Plusieurs syndicats du centre hospitalier universitaire de Toulouse dénoncent une attitude équivoque de la part de la direction à l'encontre d'un salarié poursuivi pour harcèlement sexuel envers une collègue. Des faits qui ont valu au CHU une condamnation pour non-protection de cette dernière.
C'est la présentation d'un organigramme qui a mis le feu aux poudres.
Jeudi 6 mai, lors d'un conseil technique d'établissement (CTE), la direction du CHU (centre hospitalier universitaire) de Toulouse présente aux organisations syndicales un nouvel organigramme du pôle Patrimoine Immobilier Services Techniques. Les représentants du personnel contastent alors qu'un salarié, par ailleurs poursuivi pour des faits de harcèlement sexuel envers une collègue il y a quelques années, y occupe une nouvelle place, plus haut dans la hiérarchie qu'auparavant, selon les syndicats.
Ces derniers s'en émeuvent en séance, laquelle tourne court, la direction décidant de la suspendre, après des échanges plus que vifs.
L'affaire est-elle sensible au CHU de Toulouse ? Elle remonte à plusieurs années. Une agente administrative du pôle ressources matérielles de l'hôpital dit subir et dénonce des faits de harcèlement sexuel de la part d'un de ses responsables. Nombreux mails déplacés, baisers forcés, frôlements suggestifs : des comportements abusifs qui sont portés à la connaissance de la hiérarchie, sans changement notable.
Le CHU condamné pour non-protection d'une salariée
La victime saisit alors la justice. Et en décembre 2020, le tribunal administratif de Toulouse condamne le CHU de Toulouse à verser une indemnité à la salariée pour ne pas l'avoir protégée. S'appuyant notamment sur un rapport d'expertise de 2019 qui mentionne "des pratiques professionnelles et managériales se plaçant sur un registre sexuel, allant de la familiarité appuyée à des commentaires sur les sous-vêtements ou l’aspect physique, et de propos méprisants à des tentatives de poursuivre une relation hors du contexte professionnel".
Selon l'intersyndicale, le salarié incriminé aurait seulement fait l'objet d'un blâme pour "utilisation abusive de sa messagerie professionnelle".
Promotion ?
Quelques mois plus tard, ce même salarié a-t-il été effectivement promu, comme le dénoncent les organisations syndicales, en l'occurrence Sud, la CGT et FO ?
Sur ce point, la direction du centre hospitalier de Toulouse a tenu à répondre rapidement. "Aucune promotion, aucune augmentation de salaire", assure Anne-Laure Navarre, directrice de cabinet de l'hôpital. "Le salarié n'a aucune mission d'encadrement, seulement des missions d'expertise technique, en l'occurrence la gestion de la sécurité thermique des blocs".
Les syndicats affirment pourtant que la mention de directeur adjoint du pôle thermique du pôle PISTE (pour Patrimoine Immobilier Services Techniques) figure sur le nouvel organigramme. Nouveau démenti du CHU.
Il n'est pas positionné dans l'encadrement, il y a un nouveau responsable de poste. L'organisation est sécurisée.
Les représentants du personnel dénonçaient également le fait que ce salarié aurait été présenté comme "vital pour l'entreprise". Le CHU réfute ces allégations : c'est la mission qui est vitale, assure Anne-Laure Navarre.
La directrice de cabinet du CHU explique en outre que les faits remontent à plusieurs années, que le salarié a été "déplacé" de Purpan à Rangueil, et que depuis, aucun fait similaire n'a été porté à la connaissance de la direction. Elle ajoute que si l'ingénieur en question n'a pas été rétrogradé à l'époque, c'est parce qu'une organisation syndicale s'y est opposé lors du conseil disciplinaire qui est effectivement paritaire.
"Positions de façade"
Pourquoi dans ce cas le dialogue social a-t-il été aussi houleux, hier ? A l'issue du conseil technique d'établissement interrompu, les organisations syndicales ont tenté de rencontrer le directeur. Un huissier a été dépêché pour constater l'occupation "gênante" des lieux, selon la directrice de cabinet qui assure qu'il n'y a pas de "volonté de ne pas dialoguer".
Mais l'intersyndicale demande des excuses et conclut dans son communiqué : "A l’heure où les violences faites aux femmes sont largement dénoncées, y compris par notre institution, nous en avons plus qu’assez de ces positions de façade qui ne sont jamais suivies d’actes. Ce à quoi nous avons assisté aujourd’hui est d’une gravité extrême".