Editer un livre en braille coûte en moyenne 800 euros. Depuis ce 4 janvier 2023, une association toulousaine vend ses éditions en braille au même prix que les ouvrages d'impression classique. Un pas de plus vers l'équité. Reportage.
Le 4 janvier 1809 naissait Louis Braille, le célèbre inventeur qui a donné son nom au codage bien connu pour les non-voyants. 214 ans plus tard, ce mercredi 4 janvier, une maison d'édition toulousaine, le Centre de Transcription et d'Édition en Braille (C.T.E.B), décide de vendre désormais ses livres en braille au prix unique librairie.
Édités aux portes du centre-ville de Toulouse (Haute-Garonne), la fabrication des livres en braille est évaluée à 800 euros.
Et pour cause, leur édition demande un travail de transcription et de mise en page très important. Elle nécessite également énormément de papier par rapport à la production d'un livre classique imprimé. "On n'utilise pas d'encre mais on fait des bosses sur le papier", explique Clément Jeneste, technicien d'imprimerie à C.T.E.B.
Les coûts de production sont donc très élevés. Mais "grâce à une bonne gestion de l'association", C.T.E.B peut désormais proposer ces ouvrages en braille au même prix que les autres. "Pour moi c'est vraiment un problème d'équité et d'accès à l'information et à la culture", rapporte Adeline Coursant, la directrice de l'association C.T.E.B.
Le braille meilleur que les livres audio
Car selon Jean Frontin, non-voyant et vice-président de l'association, lire a de nombreux bienfaits. "Pour l'orthographe c'est très important. Comment l'acquérir si ce n'est en lisant et en écrivant ? Par exemple, je suis sur le mot "bungalow". Est-ce que vous entendez le W ? Non, donc il faut le lire pour le savoir", rapporte le vieil homme, penché sur son livre. À l'aide de ses deux mains, il parcourt les lignes. "On lit à deux mains, explique-t-il. La main droite va jusqu'au bout de la ligne tandis que la main gauche va chercher ce qui est en dessous". Ainsi, Jean Frontin éprouve plus de plaisir à lire qu'à écouter un livre audio.
En lisant, je mémorise davantage le livre. A haute voix, le lecteur peut transformer le texte. Alors qu'ici, il n'y a pas de médiation, c'est moi qui me fait mon roman.
Jean Frontin, non-voyant
2.000 ouvrages différents vendus à l'international
L'association C.T.E.B propose dans son catalogue plus de 2.000 oeuvres. Chaque année, 200 nouveaux titres viennent enrichir sa collection. De la littérature jeunesse, aux essais et poésie : il y en a pour tous les goûts. "On se fie beaucoup aux meilleures ventes, aux auteurs à succès. On suit l'actualité, les prix littéraires...", confie Céline Rkalovic, transcriptrice-adaptatrice.
Et ce qui marche le mieux, ce sont les livres destinés aux enfants. Avec des illustrations tactiles aux textures différentes, la lecture des jeunes malvoyants est égayée. "Ils vont aussi lire les images. Là il y a du poil, donc on va essayer de retrouver la sensation de poil", décrit Marie-Valentine Garcia, graphiste adaptatrice en feuilletant un livre jeunesse où apparait plusieurs animaux. Et ça marche. Les meilleures ventes de l'association sont depuis peu des livres en braille pour enfants. Un pas de plus vers l'égalité entre voyants et non-voyants.