Des propriétaires en Haute-Garonne remportent une victoire judiciaire inattendue contre l'État français à la suite de l'invasion d'une colonie de chauves-souris pygmées dans leur maison. Cette décision de justice, rendue le 27 octobre 2023, condamne l'État à verser une indemnisation substantielle de 95 768,46 euros.
Cette histoire et la décision de justice qui en découle peut surprendre. Les propriétaires d'une maison située en Haute-Garonne ont remporté, le 27 octobre 2023, une victoire juridique au détriment de l'Etat français. Ce dernier a été condamné à verser au couple une indemnisation substantielle de 95 768,46 euros, en raison de l'invasion d'une colonie de chauves-souris pygmées dans leur propriété venue s'y reproduire.
Prolifération d'animaux sauvages protégés et responsabilité sans faute de l'État - Commentaire sous le jugement du TA Toulouse, 27 octobre 2023, no 2103831 - Glaz Avocats https://t.co/SpSvtCVteL
— 🌿S.Le Briéro 🌿 (@s_briero) November 2, 2023
L'affaire remonte à 1987. Les plaignants deviennent propriétaires d'une maison en Haute-Garonne. En mars 2021, ils contactent la préfecture pour demander une réparation. Ils sont envahis par une colonie de chauves-souris pygmées sur leur propriété et tiennent l'Etat pour responsable. Leur demande est rejetée et décident d'amener leur dossier sur le terrain juridique. Ils réclament la somme de 140 768,46 euros pour compenser les préjudices subis par l'installation de cette nurserie de pipistrelles pygmées.
Urine, déjections
Une centaine d’individus s'est installée depuis plusieurs années dans la toiture de leur maison entraînant d'importants dégâts et désagréments. Le plafond de leur habitation est très abîmé a été réparé pour plus de 10 000 euros. A ceci s'ajoute, l'odeur d'urine des chauves-souris qui rendent inutilisable le premier étage de leur logement. Sans parler de la présence de très nombreuses déjections sur les murs et le toit de la maison ou sur leur terrasse, dont ils ne peuvent plus profiter pendant le printemps et l’été.
Pas de chance, il n'existe qu'une dizaine de colonies de mise bas de pipistrelles dans l'ancienne région Midi-Pyrénées. Mais les plaignants estiment l'État fautif. L’administration les aurait induits en erreur. Lors d'une réunion au cours de laquelle diverses solutions pour réduire les nuisances causées par les pipistrelles leur ont été présentées, les services de l'Etat ne les aurait pas informés du fait que les travaux nécessiteraient une dérogation. En ne les informant pas correctement, les particuliers se sont retrouvés exposés à réaliser un chantier sans autorisation, ce qui constitue une infraction pénale.
Animal sauvage protégé
Le tribunal administratif de Toulouse conclut pourtant qu'aucune faute n'a été commise par l'État sur ce point. En revanche, la justice reconnaît la responsabilité de l'Etat dans ce dossier. La pipistrelles pygmées est une espèce protégée.
"Le préjudice résultant de la prolifération des animaux sauvages appartenant à des espèces dont la destruction a été interdite en application des dispositions de cette loi, désormais codifiées à l’article L. 411–1 du code de l’environnement, doit faire l’objet d’une indemnisation par l’État lorsque, excédant les aléas inhérents à l’activité en cause, il revêt un caractère grave et spécial et ne saurait, dès lors, être regardé comme une charge incombant normalement aux intéressés" rappelle le Tribunal administratif de Toulouse.
La liste de préjudices causés par la colonie de ces animaux sauvages protégés est longue. Le plus important est sûrement la dévaluation du prix de la maison. Évalué entre 350 000 et 365 000 euros net vendeur, le bien a perdu entre 20 et 30% de sa valeur depuis l'installation des animaux.
L'Etat, jugé responsable mais sans faute, est donc condamné à verser à M. et Mme C. une somme de 95 768,46 euros.