Le musée Paul Dupuy a ouvert ses portes au public après 3 ans de fermeture à Toulouse. Rebaptisé "Musée des Arts Précieux" il propose plusieurs collections riches et étonnantes comme celle d'horlogerie ancienne. Une large place est également faîte aux objets précurseurs du cinéma. Amoureux des belles choses et des curiosités, une visite s'impose.
Dans ce musée, il faut accepter de se perdre et de laisser surprendre. Le lieu est superbe, dans un ancien hôtel particulier toulousain du XIIe siècle. En sous-sol dans de belles caves voutées, au rez-de-chaussée ou dans les étages, plus de 150 000 objets et œuvres se sont nichés avec une nouvelle scénographie.
Situé dans le quartier historique des Carmes, rebaptisé "Musée des Arts Précieux" on y retrouve les arts décoratifs, les arts graphiques, mais aussi un fonds inédit et important consacré au cinéma.
Les prémices du cinéma
Parmi les nombreuses collections, celle dédiée au 7e art jamais ouverte encore au public. L’essentiel du fonds cinéma et pré-cinéma provient de la collection de Jean Rouzaud acquise en 1985. 38 objets ont ainsi été restaurés pour se dévoiler au public. Sous des appellations aux noms peu habituels tels que "praxinoscope", "zootrope" ou "mutoscope", ils racontent l'histoire du cinéma, depuis les premières récréations optiques du XIXe siècle jusqu’aux appareils de projection des premières décennies du XXe siècle.
2 salles sont désormais consacrées à ces objets, en partenariat avec la cinémathèque de Toulouse. La première est réservée aux procédés d'optique permettant de faire du relief et de l'animation. On retrouve ainsi le "graphoscope" (ancêtre de la 3 D), les lanternes vraiment magiques ou le "mutoscope" inventé avant le cinématographe des frères Lumières. "On l'appelle mutoscope ou kinora, déclare Francis Saint-Genez, conservateur et directeur du musée. C'est un objet anglais avec le même principe que les "flip book" (NDR : livret de dessins ou de photographies que l'on feuillette très rapidement pour animer l'image). Le procédé est placé à l'intérieur de cette caisse, avec des verres grossissants. On pouvait regarder ce spectacle à 3. On le retrouvait dans les foires, les lieux de passage, les gares. C'est un très bel objet. Il y a eu à l'époque plusieurs procédés pour mettre en mouvement l'image."
Figurent aussi de nombreuses affiches, une table d'optique qui aurait appartenu aux frères Lumière, les premiers films d'épouvante et de fantasmagorie... plus de 2 000 objets pour ravir les curieux et les passionnés.
Le temps se précise
Le joyau du musée reste cette collection d'horlogerie ancienne pour mesurer le temps en beautés. Des objets qui permettent aussi de témoigner sur leur époque. Des horloges de la Renaissance avec une seule aiguille, aux pendules plus précises avec 2 aiguilles apparues vers 1750 puis une 3e pour les secondes, ces horloges de table, montre à gousset et autres pendules qui ornaient aussi les édifices publics sont toutes plus belles les unes que les autres. Ce "cabinet du temps" provient pour la plupart des pièces d'une donation d'Edouard Gélis, un collectionneur toulousain né au 19e siècle.
Il y a même une horloge qui servait de référent horaire au 19e siècle pour la France entière, mise sous terre pour éviter le plus possible les variations et les décalages.
Le choix de Francis Saint-Genez se porte sur une sculpture horloge que l'on doit à Paul Landowski, l'auteur du Christ en majesté sur la baie de Rio.
"C'est une pièce unique, le premier tirage en bronze. C'est une allégorie du temps qui passe, le dieu Chronos qui dévore ses enfants. On a coulé le bronze en 1907. L'oeuvre a été acheté par un collectionneur parisien à l'artiste peu avant sa mort. Elle n'est jamais sortie de sa maison avant que le musée ne l'achète lors d'une vente publique en 2020."
Cabinets de curiosités
Fermé pendant 3 ans mais ouvert temporairement lors d'une parenthèse en fin d'année dernière, les importants travaux de rénovation du musée ont coûté 1,5M €. Musée des arts décoratifs et des arts graphiques au départ, c'est d'abord le travail de son fondateur Paul Dupuy. Ce collectionneur toulousain n'a jamais habité l'hôtel Besson mais il a entrepris de réhabiliter ce lieu en 1909 pour y mettre ses nombreuses collections.
A la fin de sa vie, il fait un leg à l'Etat de son immense fonds qui le rétrocède à la ville de Toulouse. C'est un musée municipal depuis 1949.
D'étages en étages, de pièces en pièces, on retrouve des faïences locales de Matrtres-Tolosane, des porcelaines de Valentine et... une assiette de Picasso.
Des curiosités, des préciosités qu'il faut dénicher. Des reliquaires, la pharmacie des jésuites, des robes de grands couturiers (Castelbajac, Popy Moreni..), des instruments de musique comme la "serinette" (ancêtre de l'orgue de barbarie) ou une "boha" (cornemuse) très ancienne. Très émouvantes aussi, ces cuillères sculptées par les poilus dans les tranchées.
Une bonne idée de sortie pour ce week-end pluvieux. Un musée riche d'arts précieux souvent modestes ou chaque objet a une histoire à raconter.