Ebru Firat nous a accordé une interview après sa libération. La Toulousaine d'origine Kurde avait été emprisonnée en 2016 en Turquie pour suspicion d'appartenance à un groupe terroriste Kurde. Ce qu'elle souhaitait : combattre Daesh.
Elle est née à Moissac, dans le Tarn-et-Garonne, en 1991. Ebru Firat grandit à Toulouse, ses parents sont kurdes. En 2009, elle décide de partir pour lutter contre l'état islamique, aux côtés de combattants kurdes. En 2016, alors qu'elle se trouve dans un aéroport turc pour rentrer à Toulouse, elle se fait arrêter. Accusée d'appartenir au PKK : Parti des travailleurs du Kurdistan, considéré par la Turquie comme une groupe terroriste, Ebru Firat écope d'une peine de 8 ans de prison. Peine qui retombe à 5 ans, après un procès en appel. La Toulousaine est finalement sortie de prison ce vendredi 10 juin, après 2 ans et 9 mois d'incarcération à Istanbul. Elle s'est confiée à France 3 Occitanie. France 3 : comment s'est passée votre libération ?
Ebru Firat : Je devais sortir le 6 juin mais c'était la fête de l'Aïd ici, et les vacances. Je suis donc sortie le 10 juin de la prison fermée (droit d'appeler dix minutes par jour, ndlr) de Bakirkoy, à Istanbul. Après 30 heures de libération, j'ai dû aller dans une autre prison, demi-ouverte (droit d'appeller jusqu'à minuit, ndlr), dans la ville d'Eskisehir. Je suis maintenant sous contrôle judiciaire pendant un an : je dois aller signer au commissariat de ma ville deux fois par semaine. Je suis sortie plus tôt de prison, pour bonne conduite.
Je suis sortie plus tôt de prison, pour bonne conduite.
Comment vous sentez-vous ?
Je me sens soulagée d'abord. Mais c'est bizarre d'être dehors. Il faut que je m'adapte. Il va falloir du temps. Après 3 ans de prison, c'est bizarre. 2 ans et 9 mois en fait, 33 mois en tout.
Il va falloir du temps.
Quelles étaient vos conditions de détention ?
C'était dur de vivre en prison. Ce n'était pas des bonnes conditions mais à Istanbul il y a beaucoup de députés et de journalistes qui viennent visiter la prison. Donc les conditions étaient meilleures que dans d'autres prisons. Je dormais dans une cellule de 8 mètres carrés, seule. Une fois par semaine j'avais le droit de téléphoner pendant dix minutes. J'avais le droit à une visite de 35 minutes par mois dans une salle fermée et une visite au parloir, une fois par semaine. Je sortais 3 heures par jour dans la cour : 1h30 le matin et 1h30 l'après-midi. Je passais donc 21 heures dans ma cellule, enfermée.
Vous êtes-vous sentie soutenue ?Je passais donc 21 heures dans ma cellule, enfermée.
J'ai reçu le soutien de personnes en France. Depuis deux, trois jours je reçois beaucoup de coups de téléphone. J'ai le soutien de mes deux avocates aussi. Mais la France et l'Etat n'ont rien fait, pour que je puisse venir en prison en France par exemple. J'ai écrit à François Hollande, puis à Emmanuel Macron mais ils ne m'ont jamais répondu. Heureusement que j'ai senti la force de quelques Français avec moi.
Actuellement, où vivez-vous ?J'ai écrit à François Hollande, puis à Emmanuel Macron mais ils ne m'ont jamais répondu.
J'habite à Diyarbakir avec ma mère et mes trois frères. Ils étaient venus ici quelques temps avant mon emprisonnement, il y a 4 ans, et sont restés pour moi. J'ai un autre frère et mon père à Toulouse.
Pensez-vous revenir à Toulouse ?
Je voudrais revenir en France dans un an, à la fin de mon contrôle judiciaire. Mais je ne sais pas encore si je vais aller à Toulouse, ou ailleurs, je n'ai pas encore décidé.
Comprenez-vous pourquoi vous avez été emprisonnée ?
J'ai été accusée de faire partie des travailleurs du Kurdistan et des combattants de Daesh. Quelqu'un les a appelé, et a donné mon nom. J'ai été accusée de terrorisme, alors que je combats les terroristes. J'ai trouvé ça tragi-comique. Un mot de fin ?
Rien ne remplace la liberté. Profitez de chaque instant.