Toulouse : 4 informations à connaître pour comprendre la nouvelle mobilisation contre le projet de réforme de la police judiciaire

Les policiers se mobilisent à nouveau devant le commissariat de Toulouse (Haute-Garonne), lundi 6 février 2023 contre le projet de réforme de la police judiciaire. Deux rapports, publiés au début du mois, rendent des conclusions divergentes.

La réforme des retraites n'est pas la seule à créer du mécontentement en ce début d'année 2023. Celle de la police judiciaire, lancée par Gérald Darmanin, continue à provoquer le rejet des membres des forces de l'ordre. À Toulouse (Haute-Garonne), une nouvelle mobilisation, à l'appel de l'association nationale de police judiciaire, a lieu devant le commissariat central afin de dire "non" à ce projet. Au total, plus de 1100 agents se sont rassemblés spontanément à midi devant leur service, dans 20 villes de métropole et d’Outre Mer. Un grand rassemblement national, intersyndical et interprofessionnel est d'ores et déjà annoncé pour le 11 mars 2023 à 14h00 à Paris. Voici les informations nécessaires pour bien comprendre ce dossier.

La réforme 

Le projet de réforme porté par le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin prévoit la création d'un directeur départemental de la police, qui coifferait tous les services de la police (sûreté départementale, PJ, police aux frontières), alors que la PJ est actuellement organisée en grandes zones géographiques. 
Le gouvernement souhaite créer une filière investigation qui rassemble les effectifs de la PJ et ceux de la sécurité publique, présents dans les commissariats, en charge de la délinquance du quotidien.

La filière investigation serait sous l'autorité d'un directeur départemental de la police nationale, devenant un interlocuteur unique avec pour responsable hiérarchique le préfet.
La réorganisation est expérimentée depuis 2020 dans les territoires d'outre-mer, et dans trois autres départements de métropole depuis quelques mois. 

Le rapport des inspections

Le 1er février 2023, la mission inter-inspections (IGAIGJIGPN) a rendu ses conclusions sur "les résultats de la mise en place des directions territoriales de la police nationale (DTPN) en outre-mer et l’expérimentation de la réforme de la police menée dans huit départements métropolitains." Selon ce rapport, la création des DTPN ultramarines "a produit des effets positifs et incontestés". "La réforme a engendré une plus grande lisibilité de l’action de la police, la multiplication d’opérations coordonnées interservices, un meilleur partage des moyens et effectifs, une plus grande circulation."

Pour les huit départements expérimentateurs en métropole, le "bilan est à conforter" du fait  "de la brièveté des expérimentations en raison des mouvements de contestation qui ont secoué la police judiciaire (PJ) à l’automne". Mais les inspections estiment que des effets positifs sont malgré tout mesurés avec "notamment d’une plus forte présence de la police aux frontières (PAF) et d’un meilleur traitement administratif des étrangers en situation irrégulière."

Le rapport du Sénat


Le 2 février 2023, un rapport du Sénat portant également sur les directions territoriales de la police nationale (DTPN), est publié, mais avec des conclusions bien différentes de celles de la mission inter-inspections. L'avis de son rapporteur, le sénateur LR Philippe Dominati, est sans appel : "écueil structurel", "anachronique", "inadapté".


Selon ce rapport de 105 pages, le risque serait d'appauvrir la police judiciaire pour renforcer la police en tenue, celle des commissariats, noyée dans la délinquance de masse. «Est-ce vraiment la vocation de la PJ, police des affaires les plus graves, souvent de dimension internationale, que de jouer les supplétifs dans un champ aussi restreint que celui du département ?», interroge le sénateur Dominati.

Le rapport sénatorial rappelle que la PJ est une police d'excellence, qui obtient des "résultats probants". Son "taux d'élucidation des affaires varie ainsi de 74% pour les contrefaçons à 95% pour les affaires de trafic de stupéfiants. Ces taux sont notablement plus élevés que les taux moyens d'élucidation des différents services de la police nationale".

La position de l'association nationale de police judiciaire

Face à cette réforme, des policiers ont créé l'association nationale de police judiciaire (ANPJ), hors cadre syndical. Ce collectif est au cœur de la fronde contre le projet du ministère de l'Intérieur. Dans un communiqué, daté du 3 février 2023, l'ANPJ "conteste leur interprétation partiale du rapport d’évaluation des inspections de l’Administration, de la Justice et de la Police Nationale. Il est, en effet, trompeur de le résumer au fait que «la création des DTPN et DDPN n’a produit que des effets positifs et incontestés» au regard des nombreuses réserves émises dans cet audit."

Selon l'association, "il ressort ainsi de cet audit que l’expérimentation menée dans les départements tests en métropole est incomplète, mal acceptée, et d’une portée limitée puisqu’effectuée à droit constant, sans cadrage initial et qu’elle a été focalisée sur le pilotage des services et non leur réelle efficience." En outre-mer, "les résultats en apparence plus concluants dans les départements d'outre-mer sont tempérés par les inspections qui soulignent une «acceptabilité de la réforme largement perfectible.»

Les enquêteurs refusent toujours de subir une réforme qui se préoccupe plus du positionnement des hautes instances policières que de leur réalité quotidienne. Pour l'ANPJ, "cette réforme, qui n’emporte pas l’adhésion de celles et ceux qui en sont les principaux acteurs, est d’ores et déjà vouée à l’échec."

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