POLÉMIQUE. Propos anti-Israël tenus en plein cours devant des étudiants : l'enseignant contractuel suspendu à titre conservatoire

Un professeur d'une école d'études supérieures de Toulouse a été enregistré lors de son discours de rentrée. Devant ses étudiants, il tient des propos à sens unique contre Israël. L'enregistrement, publié sur les réseaux sociaux, suscite la polémique. Décryptage.

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L'enregistrement dure cinq minutes environ. On y entend un homme évoquer le conflit israélo-palestinien. S'appuyant sur une revue, The Lancet, il évoque 200.000 morts parmi les civils à Gaza. "Une boucherie", commente-t-il.

Le professeur vacataire, docteur en mathématiques appliquées qui accueille ses étudiants pour la rentrée, peut-il tenir de tels propos ? Dire qu'il s'agit d'une "guerre à sens unique". Affirmer qu'à son sens, "il est malhonnête de dire que le responsable de ce qu'il se passe actuellement, c'est le Hamas" ? Peut-il appeler ses étudiants à participer aux manifestations de soutien aux Palestiniens ?

La polémique enfle ce mercredi 4 septembre 2024 depuis la diffusion de cet enregistrement sur les réseaux sociaux et des sites réputés d'extrême-droite. Au point de faire réagir la ministre démissionnaire de l'Enseignement et de la recherche.

"Le rôle de l’enseignement supérieur est de bâtir une société meilleure. De combattre l’antisémitisme et toutes les discriminations. De lutter contre les fake news et les amalgames nauséabonds. De protéger chaque étudiant. D’agir contre les haines et de soutenir toutes ses victimes, écrit Sylvie Retailleau sur son compte X.

Ces propos sont inadmissibles. J’ai demandé à ce que les sanctions qui s’imposent soient prises.

Sylvie Retailleau, ministre démissionnaire de l'enseignement supérieur et de la recherche

"Ces propos n'ont rien à faire dans une université, dans notre ville et dans notre pays, écrit à son tour Jean-Luc Moudenc. Blessés dans notre chair par les attentats de 2012 visant des élèves juifs, nous savons ce vers quoi ces propos peuvent nous conduire", s'insurge le maire de Toulouse.

Quel est le cadre de l'expression publique d'un enseignant-chercheur ?

Fin mars 2024, le collège de déontologie de l'enseignement supérieur et de la recherche s'est penché sur la question de l'expression publique des enseignants-chercheurs. Rappelant que la liberté d'expression a un fondement constitutionnel et découle du principe d'indépendance des professeurs d'université, le collège précise : "Il incombe en particulier aux enseignants-chercheurs d’exprimer leurs opinions de manière argumentée et dans le respect de l’intégrité scientifique. Il leur appartient de faire preuve de tolérance, d’acceptation du pluralisme et de respect d’autrui. Toute forme d’attaque des personnes et tout propos violent sont à exclure."

Ce professeur était-il dans son rôle ? Était-il dans son cours, dans sa recherche ? La question se pose. Selon un professeur d'université que nous avons interrogé, "il faut voir si on est dans l'application de ce principe de l'indépendance des professeurs d'université qui leur permet de faire des recherches pour éventuellement apporter une contre-vérité, un contre-argument à un autre collègue ou à un enseignement officiel."

Professeur affilié à la Toulouse School of Economics, chargé de cours et d'innovation pédagogique, diplômé d'un doctorat en mathématiques appliqués, l'auteur présumé de ce discours de rentrée universitaire s'expose à des sanctions administratives pour ses propos à sens unique. "Là, il crée un trouble dans l'établissement, indépendamment de la vérité ou non-vérité de ce qu'il dit", nous décrypte cet autre universitaire que nous avons joint.

Ce mercredi 4 septembre 2024, le directeur de Toulouse School of Economics a finalement annoncé la suspension "à titre conservatoire" de cet enseignant contractuel.

Tenus dans un cadre professionnel par un agent public sans relation avec la matière enseignée, ces propos contreviennent à l’obligation de réserve en vigueur dans le service public. TSE est un lieu ouvert de partage des savoirs en sciences sociales.

Christian Gollier, directeur de TSE, sur son compte X

Une procédure disciplinaire est engagée.

Des poursuites en justice ?

"Mensonges, désinformation, calomnies, incitation à la haine et apologie du terrorisme..." Arié Bensemhoum, ancien président de la communauté juive de Toulouse, a vivement réagi sur les réseaux sociaux. 

"Rendez-vous devant les tribunaux", affirme ce représentant de la communauté juive, ce qui laisse présager un dépôt de plainte.

Et qu'en est-il de l'auteur de cet enregistrement ? A priori, il est peu probable qu'on le lui reproche. Dans le cadre d'un cours où un enseignant partage ses connaissances, l'enregistrement et sa diffusion ne peuvent se faire sans autorisation. En revanche, concernant des propos "en dehors du cadre" de cet enseignement, cela semble plus difficile de s'attaquer à sa diffusion publique sur la base d'une violation de la vie privée ou de la propriété intellectuelle.

Nous avons tenté de joindre l'enseignant et la direction de TSE, sans réponse à l'heure de la publication de cet article.

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