REPORTAGE. 2 morts suite à des règlements de compte, les habitants d'un quartier populaire entre "peur" et "habitude"

Quelques jours après un nouvel homicide qui a coûté la vie à un homme de 27 ans sur fonds de trafics de drogue dans le quartier d'Empalot à Toulouse (Haute-Garonne), les habitants ne partagent pas le même état d'esprit. Certains font part de leur inquiétude, voire de leur peur, d'autres se disent habitués de ces tirs à quelques mètres de chez eux. Reportage.

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En ce doux jeudi matin du début d'automne, les passants déambulent dans tous les sens à Empalot au sud de Toulouse (Haute-Garonne). Plusieurs mamans avancent leurs poussettes d'un pas lent, des personnes âgées sortent de la boulangerie ou du petit commerce du coin. Autour de la principale zone piétonne, d'autres attendent, sans trop savoir quoi. Un calme plat comme sur le terrain de football, en parfait état, sur lequel des enfants gambadent sous la direction de leur professeur.

"Les gens ont peur de sortir"

Le contraste est frappant entre ce quotidien lambda, agréable, et ce qu'il peut se passer dans ce quartier la nuit tombée. Il y a pile une semaine, un homme de 27 ans, est tué par balles, dans la rue de Menton, en plein cœur d'Empalot. 

Croisé sur un parking, Christophe pose des mots froids sur ce nouvel homicide, le deuxième en moins de quatre mois. "Je pensais que c'était un tir de mortier, puis je me rends compte que ce sont des coups de feu. Ça fait peur, je ne me sens pas en sécurité" lance cet habitant, depuis 11 ans, dans un HLM. "Cela s'est bien dégradé, avec plus de présence de dealers. Ça tourne beaucoup." Il a plusieurs fois demandé à partir ailleurs, sans succès.

Un peu plus loin, une autre riveraine souhaitant rester anonyme traîne son chariot de courses. Ancienne habitante de la rue de Menton, cette sexagénaire n'est plus à l'aise. "Les gens ont peur de sortir et moi aussi. Je suis obligée de garder mes volets fermés. Je fais plus attention, je regarde autour et derrière moi" mime-t-elle avec des gestes du bras. "C'est triste. Les jeunes se tuent, ça devient comme un film. Ça va aller de pire en pire s'il n'y a pas plus de sécurité."

Trois jours seulement après cet homicide, quatre hommes, dont un mineur de 17 ans, sont interpellés en voiture près du quartier. Lourdement armés, ils envisageaient de venger la victime. "Ce n'est pas bon, ce n'est pas bon de tuer" répète Mustapha, assis sur un banc devant la station de métro. Dans le quartier pendant 28 ans avant de déménager à Saint-Michel, il se souvient de nuits "où il ne pouvait pas dormir jusqu'à trois heures du matin". "Je ne comprends pas" lâche-t-il, d'un "non" de la tête. 

D'autres assurent se sentir en sécurité malgré ces règlements de compte

Comme lui, d'autres habitués sont moins tranquilles depuis quelques années. "Pendant mes études, on a créé un groupe Facebook quand on rentrait tard le soir. Je restais aussi chez des amis tôt le matin pour ne pas rentrer en pleine nuit" concède Tania, aujourd'hui auxiliaire de vie. "Maintenant, on reste toujours ensemble pour aller faire les courses" se rassure un couple de retraités. 

Une inquiétude implicite, tabou, qui ne se voit pas sur la tête de tous les riverains en cette matinée ensoleillée. Ces pensées stressantes sont même totalement absentes chez d'autres riverains d'Empalot. Ornella accorde quelques minutes entre un rendez-vous médical et son retour au travail en tant qu'aide à la personne. Grand sourire, elle avoue "avoir déjà entendu des coups de feu". Mais elle "voit souvent des voitures de police" et c'est justement ce qui fait qu'elle "se sent en sécurité". 

Pierre, baguette à la main, est dans le même esprit. "Dans la journée, ça va, c'est calme" tempère celui qui vit dans le quartier depuis plus de 50 ans. "Les trafics, ça se passe au fond, après le métro. On a l'habitude."

Dans une école, "on se sent bien" malgré tout, selon une mère

Aux abords du groupe scolaire André-Daste, pas de cordon sanitaire ou d'attroupement particulier après cette mort tragique. "On est dans un quartier où il y a des choses bien et des choses mal" désamorce une maman de quatre enfants, excédée que l'on stigmatise son quartier de toujours pour les mauvaises raisons. En prenant comme exemples la tranquillité ambiante et l'insouciance des enfants à la sortie de l'école, elle poursuit. 

"Regardez, ici, il y a des familles de toutes les origines, qui restent ici parce qu'elles se sentent bien." Elle promet que l'une des professeures de l'établissement fait le forcing chaque année pour enseigner ici. "Si des gens ne veulent pas rester ici, ils peuvent partir. Il ne faut pas rester dans un endroit que l'on n'aime pas" reprend-elle sèchement.

Après ce nouvel homicide, le maire de Toulouse Jean-Luc Moudenc promet "d’agir et de renforcer au plus vite tous les moyens de police et de justice", "pour contrôler davantage ces points de deal qui font l’objet de rivalité entre bandes" sur Twitter. Il invite le gouvernement "à construire une nouvelle et forte impulsion, volontariste et dotée de moyens renforcés". Avec l'espoir qu'Empalot demeure paisible de jour comme de nuit. 

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