Photographe professionnel basé à Toulouse, Anthony Jean a embarqué pour plusieurs missions à bord de l'Aquarius. Sur ce bateau de l'ONG SOS Méditerranée qui se porte au secours des migrants, il est à la fois photographe et militant. Il témoigne du drame qui se joue chaque jour en Méditerranée.
Il avait déjà travaillé sur le quotidien dans les camps de Sahraouis, dans le sud algérien ou sur les arrivées de réfugiés sur les plages grecques. Pour lui, la crise migratoire qui secoue actuellement l'Europe, est "la plus importante crise de ce début de décennie". Anthony Jean n'a donc pas hésité très longtemps quand il a eu la possibilité de s'embarquer à bord de l'Aquarius, le navire de SOS Méditerranée, cette organisation non gouvernementale qui se porte au secours des migrants en Méditerranée.
J'ai eu la chance de pouvoir monter à bord de l'Aquarius et de poursuivre ce travail déjà entamé sur les questions migratoires, ça m'a paru essentiel d'aller couvrir ça". Anthony Jean
Cinq missions de trois semaines
Anthony Jean a participé à cinq missions sur l'Aquarius. Cinq missions, en tant que photographe officiel et témoin du drame qui se joue chaque jour en Méditerranée. "Je crois profondément au pouvoir des images. Notre mission, en tant que photographe à bord, est essentielle", dit-il. "Les gens ne comprennent pas trop ce qu'on fait au large, ce qu'on fait là-bas à patrouiller mais ça reste une zone de guerre, une zone où il y a une personne sur 18 qui meurt aujourd'hui, où il y a eu plus de 1 600 personnes qui ont trouvé la mort depuis le mois de janvier".Un "photographe militant"
A bord de l'Aquarius, Anthony Jean se sent à la fois photographe et militant. Car s'il monte à bord comme photographe, il est aussi formé au sauvetage, comme tous les membres d'équipage. "Je suis l'oeil de l'ONG mais à n'importe quel moment, il faut savoir poser l'appareil et agir en équipe. On est tous ensemble pour mener à bien le sauvetage".
Un appel aux gouvernements européens
Sauver des gens et alerter inlassablement sur leur sort, notamment les gouvernements européens. C'est pour lui plus que jamais une nécessité, après "l'errance" de l'Aquarius cet été, avec 141 réfugiés à son bord, qu'aucun état ne voulait accueillir.
On ne fait qu'appliquer le droit mais on est aujourd'hui face à des gouvernements qui essaient de criminaliser les ONG, de les faire passer pour des taxis de la migration. Aujourd'hui, on essaie de nous dire que c'est criminel de tendre la main pour sortir quelqu'un de l'eau. Ce qu'on fait, c'est humain".
Aujourd'hui, "il faut que les gouvernements s'interrogent" dit encore Anthony Jean, "pourquoi ces gens essaient de rejoindre l'Europe ? Qu'est-ce qu'ils fuient ?" Et il faut trouver des réponses à ces questions. En attendant, il compte sur ses photos pour éveiller les consciences. Publiées dans la presse et dans un livre qui regroupe le travail de 15 photographes embarqués tour à tour à bord de l'Aquarius, elles font aussi l'objet d'expositions.
Voyez la rencontre de Frédéric Fraisse et Eric Foissac avec Anthony Jean :