique Samira Alaoui encore sous le coup de ces nouvelles. Mais le pire, c'est qu'on a fait une expertise qui a démontré qu'ils vont densifier, c'est-à-dire qu'ils laissent très peu d'espace. Aujourd'hui, on a qu'un client, c'est Veolia, qui est extrêmement… comment dire ? Bon, là, il y a une mise en demeure qui est toujours en cours, qui n'a pas été levée sur les risques psychosociaux. Et donc, si vous voulez, pour l'instant, on n'a pas la garantie que ce client restera d'ici un an. Donc, ils se préparent en fait à fermer".
Une fin annoncée
Samira Alaoui en veut pour preuve un document qui garantit la réduction de la surface jusqu'au 31 décembre 2025 seulement. Pour elle, comme pour de nombreux salariés, il ne fait pas de doute que le site de Blagnac va passer en pertes et profits.
Des profits que dénonce le député LFI Hadrien Clouet depuis le mois de mars. "On a un PDG qui a des pratiques inacceptables. C'est même des méthodes de voyous. L'entreprise Téléperformance France, elle est sciemment démantelée par sa direction. Depuis notamment le rachat de Majorelle. La même direction a mis en concurrence les deux entreprises qu'elle avait achetées pour permettre de supprimer des postes dans l'une ou dans l'autre".
Le plus haut salaire du CAC 40
"Là, aujourd'hui, la direction explique qu'ils veulent supprimer à peu près 600 postes, poursuit-il. On va quand même rappeler que Teleperformance est dirigée par Daniel Julien, le PDG le plus payé, avec le plus haut salaire de tout le CAC 40 par rapport à ses salariés. On a quand même un bonhomme qui vit avec plus de 20 millions d'euros par an de salaire. S'il acceptait de vivre avec seulement 10 millions d'euros, ça ne me paraît quand même pas une exigence totalement échevelée, il n'y aurait aucune suppression d'emploi (...). On est vraiment sur l'exemple de la rapacité la plus crue".
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Pour Hadrien Clouet, le patron de Teleperformance essaie de faire peur aux salariés avec cette annonce d'un plan de départs volontaires. L'objectif serait de regrouper les sites autour des quatre pôles d'excellence cités plus haut.
⚠️ ALERTE !
— Hadrien Clouet (@HadrienClouet) November 17, 2024
En mai, je soutenais les grévistes de @TeleperFrance face à une direction sans vergogne, résolue à détruire l'entreprise.
En dépit des alertes au gouvernement : rien !
Bilan : annonce de 598 suppressions d'emplois en France, dont #Blagnac. Mobilisation générale ! https://t.co/4XOp18aLFD
"Pour tout le reste, ils veulent renégocier la convention collective pour s'aligner, comme ils disent, sur la concurrence, argumente-t-il. Mais la concurrence c'est eux-mêmes, puisqu'ils ont racheté les autres boîtes concurrentes. Donc ils veulent renégocier la convention collective pour mettre fin au 13e mois, à la prime du 13e mois, aux pauses rémunérées et aux jours de carence en cas d'arrêt maladie. Bon tout ça est évidemment uniquement une course pour augmenter la valeur pour les actionnaires".
Le constat est d'autant plus cruel pour Samira Alaoui et le député LFI que certains salariés sont dans l'entreprise depuis 25, 30 ou 35 ans. En plus d'être une injustice, ils jugent cette menace d'une violence extrême. Contactée, la direction de Teleperformance n'a pas répondu à notre sollicitation au moment de la publication de cet article.