Des toilettes mixtes pour renforcer l’égalité fille-garçon, c’est le pari du collège Jean Gay, à Verfeil, en Haute-Garonne. Un dispositif d’abord décrié par les élèves et leurs parents, qui commence pourtant à trouver sa place.
11h30, la sonnerie retentit dans la cour du collège Jean Gay de Verfeil, en Haute-Garonne. C’est l’heure de la récréation, les garçons et les filles se dirigent au même endroit : les toilettes. Ici pas de séparation par genre, ce sont les mêmes cabinets pour tout le monde.
Une initiative mise en place en octobre par le collège. Et depuis, "on s’entend mieux avec les filles", assure Gabin, élève de 4e, "avant on était chacun de notre côté et on ne se parlait pas".
Pour cause, l’aménagement de toilettes mixtes au sein de l’établissement avait pour but premier de favoriser le vivre ensemble. "Nous, adultes, nous savons qu’il y a des problèmes de sexisme au sein de l’établissement", souligne Jean-Philippe Monteil, principal du collège. L’idée germe il y a deux ans, proposée alors par les jeunes élus du conseil de la vie collégienne. "Si on veut faire en sorte que les filles et les garçons soient sur un pied d’égalité, ça commence par le partage des mêmes lieux", assure le chef d’établissement.
« On y passe moins de temps »
Espace à la fois privé et public, les toilettes du collège sont aussi un lieu de socialisation, dans lesquels les élèves avaient pour habitude de passer leur récréation. Depuis la mise en place des toilettes mixtes, Arthur, autre élève de 4e, l’affirme : "On y passe moins de temps." Surtout, ils sont plus propres. "Les enfants font attention, dès que l’espace est partagé, ils sont plus respectueux", observe Jean-Philippe Monteil.
Les urinoirs ont été supprimés, pour éviter les moqueries que subissent les garçons qui, pour certains, "n’osent pas toujours aller aux toilettes". Autre initiative importante : "On a acheté des distributeurs de serviettes et de tampons en libre-service", explique le principal. Normaliser les règles, pour que les jeunes filles se sentent moins gênées. Il ajoute : "Les toilettes mixtes, c'est aussi une façon de simplifier l'accès aux élèves transgenres."
Un dispositif loin de faire l’unanimité
Pourtant, ce n’était pas gagné. À l’annonce de ce réaménagement, les élèves s’étaient érigés contre l’idée de toilettes partagées. Même son de cloche du côté des parents, qui craignaient des tentatives de voyeurisme, ou même d'agression. Jean-Philippe Monteil les a vite rassurés : "Les toilettes sont maçonnées, il n’y a pas d’ouverture en haut ou en bas. Bientôt, ce sera un non-sujet."
En attendant, l’établissement continue d’intervenir dans les classes pour expliquer cette démarche, dans le cadre de l’éducation affective et sexuelle. Un enseignement assuré par Céline Giroussens, l'infirmière scolaire. Elle trouve "dommage que l’on sépare les toilettes dès la primaire, alors qu’ils ne le sont pas en maternelle. Il devrait y avoir une continuité, mais on met dans la tête des enfants que ce n’est pas possible".
Un projet plus large
Il y a encore du travail. À ce jour, 58% des élèves de Jean Gay n’adhèrent toujours pas aux toilettes mixtes. Dans un questionnaire diffusé par la direction, on apprend qu’ils sont 15% à ne jamais fréquenter les cabinets du collège. La bonne nouvelle, c’est qu’avant les toilettes partagées, le chiffre s’élevait à 30%.
Associé à une démarche pédagogique, le réaménagement des toilettes est la première étape d’un projet visant à faire de la cour de récréation un espace plus égalitaire : "On va rééquilibrer la cour pour qu'il n'y ait pas les garçons au centre qui jouent au ballon en prenant toute la place et les filles sur les côtés", décrit Jean-Philippe Monteil. Les jeux de balles ne seront autorisés, à la rentrée, qu'en équipe mixte.
Des initiatives rendues possibles par un environnement propice : si le chef d’établissement a le temps de travailler sur ces sujets, c’est notamment parce que "le collège est favorisé" socialement.