En grève, l'Ecole Nationale Supérieure d'Architecture de Toulouse alerte sur le manque de moyens structurels de ces écoles. Pas de cours, pas d'enseignement comme d'habitude mais une présence des profs et des élèves pour un temps de réflexion. Mercredi 15 mars, ils manifestent contre la réforme des retraites et le manque de moyens.
L'école d'architecture toulousaine ressemble à une ruche ce mercredi 15 mars. Les 200 élèves sont par monts et par vaux. Difficile de croire que les cours sont "banalisés" c'est à dire faits différemment depuis le lundi 13 mars. En grève, étudiants et professeurs préparent la manif des retraites et d'autres actions dans la semaine.
"La banalisation" des cours
Le mouvement est parti de Normandie fin janvier : "ENSA lutte". Les Écoles Nationales Supérieures d'Architecture dénoncent la réduction des effectifs, le manque de matériel et les mauvaises conditions d'études. Ce mercredi matin, les pancartes cartonnées et les banderoles taguées sont en préparation pour que leur mouvement soit visible cet après-midi. Jeanne Théron explique les raisons de cette mobilisation.
Dans les couloirs, on croise aussi des professeurs qui assurent des cours de manière différente et qui donnent surtout un coup de main pour les revendications. Yann Josse est Maître de conférence à l'ENSA de Toulouse. "L'ENSA de Rouen est en grande difficulté mais à Toulouse, nous sommes limite. Regardez les bâtiments, les toits, les intérieurs...Le manque de moyens est flagrant. Un étudiant en architecture coûte en moyenne 11 000€ par an. A Toulouse, c'est entre 7 500 et 8 500... Il faut savoir qu'à la fac c'est plutôt 10-12 000 et les écoles d'ingénieurs dans le public 14-15 000 €. Nous avons des charges lourdes que l'on ne peut plus assurer."
Etudiant-es, enseignant-es et personnels de l'administration de l'ENSA Toulouse ont décidé en assemblée générale de "banaliser" cette semaine du 13 au 17 mars. D'ailleurs "les assemblées générales (AG) ne se font plus dans le lieu habituel pour raison de sécurité", affirme Anthony Ribeyrolles en dernière année d'études ici. Quelques cours ont bien lieu mais c'est surtout l'occasion d'échanger différemment et de réfléchir.
Pour la première fois, ils défileront dans le cortège des manifs des retraites ensemble et avec du visuel.
Une visibilité dans la manifestation du 15 mars
C'est parti d'une blague d'un professeur : "on pourrait faire un char pour la manif !" Avec du matériel de récupération trouvé sur place, le délire est devenu concret. Mardi soir, étudiants et professeurs ont prolongé la "banalisation" des cours par des ossatures en bois montées sur des caddies.
Ce n'est pas 1 mais 2 chars qui défileront tout à l'heure dans le cortège. "Il y en a un qui va faire 2 m de haut et l'autre 4 m. Ils vont rouler sur des caddies, c'est une première pour nous car avant, on défilait sans rien dans les manifs". Anthony Ribeyrolles est plutôt satisfait du résultat et de la mobilisation : "je crois que 150 élèves en tout ont participé au travail pour cette manif".
Car un peu plus loin, il y a l'atelier pancarte. "Architecture au bord de la rupture", "ENSAT isfait", "Archi fauchés" ou encore "Faut pas pousser mémé dans les archis" !
Un peu plus haut, les banderoles se confectionnent avec des tags et des pochoirs.
Tout le monde est visiblement motivé pour donner de la visibilité à leurs revendications, en profitant de la "vitrine" des retraites. Lundi déjà, plusieurs étudiants ont manifesté devant la DRAC à Toulouse pour soutenir leurs collègues des Beaux-Arts de l'ISDAT.
Des conditions dégradées en attendant une nouvelle école
Pendant la manifestation, certains élèves vont organiser des ateliers de réparation ! Car oui, des fuites d'eau, des trous dans les murs, du mobilier défectueux, une toiture défaillante font partie du lot quotidiens des étudiants et du personnel de l'ENSA de Toulouse.
Les conditions pour étudier se dégradent et la santé mentale des étudiants aussi. Cette semaine va donc servir à libérer la parole et faire remonter les problèmes à la surface. Déjà en février, les journées portes ouvertes se sont transformées en vitrine de revendications par rapport à des problèmes de harcèlement. Avec des banderoles : "je veux être diplômé.e pas agressé.e"
Une AG est prévue vendredi pour décider de la reconduite du mouvement. Selon les étudiants de Toulouse, 19 écoles d'architecture ont procédé à l'arrêt des cours cette semaine.