Un garagiste de Toulouse (Haute-Garonne) dénonce les pratiques d'un cabinet d'expertise automobile. En trois ans, il affirme avoir perdu 470.000 euros de chiffre d'affaires pour ne pas avoir cédé à ce qu'il nomme un chantage. Son garage est au bord du gouffre.
"Mon garage je vais le perdre. Je ne dors plus depuis trois ans. Je vis un calvaire". Max Barros ne compte plus les nuits sans sommeil. Garagiste à la tête d'une entreprise familiale depuis plus de 50 ans, il va peut-être devoir cesser son activité victime d'une escroquerie. C'est en cas en ces termes qu'il qualifie l'attitude d'un cabinet d'expertise avec lequel il avait l'habitude de travailler. Tout commence en 2020.
470 000 euros de pertes
"Dans un premier temps on me demande de revoir mes tarifs à la baisse, de faire un tarif spécifique pour ce cabinet. Si je refuse, on me dit qu'on ne fera plus qu'une partie des expertises chez moi. Si j'accepte, les dossiers seront traités rapidement. Moi je veux garder mon indépendance et travailler correctement ! " Max Barros refuse donc ce qu'il qualifie de "chantage".
Un chantage mis à exécution et qu'il estime 3 ans plus tard à un manque à gagner de 470 000 euros. "L'expert venait faire ses expertises. Je lui donnais mes tarifs. Sauf que dans les rapports, les taux transmis aux assurances étaient divisés par deux ! Les assurances s'appuient sur ce que donne l'expert donc je recevais des remboursements des assurances qui ne correspondaient pas à la réalité", s'indigne ce spécialiste de la carrosserie.
Max Barros n'hésite pas. Il parle de "racket".
Mon fils, s'est rendu au cabinet d'expertise. On lui a dit sur 10 carrossiers il y en a 9 qui craquent! Vous vous rendez compte!
Max Barros, garagistePropos recueillis par R.Guillon et P.Félix
Lui n'a jamais obtenu un rendez-vous ou un entretien avec la direction de ce cabinet d'expertise.
Les choses sont allées plus loin encore selon lui. "Ils ont colporté des ragots sur moi auprès des assurances. Ils demandent aux clients de sortir leurs voitures de mon garage pour les faire expertiser chez eux sans techniciens".
"Ça s'est très mal passé"
Des expertises par ailleurs qualifiées de peu sérieuses par un usager que nous avons pu contacter. Suite à un sinistre sur un véhicule familial, un couple de Toulousains entre en contact avec ce même cabinet d'experts choisi par son assurance. "Ça s'est très mal passé ! Déjà au niveau des échanges très dédaigneux, hautains. Et puis notre véhicule a été mal expertisé".
Le couple en informe son assureur qui provoque une conférence téléphonique tripartite. "Le lendemain une contre-expertise est effectuée alors qu'on attendait depuis 3 semaines. Notre assureur nous a confié que ces délais n'étaient pas normaux !".
Au final le couple a pu être remboursé, mais garde un très mauvais souvenir de cette expérience et s'interroge : le garagiste qui a accompli les travaux a-t-il lui aussi subi des pressions ?
Des pratiques non isolées ?
Max Barros semble loin d'être le seul. Dans un garage près de Toulouse, un gérant dénonce lui aussi des pratiques identiques. Un expert lui a récemment demandé de baisser de 40% la facture sur la main-d’œuvre. Il a refusé. "Je lui ai demandé à quel taux il voulait qu'on travaille puisqu'ils sont chez eux et nous imposent leurs prix pour sans doute bénéficier de prime auprès des assurances", témoigne Yvon Richard concessionnaire automobile à Quint-Fonsegrives.
Face aux coûts de réparation des véhicules qui augmentent, les experts seraient-ils soumis à la pression des assurances ?
Dans un premier temps, le cabinet d'expert mis en cause n'a pas pu répondre à nos sollicitations. Le 4 novembre 2024, dans un mail, le cabinet d'expertise a pu défendre sa position. Selon lui, le conflit avec la carrosserie Barros porte sur l'évaluation des dommages et le comportement du carrossier.
Troisième plainte contre le garagiste
"Sur les dernières années, nous en sommes à la troisième plainte déposée par différents experts de notre groupe pour des violences verbales ou physiques et je sais que par le passé, d'autres experts ont été agressés par M. Barros" assure la société.
Les prix du garagiste sont également pointés du doigt par le cabinet : "Nous discutons avec les réparateurs des coûts de manière contradictoire pour arriver à un consensus et une méthode de réparation qui permettent une réparation dans les règles de l'art. Nous sommes en désaccord avec M. Barros car il refuse le consensus et est impulsif. Il ne tient à lui que de revenir à un autre état d'esprit et de chercher une relation contradictoire plus saine. Le désaccord avec M. Barros persiste, mais la société reste ouverte au dialogue."
De son côté Max Barros a porté l'affaire en justice. Il espère pouvoir faire reconnaître le préjudice subit qui place aujourd'hui son garage au bord de l'abîme.
Écrit avec R.Guillon