Une nouvelle tortue serpentine de 40 cm, espèce invasive et potentiellement dangereuse, a été capturée mercredi par les gendarmes de Ramonville, en bordure du Canal du Midi. C'est la cinquième tortue ainsi capturée dans ce secteur en trois mois.
Dans la gendarmerie, il faut aussi savoir boucher les nids de tortues.
C'est ce qu'ont dû faire avec une pelle mercredi matin les hommes de la brigade de Ramonville en bordure du Canal du Midi, après avoir capturé une grosse tortue serpentine de 40 centimètres, aussi appelée "tortue hargneuse".
Un bec coupant comme un rasoir et capable de sectionner plusieurs doigts
Des promeneurs les avaient alertés de la présence de cet animal originaire d'Amérique du Nord, appartenant à une espèce invasive et potentiellement dangereuse, explique la gendarmerie de la Haute-Garonne sur sa page Facebook. Son bec, "coupant comme un rasoir", est "capable de sectionner plusieurs doigts d'un adulte, voire le membre d'un enfant." La tortue capturée n'appartient cependant pas à l'espèce alligator, comme indiqué par les gendarmes, mais à une espèce cousine, la "tortue serpentine".
Que faisait là cette tortue carnivore, dont la taille peut atteindre 60 cm, et le poids 60 kilos, capable de pondre autant d'œufs ? "Elle a probablement été abandonnée par son propriétaire la voyant grossir et ne sachant plus qu'en faire", avance un gendarme.
Selon son directeur et fondateur, Jérôme Maran, la tortue serpentine (Cheylidra serpentina pour les spécialistes), d'un aspect tout aussi préhistorique que sa cousine "peuple tous les cours d'eau des Etats-Unis". Son poids maximum n'excéderait pas 60 kilos, deux fois moins que celui de la tortue alligator. "Dès lors qu'elle reste dans l'eau", cette grosse bête ne présenterait "aucun danger", estime le directeur du Refuge des tortues. Ce dernier craint que se développe "une psychose par rapport à une situation qui ne le mérite pas". Jérôme Maran admet toutefois que "si on la sort de l'eau ou si elle se sent menacée en période de ponte, elle n'hésite pas à mordre".
Une quinzaine de tortues serpentine est récupérée chaque année dans le secteur de Ramonville par le Refuge des tortues.
Chaque année, son refuge récupère une quinzaine de ces tortues repérées dans le secteur de Ramonville, peuplé par une population qui se serait installée dans l'étang jouxtant la Ferme pédagogique de 50.Elles font partie des plus grosses espèces de tortues d’eau douce. La Cheylidra serpentina a été commercialisée, alors de petite taille, dans les animaleries en France, à la suite de l’interdiction de l’importation de la Tortue de Floride (Trachemys scripta elegans) en Europe en 1997. Et comme pour la Tortue de Floride, de nombreux propriétaires, les voyant grossir, s'en sont sont débarrassés en les relâchant dans la nature. D'où une population bien établie dans un tiers des départements français. Avec une prédilection pour la Méditerranée, et notamment l'Occitanie, où la tortue hargneuse, selon des données de l'Office Français de la Biodiversité (OFB) de 2017, était déjà présente en Haute-Garonne, dans le Tarn, le Tarn-et-Garonne, le Lot, les Pyrénées Orientales, l'Hérault et le Gard. Dans le secteur de Ramonville, 22 individus avaient à l'époque déjà été répertoriés.
"Cette espèce exotique n'a rien à faire là", explique le directeur adjoint de l'OFB Occitanie Etienne Frejefond. "C'est un facteur d'érosion de la biodiversité", regrette-t-il."Cette tortue peut apporter des agents pathogènes tels que des bactéries ou des champignons responsables de la peste des écrevisses à patte blanche". "C'est par ailleurs une espèce vorace, en compétition avec la faune locale, notamment la tortue cistude d'Europe, appartenant elle à une espèce protégée".
L'OFB ne peut certes pas mettre un agent derrière chaque citoyen qui relâche sa tortue hargneuse. Mais il rappelle toutefois qu'un tel acte est passible d'une peine maximale de 2 années de prison et de 30.000 euros d'amende.Voir ici le reportage d'Emmanuel Wat et Laurence Boffet :