L'enquête pour identifier les agresseurs de trois pompiers venus porter secours à une dame âgée dans le quartier du Mirail à Toulouse s'annonce difficile en l'absence possible de témoins acceptant de déposer
La Sûreté, chargée des investigations, doit pouvoir compter sur la "responsabilisation des citoyens", selon le capitaine David Delattre, chargé de communication à la Direction départementale de la sécurité publique (DDSP). "Il faut que les jeunes qui ont fait ça prennent conscience que demain, ça peut être leur père, leur mère, leur fils qui a besoin de soins", a-t-il dit en invitant les témoins à se manifester. "Ce n'est pas faire de la délation que de rappeler à ce groupe d'individus que ce qu'ils ont fait est inadmissible", a-t-il ajouté. Mais, au-delà de l'émoi soulevé par l'agression, ce genre d'enquête n'est jamais simple et, s'il y a des témoins, rien ne dit qu'ils se présenteront au commissariat, explique une source proche des investigations. Au contraire, c'est rarissime", ajoute-t-elle.
Les auteurs encourent des peines aggravées par le statut des victimes, dépositaires de l'autorité publique: trois ans de prison et 45.000 euros d'amende, a rappelé le procureur Michel Valet.
Les trois pompiers ont été violemment pris à partie par plusieurs jeunes dans le quartier du Mirail samedi soir. L'un des secouristes a reçu un coup de pied au visage alors qu'il tentait de ramasser sa radio projetée au sol par un premier coup de pied. Les trois pompiers professionnels ont essuyé des insultes, des menaces de mort et ont dû rebrousser chemin. Leur véhicule a alors été caillassé, l'un des projectiles a étoilé le pare-brise.
Le Service départemental d'incendie et de secours (SDIS) a porté plainte. Pour son patron, le colonel Patrick Toufflet, les insultes et caillassages ne sont pas rares mais l'incident de samedi est "exceptionnel" parce que son intensité a fait avorter la mission de secours.
A la tête de plus de 2.000 pompiers professionnels et volontaires, Patrick Toufflet souligne que ses hommes reçoivent souvent l'aide de la population dans les quartiers sensibles et qu'il leur arrive d'être insultés "en plein centre de Toulouse". Selon lui, le recours à une escorte policière pour une intervention dans un quartier difficile n'est pas systématique: il dépend de l'heure, d'éventuels signes avant-coureurs de tension dans le quartier, etc.
Une source proche du dossier s'étonnait toutefois que, dans ce cas précis, les pompiers n'aient pas jugé utile de recourir à cette protection.
La droite toulousaine, déjà engagée dans la bataille des municipales, s'est emparée de l'affaire. Le député UMP Jean-Luc Moudenc, candidat à la mairie, a ironisé sur le fait que l'incident était survenu quelques jours après que le maire socialiste sortant Pierre Cohen et deux ministres eurent effectué une visite dans ces quartiers pour défendre la politique de la Ville. "La municipalité et l'État sont co-responsables", a pour sa part accusé Christine De Veyrac, candidate UDI à la mairie.
Par ailleurs, l'Assemblée des départements de France (ADF) appelle mardi "à la solidarité envers les pompiers", après l'agression dont ont été victimes trois d'entre eux au Mirail le week-end dernier. L'ADF "veut exprimer son soutien aux pompiers de la Haute-Garonne", écrit-elle dans un communiqué. "Est-il besoin de rappeler que de telles agressions sont d'autant plus inadmissibles qu'elles portent aussi directement préjudice aux populations qui appellent les pompiers à la rescousse, en toutes saisons et en toutes circonstances ?", ajoute l'ADF.
Pour les départements, qui sont les responsables des services départementaux d'incendie et de secours (SDIS), "les incidents du Mirail, qui ne sont malheureusement pas les premiers du genre, s'ils appellent à une sanction exemplaire envers les fauteurs de troubles, rendent également indispensable une prise de conscience par l'ensemble de la population du rôle indispensable des pompiers". Ces derniers "exercent avec courage et dévouement leur mission qui les amène à intervenir aux services de tous, souvent des plus déshérités, dans les situations les plus périlleuses", rappelle l'ADF.