Aujourd’hui, les stars du web ne sont plus acteurs, chanteurs ou sportifs mais influenceurs. Sur Instagram ou TikTok, ces créateurs de contenus racontent leur vie à des millions d'internautes. Le métier se professionnalise, d'ailleurs une loi vise à encadrer leur activité. Voici les coulisses pour deux d'entre eux, installés à Toulouse : mayatheblondbee et Clément Lazuech.
D'Instagram à Facebook en passant par TikTok, les influenceurs sont devenus au fil des années, les nouvelles stars des réseaux sociaux. 94 % des 15-17 ans les suivent et 82 % chez les 25-34 ans, selon une étude de Toluna publiée en mars 2022.
Mais qui sont-ils ? Quel est leur quotidien ? Pourquoi séduisent-ils les marques ? Exemple à Toulouse dans l'une des capitales de l'influence en France.
On devient influenceur peu à peu
Au départ, l'influenceur est un autodidacte qui partage sur les réseaux sociaux, sa passion, ses coups de cœur, son quotidien... En fonction de sa personnalité et de sa créativité, les internautes commencent alors à commenter et à s'abonner. Une popularité virtuelle qui peut finalement attirer les marques.
Personne qui, en raison de sa popularité et de son expertise dans un domaine donné (mode, par exemple), est capable d’influencer les pratiques de consommation des internautes par les idées qu’elle diffuse sur un blog ou tout autre support interactif (forum, réseau social, etc.)
Larousse
"Je n’ai pas choisi d’être influenceur mais je le suis devenu" raconte Clément Lazuech, un influenceur toulousain depuis 2016.
A 31 ans, ce créateur de contenu aguerri est spécialisé dans le life style, le tourisme et la gastronomie. Il est suivi par 196 000 abonnés sur Instagram.
"Au début, je me suis mis à raconter mes voyages, ma vie de mannequin, ma ville à Toulouse,... les gens ont suivi puis les marques sont arrivées" raconte-t-il.
Même trajectoire pour Maëliss, alias "mayatheblondbee" sur TikTok. Cette jeune toulousaine de 23 ans est tombée dans la marmite de l'influence malgré elle.
En octobre 2022, elle se lance sur les réseaux sociaux pour parler d'entrepreneuriat féminin et partager ses adresses pour sortir en ville. Au départ, c'est seulement un plaisir et un moyen de se faire connaître professionnellement.
Aujourd'hui, je pense que les réseaux sociaux sont vraiment un moyen et un outil utile pour pouvoir se lancer et réaliser des projets. En tout cas plus rapidement.
Maëliss ("Mayatheblondbee")influenceuse à Toulouse
Rapidement, ses vidéos sur TikTok vont l'orienter vers le métier d'influenceuse. Avec 12 000 fans, Maëliss multiplie les contacts avec les librairies, restaurants et pâtisseries.
Donation, partenariat... comment l'influenceur travaille ?
Dans le jargon de la publicité, on parle de marketing d'influence. En effet, les consommateurs ont besoin d'affect pour acheter. Et les marques l'ont bien compris.
"C'est un ensemble d'individus qui se retrouvent derrière ce leader d'opinion dans une démarche d'affectivité. C'est cette affectivité qui va abaisser les barrières et permettre de glisser vers l'acte de l'achat" explique Christophe Alcantara, universitaire à Toulouse 1, spécialisé dans la communication digitale.
Concrètement, comment se passe un partenariat entre une marque et un influenceur ?
Il existe deux types de transactions : la donation et la rémunération.
La première consiste à offrir un vêtement, un appareil, une pâtisserie à l'influenceur. Ce dernier le teste et en parle sur les réseaux sociaux si l'envie lui prend. En effet, le dernier mot revient toujours au créateur de contenu qui choisit en fonction de ses valeurs.
"L'idée, c'est vraiment de mettre en avant les produits et les choses qui peuvent se différencier de ce qu'on peut voir en général dans les pâtisseries ou ailleurs" précise Maëliss.
La seconde est un contrat plus classique. Le créateur de contenu signe un partenariat commercial qui l'oblige à faire la promotion d'un produit. En fonction de la popularité de l'influenceur, le montant varie de quelques centaines d'euros à plusieurs milliers.
Pour les influenceurs à succès, les demandes de collaborations sont quotidiennes. "Une dizaine par jour" assure Clément Lazuech. Mais les débuts n'ont pas toujours été faciles, rappelle-t-il. "Il y a 7 ans, les gens n'y croyaient pas".
Côté entreprise, le marketing d'influence semble avoir un vrai impact sur les ventes.
Notre nom n'était pas connu. Notre concept également. Maëliss est passée sans que je ne la connaisse et a fait une vidéo sur TikTok. De 16 New-York roll que je vendais par jour, j'en vends 100 la semaine et 250 le samedi. Cela a tout changé !
Gérante d'Ek Patisserie à Toulouse
7 jours sur 7 et sans quitter son portable
Gagner sa vie en dégustant une pâtisserie ou en portant une veste en cuir. Ça fait rêver à condition de ne pas compter ses heures.
Entre le montage vidéo, les commentaires des abonnés, les demandes de collaboration, les insultes sur les réseaux sociaux tout en conservant sa réputation virtuelle... la vie quotidienne d'un influenceur est loin d'être un long fleuve tranquille.
C'est un travail non-stop. Au final, on est toujours accroché au téléphone. C'est 7 jours sur 7. C'est un métier super sympa mais mentalement, ça use.
Clément Lazuechinfluenceur
L'autre difficulté pour un influenceur est d'exposer (partiellement) sa vie privée afin de créer du lien avec sa communauté.
Après 7 ans de métier, Clément Lazuech assume ce voyeurisme mais dans une certaine mesure. "On montre ce qu'on le souhaite. Heureusement car on n'est pas une téléréalité. On aime partager et on montre des petits moments de vie sans en faire trop".
De la créativité pour durer
Ce métier demande également de se démarquer constamment. Surtout que la France totalise 150 000 influenceurs selon le ministère de l'économie.
"Beaucoup de jeunes cherchent à faire le buzz" constate Clément Lazuech. Pour le Toulousain, la solution est de miser sur la "créativité pour durer".
Chaque créateur de contenu a ses astuces mais ils sont de plus en plus nombreux à faire appel à des agences audiovisuelles.
"Il y a de plus en plus d'influenceurs et de concurrence. Pour se démarquer, ils font appel à des photographes et à des vidéastes" raconte Greg, fondateur de la Fabrique visuelle qui s'occupe de Clément Lazuech.
L'influenceur devient ainsi un métier à part entière avec ses avantages, ses contraintes mais aussi ses abus.
Le mélange de genre de certains influenceurs peut piéger les internautes. C'est pourquoi, le Gouvernement français veut encadrer le secteur en créant un statut "activité d’influence commerciale" dans le code de la consommation.
Une régulation qui inquiète des influenceurs. Ce dimanche 26 mars, 150 d'entre eux ont publié une tribune dans le Journal du Dimanche. Parmi les signataires, les Toulousains Djilsi et Léa Camilleri.
Un métier passion : "Chaque jour je me lève avec le sourire"
Malgré les contraintes, Maëliss aime son activité. Elle offre "une liberté de mon emploi du temps" mais surtout "une créativité illimitée et une diversité de mes tâches quotidiennes grâce aux partenariats très différents". Même analyse pour Clément Lazuech.
Chaque jour est une nouvelle journée pleine d'opportunités. On va découvrir de nouveaux endroits, tester des produits, créer des souvenirs, rencontrer du monde, des gens passionnés par leur travail. Chaque jour je me lève avec le sourire et j'y ajoute ma créativité en photo et vidéo.
Clément Lazuech
Finalement, l'influenceur est devenu au fil des années un véritable métier qui exige des compétences de communication, d'entrepreneuriat et aussi artistiques.