Faire payer des internautes mineurs en échange d'un peu d'intérêt ou de publicité. Deux Toulousaines viennent de révéler cette pratique de plusieurs influenceurs du réseau social TikTok. Elles lancent l'alerte sur ce qu'elles dénoncent être une véritable escroquerie.
Tout commence en mars dernier. Elsa, 25 ans et Mélanie, 27 ans, s'ennuient. Comme des millions de Français, elles sont confinées chez elle à Toulouse. "Nous avons donc décidé de créer une chaine TikTok afin de nous occuper et profiter de l'occasion pour lever le tabou LGBT, raconte Elsa. L'idée c'était de montrer notre vie au quotidien, celle d'un couple de jeunes femmes."
Six mois plus tard, le compte elles_sassument_off est à l'abandon. "Nous avons décidé de boycotter TikTok" clament-elles en choeur. Comme elles le racontent, Elsa et Mélanie ont découvert "le côté obscur des réseaux sociaux notamment celui de TikTok" et ont choisi de le dénoncer. Fin août, dans une vidéo, elle révèlent à leurs 268 000 abonnés que plusieurs influenceurs du réseau social chinois utilisent leur notoriété afin de soutirer de l'argent aux plus jeunes de leurs fans.
"Un clic et hop ! l'argent est envoyé"
Le principe est simple. L'application TikTok permet à ses utilisateurs de créer et partager gratuitement des petites vidéos. Certains de ces "tiktokeurs", comptant des millions d'abonnés, réalisent des "lives" (vidéos diffusées en direct). A cette occasion, les internautes peuvent offrir des "cadeaux" virtuels à leurs "tiktokers" préférés.Lors de ces lives, à droite, il y a un bouton "cadeau. Il suffit de cliquer dessus et hop c'est envoyé !
Le geste est loin d'être anodin car ces cadeaux ne sont pas gratuits. Une fois que l'utilisateur clique sur l'icône, une somme d'argent, cette fois-ci bien réelle, est débitée sur un compte Apple Store ou Google Play. Les revenus générés sont alors partagés entre les influenceurs et l’application. Chaque auteur de vidéos en direct peut recevoir un virement d’1,09 à 109,99 euros.
De l'argent contre de la publicité ou de la proximité
"C'est très ludique mais le problème est que plusieurs influenceurs incitent leurs abonnés à leur offrir des cadeaux en échange d'un compte avec des milliers de followers, en leur proposant de devenir modérateurs de leurs vidéos, en échange d'un peu de publicité ou en promettant d'être un peu plus proche d'eux. C'est une pratique très généralisée et c'est d'autant plus problématique qu'elle s'adresse à un public mineur", assure Elsa preuves à l'appui.Car après avoir lancé un appel à témoin, les deux jeunes femmes reçoivent plus d'une centaine de messages d'internautes victimes de ces agissements. Certains avouent avoir dépensé 2000 euros en cadeaux TikTok au cours de l'année.
Les captures d'écrans ci-dessous que nous nous sommes procurées sont des échanges entre une influenceuse et l'un de ses abonnés. La "tiktokeuse" l'incite sans détours à lui "offrir" 5 drama (5 cadeaux pour un coût total de 275 euros) en échange d'un compte youtube avec 30 000 abonnés. L'adolescent peut aussi payer 6 drama, soit 330 euros contre un peu de publicité durant une vidéo en direct. Au final, l'internaute n'obtient ni la chaine youtube ni la publicité qui lui étaient promises.
Des adolescents manipulés
Une escroquerie dont les deux Toulousaines estiment que le réseau social comme les tiktokers sont entièrement responsables.Plus ses abonnés lui offrent des cadeaux, plus cette influenceuse va loin. Lorsqu'il ne sont plus en mesure de payer, elle prend ses distances avec eux. Elle sait qu'elle a à faire à des mineurs. Ces derniers pensaient pour certains pouvoir récupérer l'argent. Beaucoup de parents n'étaient pas au courant car leurs enfants leur mentaient. Ces influenceurs sont sans scrupules.
Suite à la publication de plusieurs articles de presse sur cette question, l'une des vedettes du réseau social Benoît Chevalier a présenté, le 30 août dernier, ses excuses dans plusieurs vidéos. Des excuses, depuis supprimées. Voici néanmoins l'une d'entre elles.
Tiktok compte en France 6,5 millions d'utilisateurs actifs, selon Harris Interactive. A la fin de 2019, l'application chinoise a passé la barre symbolique des 50 millions de dollars de revenus trimestriels.