Certains ont cru assister, ce mardi 27 août au soir, à la chute d'une météorite. D'autres à celle d'un avion en flammes. En fait, de nombreuses personnes ont assisté à la désintégration d'un satellite de Space X. Explications en compagnie d'un spécialiste.
Space X aurait-elle perdu le contrôle ? L'étrange phénomène lumineux observé du Pays de Galles à la Suisse, en passant par la France ce mardi 27 août 2024, a été décrypté par les spécialistes. Il s'agissait là de l'entrée d'un satellite, lancé en 2021 dans l'espace, et qui serait tombé en panne, selon Benjamin Peter de la Cité de l'Espace.
"Perdant de l'altitude, il a fini par rentrer et se désintégrer dans l'atmosphère en créant cette sorte de boule de feu très spectaculaire qui a pu être observée", indique le chargé de l'actualité spatiale au sein du centre toulousain de culture scientifique.
☄️ Images des probables débris d'un satellite qui ont illuminé le ciel vers 21h30 ce mardi, ici depuis Zurich en Suisse. (© Michelle Maaß) pic.twitter.com/aVKU4wRcTT
— Météo Express (@MeteoExpress) August 27, 2024
Incontrôlable et risqué ?
Est-ce à dire qu'on ne peut décider de la vie et la mort d'un satellite ? "Si, on a la main dessus, rassure Benjamin Peter. Compte tenu des risques de collision, c'est quelque chose de très suivi, notamment chez nous en France par le CNES. En cas de collision avec un autre satellite ou avec un débris spatial, ce qui est le plus courant, ils peuvent complètement les faire dévier."
Chute de satellite du 27 août 2024. ☄️
— Xplora (@XploraSpace) August 27, 2024
Faisons le point sur l’objet qui s’est désintégré ce soir dans le ciel : ⤵️
➡️ L’objet a été aperçu par de nombreux témoins dans le nord de la France, de la Normandie à la Suisse.
➡️ Il a également été observé dans d’autres pays… pic.twitter.com/Gdd6ITqrtm
Dans le cas de ce satellite Starlink, se pose la question de la possibilité d'avoir pu le manœuvrer jusqu'au bout. Surtout que Space X n'a guère communiqué sur le sujet. "On ne sait pas si c'est une rentrée qui est calculée ou si c'est une rentrée qui est subie, commente Benjamin Peter. En tout cas, pour une rentrée calculée, généralement, on ne vise pas un endroit où il pourrait y avoir des populations, même si les satellites Starlink ne sont pas très gros et que les risques sont vraiment infimes."
Le risque de récupérer un morceau de satellite est de 1 sur 100 milliards. Vous avez 65.000 fois plus de chances d'être frappé par la foudre.
Benjamin Peter, chargé de l'actualité spatiale à la Cité de l'Espace
Ce risque est encore plus faible lors d'une "désorbitation contrôlée", puisque "généralement, on vise un endroit comme au milieu de l'océan, souvent le Pacifique."
Un autre satellite bientôt de retour sur terre
Le 8 septembre, l'Agence spatiale européenne annonce qu'elle va "désorbiter" un satellite lancé en l'an 2000. Et tout a été soigneusement préparé. "Ils ont choisi de garder suffisamment de carburant pour le désorbiter et qu'il ne devienne pas un débris supplémentaire autour de la Terre", commente Benjamin Peter.
What's better than disposing of your satellite in a responsible way? Watching it happen and doing some science! When the first @ESA_Cluster satellite reenters the atmosphere on 8 September, we'll be carrying out an experimental airborne observation campaign to learn as much as… pic.twitter.com/ktXzLJOurU
— ESA Operations (@esaoperations) August 26, 2024
Il faut dire que depuis quelques années, il y a une prise de conscience autour de la problématique de débris spatiaux, "une vraie calamité autour de la Terre".
Il y a près de 200 millions d'éléments de plus d'un millimètre, en orbite autour de la Terre. Ce sont des choses, effectivement, qui sont parfois minuscules, mais qui peuvent causer des dommages énormes sur un satellite, sur l'ISS, etc.
Benjamin Peter, chargé de l'actualité spatiale à la Cité de l'Espace
Désormais, L'Europe travaille à ce que les opérations spatiales répondent à certaines règles. Histoire de se laisser encore un peu d'espace. Histoire également de lutter contre la pollution au-dessus de nos têtes.
"Après 25 ans de fonctionnement, le satellite doit être rentré sur Terre, nous explique Benjamin Peter. Car le risque, c'est qu'on ne puisse plus rien lancer parce qu'il y a trop de risques de collision avec, finalement, une forme de chaos qui peut se créer." 36.000 objets relativement imposants et qui ne sont plus actifs sont ainsi sous surveillance.
Lutter contre la pollution
Faire revenir les satellites en fin de vie pour se préserver des fenêtres de tir est une bonne chance. Mais n'y a-t-il pas un revers de la médaille ? Selon le chargé de l'actualité spatiale à la Cité de l'Espace, c'est aujourd'hui une réelle interrogation. "On sait que les météores génèrent une forme de pollution aussi autour de la Terre. Mais quelque part, elle est naturelle. Et elle finit par disparaître."
Désorbiter un satellite et le ramener sur Terre génère aussi une pollution de la stratosphère. Selon des études menées notamment aux États-Unis, un satellite de 250 kilos à peu près, ce qui n'est pas très gros, ça peut générer 30 kilos de nanoparticules d'aluminium qui reste dans l'espace. "Ce n'est pas considérable. Mais vu qu'on en envoie de plus en plus et vu qu'ils vont de plus en plus revenir, au bout d'un moment, ça peut générer de plus en plus de tonnes de particules qui vont se retrouver là aussi en haute altitude autour de nous", estime Benjamin Peter.
Attention
— Sirius Space Vision (@Sirius_V7) August 22, 2024
La Menace Invisible des Débris Spatiaux en 2024
En 2024, l'exploration spatiale est confrontée à un défi majeur
les débris spatiaux.
Des millions de fragments d'anciens satellites, de fusées abandonnées et d'autres objets dérivants mettent en péril nos satellites pic.twitter.com/DZEDsBoT9d
Pour rappel, la constellation de Space X comptabilise aujourd'hui quasiment 7000 satellites Starlink. Et l'entreprise dirigée par Elon Musk ambitionne d'en avoir 40.000 pour assurer l'accès à l'internet haut-débit où que vous soyez sur Terre. Au milieu du désert ou de l'océan. "Quelque part, cela interroge sur nos usages. À quoi doit servir l'espace ? Est-ce qu'on a besoin forcément d'avoir ça compte tenu du coût environnemental que ça représente ? C'est une vraie question", selon Benjamin Peter.