Toulouse : la Galerie du Château d'Eau dédiée à la photographie va rouvrir au public après de vives tensions

Après des mois de fermeture, la Galerie du Château d'Eau, créée par le photographe Jean Dieuzaide, va rouvrir ses portes au public le 29 janvier. Sur les 9 permanents, 6 restent et la mairie reprend les rênes sans faire l'unanimité. 

Le conflit date de plus d'un an. L'association PACE (la Photographie Au Château d'Eau), gestionnaire de la Galerie du Château d’Eau, s'est opposée à la mairie de Toulouse, propriétaire des murs. Bien que mandatée par la ville, elle souhaitait préserver son indépendance et pérenniser la ligne artistique impulsée à sa création.

Ce lieu d'exposition emblématique, fondé par le photographe Jean Dieuzaide, a été fermé plusieurs mois à titre provisoire, le temps de changer de gestionnaire et de modifier le statut des salariés.



La galerie est désormais gérée par une régie municipale. Depuis le 1er janvier, le pôle photographique dépend de la direction des musées de la ville de Toulouse. 

Promesse de renouveau

"L'association a eu des problèmes de gestion, maheureusement pour elle", explique Francis Grass, adjoint au maire en charge de la culture qui a donc repris la gestion du site au 1er janvier. "Nous voulons un renouveau pour ce site qui, alors que sa fréquentation et son renom étaient en baisse, doit redevenir le lieu central de la photographie à Toulouse". 

Le président de PACE, Denis Rouillard, développe un tout autre point de vue : "face à ses besoins de réduction budgétaire de 25% durant les 5 dernières années concernant les associations, la mairie de Toulouse, même si elle en avait le droit, a fait le choix de ne pas soutenir son "phare de la photographie" en accentuant les baisses de subventions par des augmentations parallèles de charges".

Un manque de soutien ? 

Pour lui, l'étiquette "Galerie Municipale" du Château d'Eau a pénalisé le lieu et l'a empêché d'obtenir des subventions régionales, voire nationales. Malgré des ajustements de gestion, comme la diminution d'effectifs, l'association s'est retrouvée en cessation de paiement fin octobre 2019.

"Durant la même période la mairie a soutenu l'activité, voire la naissance d'autres petites structures dédiées à la photographie de type festivalières, sur la scène toulousaine" note Denis Rouillard.

Pour Francis Grass, c'est l'inverse qui s'est produit : la mairie a proposé de racheter des biens à PACE pour lui éviter une saisie administrative et judiciaire. "Mais ils n'ont pas accepté, constate l'adjoint au maire. On nous a accusé de vouloir faire main basse sur le fonds photographique, mais il n'en est rien. Ils ont un certain nombre de collections qui ne nous intéressent pas forcément, même si on est prêt à les héberger".

"Pas question d'en faire un musée" 

Pas question non plus de faire du Château d'Eau un musée, comme on a pu l'entendre. "Nous l'avons rattaché à la direction des musées car c'est là qu'on a des compétences pour les expositions. Mais dans les faits, rien ne change. Le Château d'Eau garde sa vocation. Il reste dédié à la photographie contemporaine, à l'accueil de photographes et d'expos de photographies ! On veut aussi l'ouvrir à de grands festivals alors que l'assocation était jusque-là fermée à ça", explique l'adjoint au maire.

Pour Denis Rouillard, d'autres enjeux existent. Il explique que la demande de mesure de sauvegarde auprès du tribunal était un choix pour protéger l'association, ses salariés et son patrimoine. "Cette procédure permet en particulier de cadrer juridiquement le transfert des salariés en cas d'irrégularité et aussi de bien borner la protection des actifs de l'association : à qui appartiennent les collections ? Combien valent-elles ? Peut-on faire autre chose que les vendre pour sortir de cette situation ?"

Concordance des temps

"Or, explique-t-il, la décision du maire de passer le Château d'Eau en régie municipale s'est effectivement accompagnée d'une démarche visant à racheter la collection du centre documentaire pour le montant des besoins financiers de PACE. Il s'agissait d'"une proposition à 100.000€ , ce qui était insuffisant d'une part et juridiquement dangereux d'autre part".

Les tensions, on l'a compris, ont été vives, d'autant que des salariés comme Thérèse Pique n'ont pas accepté la manière dont le changement de statut et de gestionnaire, a été orchestré. "Ce qui a été déterminant pour moi, c'est la façon dont ça s'est passé, le mépris", affirme-t-elle. Elle s'en est ouvert sur Facebook.

"Quand je suis en face de personnes des ressources humaines qui me disent : comment vous avez pu accepter avec toutes vos qualifications et vos compétences de travailler pour le Château d'Eau dans ces conditions et qu'on me propose un salaire inférieur à celui que j'ai perçu jusque-là ! ".

La salariée a décidé de ne pas reconduire son contrat avec la mairie et parle d'un manque d'intérêt, d'anticipation et de respect pour le travail mené jusque-là. 

La mairie s'était engagée à reprendre les 9 salariés à plein temps sur les 12. "Parmi eux, l'un part à la retraite, 2 ont préféré partir et 6 ont choisi de rester et ça se passe très bien" affirme Francis Grass. "On veut sortir du climat polémique et tendu. Aujourd'hui, l'équipe se met en place dans une atmosphère apaisée, c'est ça qui est important".
 

L'esprit du lieu

De son côté, le président de l'association se dit ouvert, disponible et prêt à discuter... malgré ses inquiétudes. "Ce qui se passe là est synchrone avec le projet de transformation du lieu pour accueillir les collections professionnelles de Jean Dieuzaide achetées 450.000€ par la mairie à la famille, plus les droits d'auteur".

"L'association était d'accord pour travailler sur ce projet, mais n'a pas été sollicitée, ajoute-t-il. Ce qui est fort dommage à la vue des compétences existantes dans le personnel et les membres de PACE. Que restera-t-il de l'esprit du lieu, du projet de Jean ?", s'interroge-t-il. 
 

Nouveau départ ? 

Lors d'une assemblée générale extraordinaire en décembre, précise le président de PACE, l'association a voté à l'unanimité le fait de tout faire pour garder l'unicité et l'intégrité de ses collections à Toulouse, si possible au Château d'Eau, dans la mesure où les conditions de conservation le permettent.

La mairie, de son côté, organise un point presse le 28 janvier durant lequel elle exposera son projet pour le lieu et les travaux de rénovation et d'agrandissement qu'elle compte mettre en oeuvre. La réouverture au public sera effective le 29 janvier.
 
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