Deux dirigeants de la chambre d'agriculture du Lot-et-Garonne ont échappé jeudi en appel à de la prison ferme pour avoir fait creuser illégalement le "lac de Caussade", une retenue d'eau d'irrigation au cœur d'un conflit entre défenseurs de la ruralité, protecteurs de l'environnement et État.
Serge Bousquet-Cassagne et Patrick Franken, président et vice-président de la chambre d'agriculture du Lot-et-Garonne, ont été condamnés par la cour d'appel d'Agen à 10 mois de prison assortis d'un sursis probatoire de 18 mois, alors que le jugement de première instance avait prononcé en juillet 2020 des peines de neuf et huit mois ferme pour avoir fait creuser illégalement le "lac de Caussade", une retenue d'eau d'irrigation.
Une peine plus légère qu'en première instance
La cour d'appel n'a pas retenu cette fois-ci la mise en danger de la vie d'autrui pour la construction de cette digue sans respecter les normes, et n'a pas non plus révoqué le sursis de précédentes condamnations.
Les deux prévenus devront quand même s'acquitter de 7.000 euros d'amende chacun plus 1.000 euros pour les parties civiles au titre du remboursement des frais de justice. Ils devront aussi verser 32.900 euros à Enedis dont des installations
avaient été endommagées.
La chambre d'agriculture enfin devra verser 40.000 euros d'amende dont la moitié avec sursis, comme en première instance.
On savait pertinemment que la justice de notre pays n'allait pas nous mettre en prison pour avoir fait un lac
Serge Bousquet-Cassagne
Ce dernier a vu dans ce jugement un "camouflet pour les associations environnementales". "Bien au contraire", a répliqué Lionel Feuillas pour France Nature Environnement, partie civile. "C'est la première fois que deux dirigeants d'une chambre d'agriculture et la chambre d'agriculture elle-même sont condamnés au pénal pour des délits environnementaux".
Cette retenue d'eau au nord de Villeneuve-sur-Lot a été creusée en 2019 par la chambre d'agriculture, gérée par la Coordination rurale (CR 47), pour quelques dizaines d'agriculteurs désireux d'irriguer leurs exploitations en saison sèche.
Contesté par des associations environnementales mais soutenu par des élus de droite et de gauche, ce lac artificiel donne lieu à une saga judiciaire doublée d'un dialogue de sourds depuis l'annulation fin 2018 - après intervention des ministères de la Transition écologique et de l'Agriculture - d'un arrêté préfectoral autorisant
initialement les travaux.
Sur le plan administratif, la justice a confirmé en février 2021 en appel l'illégalité de l'ouvrage, qui fonctionne depuis plusieurs années et que FNE entend bien faire disparaître.