Entre triple épidémie (covid, grippe, bronchiolite), fêtes de fin d'année, médecins généralistes en grève, le centre SOS médecins, comme à Toulouse (Haute-Garonne), est totalement débordé. "La triple épidémie ne fait que montrer que le système de santé va mal" déplorent les médecins.
Comme tous les jours, le centre SOS médecins de Toulouse (Haute-Garonne) fait face à un nombre d’appels incalculable. À 11h, déjà 69 consultations effectuées et seulement quelques créneaux de libres en fin de journée pour des consultations. Pour les visites à domicile, c’est déjà totalement saturé.
SOS médecin saturé
"Nous rencontrons des difficultés compte tenu de la conjonction des trois épidémies de grippe, covid et bronchiolite, ce qui fait que l’on a un surplus d’appels pour cette période. S’ajoute à cela la fermeture des cabinets des médecins traitants", explique Claire Bouny, directrice de SOS médecins de Toulouse.
Cette fermeture de nombreux cabinets médicaux s’explique par les vacances scolaires, mais aussi par un mouvement de grève des médecins généralistes. Si SOS médecins n’est pas en grève, ils soutiennent cependant leurs confrères. "Les gens ont besoin d’une réponse médicale, surtout en cette période de triple épidémie. C’est donc difficile de s’associer à ce mouvement. Pour autant, sur le fond, la fédération SOS médecins France soutient cette mobilisation qui dénonce l'état de déliquescence de l’organisation des soins."
Cette période de l’année est habituellement connue pour ses épidémies hivernales et ses appels plus nombreux. "Mais cette année nous sommes vraiment sous tension", rétorque Claire Bouny. Une saturation constatée par les patients qui peinent à avoir un modérateur. " On a appelé plusieurs fois sans avoir de réponse. Au bout de 25 minutes, nous avons réussi à avoir un rendez-vous", raconte l’un d’eux dans la salle d’attente. Pour une autre patiente, c’est 45 minutes qu’il aura fallu patienter dès 7h ce matin, pour avoir un créneau pour une consultation à midi.
"Tout le monde crie au secours"
Pour Gérard Bauer, médecin à SOS, la triple épidémie joue un rôle dans cette saturation, mais pas seulement. Il s’agit surtout de la mauvaise gestion du système de soins de ces dernières années. "Aujourd’hui, c’est la continuité de ce que l’on vit depuis plusieurs années. Chaque année c’est pire, tout simplement. Chaque année on aggrave la situation des urgences, on voit que le nombre de patients augmente, que le nombre de personnes sans médecin augmente. Je pense que l’année prochaine ne sera pas beaucoup mieux. Et nous allons vivre ça durant les années à venir puisque la pénurie de médecins va s’aggraver et celle des urgences aussi. Tout le monde crie au secours."
Aujourd’hui, c’est la continuité de ce que l’on vit depuis plusieurs années. Chaque année c’est pire
Gérard Bauer, médecin à SOS médecin
Si le nombre d’épidémies n’augmente pas de manière "explosive", cela a des répercussions non-négligeables sur un système de soins déjà mal en point. "La triple épidémie ne fait que montrer que le système de santé va mal. On a peut-être augmenté de 20-30% les cas de maladies hivernales, ce qui paraît ridicule. Mais sur des hôpitaux déjà saturés et des médecins qui n’arrivent plus à assumer, c’est énorme", souligne-t-il.
Le Dr Bauer voit en moyenne 40 à 50 patients par jour, entre visites à domicile qui sont majoritaires et consultations. Des journées bien chargées, qui commencent à 6h du matin et prennent fin à minuit. "C’est moins qu’une activité de ville, où les médecins font beaucoup de consultations et moins de visites. Mais la visite est une activité dominante de SOS médecins, ce qui dure plus longtemps qu’une consultation en cabinet", souligne le médecin généraliste.
La visite à domicile comme solution ?
Si les visites à domicile restent l’activité dominante de SOS médecins, du fait de la surcharge de travail et du nombre d’appels, l’association est obligée de proposer des créneaux de consultations, pour répondre aux demandes et aux besoins de soins.
Pour Claire Bouny et Gérard Bauer, une solution existe. "Il y a une réelle nécessité de refonte du système ville/hôpital pour une meilleure prise en charge des besoins en soins. Et cela passe évidemment par un repositionnement de la visite à domicile avec sa revalorisation", explique la directrice de la structure. Une idée que le médecin généraliste partage : "une autre organisation en ville, si elle était possible un jour, avec plus de médecins et qui reprennent la visite à domicile, serait un très bon moyen de pallier toutes ces carences."
Le manque de médecins des années à venir ne va pas arranger la situation, d’après le Dr Bauer, et ce qui se passe actuellement n’est qu’un aperçu des années à venir. "On se demande où on va. On sait que le nombre de médecins va diminuer encore pendant pas mal d’années et qu’ils n’auront plus le temps de faire des visites à domicile, et que l’accès aux soins va diminuer lui aussi."
(Avec Sarah Marty)