Les greffiers de Toulouse comme partout en France se sentent usés, déconsidérés et sous-payés. Cet après-midi ils seront devant le tribunal judiciaire de Toulouse à 13h en signe de protestation pour une reconnaissance de leur métier et de leur travail. Une journée d'action nationale est également prévue jeudi 21 septembre 2023.
"Votre greffier est en grève mais il est là pour les justiciables." C'est ce qu'on pourra lire sur la pancarte de cette greffière au tribunal de Toulouse. Ce mouvement de protestation parti de la base se mobilise encore aujourd'hui pour une meilleure reconnaissance financière mais également de leurs nombreuses responsabilités.
Manifestation à 13h ce mardi devant le tribunal de Toulouse
Tout est parti d'un projet de loi d'une nouvelle grille indiciaire proposée par le gouvernement. En apparence, il y avait une augmentation de salaire, mais cette profession ne trouvait pas son compte en termes d'ancienneté. "Cette grille donnait des points supplémentaires à la sortie des écoles, mais faisait perdre jusqu’à 7 ans d’ancienneté. Moi, je perdais 6 ans de carrière pour 4€ bruts par mois de plus", affirme cette greffière toulousaine.
Une proposition inacceptable pour les greffiers. Fait rarissime dans la justice, le mouvement de protestation est parti de la base, sans les syndicats. La mobilisation a été forte cet été. Réunis en AG, les greffiers toulousains ont décidé de cette nouvelle journée d'action à 13h devant le tribunal de Toulouse.
Les syndicats, dont l'UNSa-SJ (Services Judiciaires), appellent à une journée nationale de justice en grève le jeudi 21 septembre. "Le mouvement venu de la base et il est légitime, affirme Christophe Pinto, représentant syndical UNSa-SJ. Les collègues s’en sont emparés et se sont organisés pour exercer une pression sur le Ministère de la Justice. Les négociations sont en cours, une réunion est prévue demain. Le Ministère n’est pas force de proposition, le dialogue est compliqué et c'est difficile de pouvoir se faire entendre auprès de l’administration."
Les manifestants se battent pour une grille indiciaire et un statut en adéquation avec les missions et les
responsabilités des greffiers.
Une meilleure rémunération et plus de considération
La base comme les syndicats partagent le même constat : rémunération insuffisante pour un niveau d'études Bac+4 ou 5, responsabilités non reconnues, manque de considération et des conditions de travail qui se dégradent.
On nous prend pour des scribes mais on est des garde-fous. Nous faisons respecter les droits de tout un chacun. Sans un greffier, aucune décision ne peut être rendue. Nous validons les décisions des juges, c'est une charge lourde qui pèse sur les épaules du greffier.
Une greffière toulousaine en grève
Le salaire de base d'un greffier est de 1 800€ net. Ils sont placés dans la catégorie B des fonctionnaires. Syndicats et grévistes demandent à passer en catégorie A, ce qui selon eux serait plus conforme à leur niveau d'étude et leur responsabilité. "On a les diplômes pour. Nous sommes tous à Bac + 4 ou + 5 et 18 mois de formation. Nous avons le même niveau d’études que les magistrats. Nous sommes dans des métiers particuliers et nous ne pouvons pas être détachés ailleurs", déclare la greffière toulousaine.
Comme beaucoup de ses collègues, elle sera présente sur le parvis du tribunal, mais aussi à l'audience prévue cet après-midi. "Je suis en grève, mais s'il n'y a personne pour me remplacer, j'assisterai à l'audience par conscience professionnelle et pour ne pas pénaliser le justiciable. On travaille dans l'injustice, pour la justice."
Un mouvement appelé à durer
"Le gouvernement a finalement retiré sa proposition de grille indiciaire. Il travaille sur autre chose. Nous en saurons plus demain, lors de la 3e réunion. On a du mal à avoir une feuille de route complète, il n'y a pas de vraie vision de la part du Ministère de la Justice". Christophe Pinto ne sera pas à Paris pour les négociations, mais il les suivra de près. L'UNSa-SJ et d'autres syndicats comme la CGT manifesteront un peu partout en France le jeudi 21 septembre 2023, notamment à Paris sur l'île de la Cité.
La CGT a déposé préavis qui court jusqu’à fin octobre et les greffiers de toute la France entendent bien obtenir gain de cause. Autre motif de discorde avec le gouvernement, l'arrivée de contractuels pour aider les greffiers dans leur charge de travail, mais qui n'ont pas la même formation juridique. À Toulouse, une bonne dizaine de contractuels auraient été embauchés avec une mission sur 3 ans pour prêter main-forte. "Ils sont aussi en catégorie B, avec une rémunération quasi-identique, mais ils n'ont pas de grille indiciaire. En ce moment, on leur propose souvent de passer en CDI mais celà concerne seulement le ressort de la cour d'appel de Toulouse", affirme le représentant syndical UNSA-SJ majoritaire dans la profession. Selon la greffière toulousaine en grève : "ces contractuels aident énormément, mais ils ne peuvent pas assister aux audiences, donc cette aide est relative. De plus, ils ne sont pas indépendants comme nous, mais soumis à pression, car il y a la menace de ne pas renouveler leur contrat."
C'est tout ce travail et ces responsabilités que greffiers et syndicats voudraient voir reconnaître dans les prochains jours, avec une rémunération en adéquation. Faute de quoi, le mouvement n'est sans doute pas terminé.