Vaccinodrome de Toulouse : les “pioupious” se rebiffent… et s'expriment sur les réseaux sociaux

Des étudiants qui travaillent au vaccinodrome dénoncent leurs conditions de travail et des inégalités de traitement. Certains évoquent même des humiliations et une infantilisation. Le CHU de Toulouse reconnaît des dysfonctionnements, mais selon lui, tout serait en passe d'être réglé.

On les appelle les “pioupious ”. Ce sont tous ces étudiants - ils sont près de 3.300 - à travailler par intermittence au vaccindrome de Toulouse, dont 600 quotidiennement. Ouvert le week-end du 27/28 mars sur l’île du Ramier dans l’ancien Parc des expositions, il est devenu au fil du temps le plus grand centre de vaccination de France.

Plusieurs milliers d’injections s’y font tous les jours pour permettre aux Toulousains de se protéger de la covid. Un deuxième hall a même été ouvert pour augmenter la capacité et la cadence.

Depuis la mise en place du vaccinodrome, les responsables du SAMU et du CHU de Toulouse -qui gèrent cette structure- se sont tournés vers les étudiants. Pour eux (ils sont 150.000 à Toulouse), l’occasion d’avoir un job bien payé -12 euros brut de l’heure en semaine, 18 euros brut de l’heure les dimanche et jours fériés- mais aussi de participer à cette bataille contre la pandémie. Après une formation initiale d’une demi-journée, les jeunes sont fin prêts à intégrer des équipes composées exclusivement d’étudiants.

Mais l’idylle a été de courte durée ” écrivent des étudiants dans un courrier adressé à plusieurs médias. Préférant rester anonymes par peur de représailles, ils ont créé un groupe Facebook intitulé “Les Pioupious Désoeuvrés”. Objectif : “briser l’omerta qui règne au vaccinodrome”.

Sur leur page, ils dénoncent “un climat délétère et une situation intenable dans les conditions actuelles d’organisation, un manque de considération et de respect important, entrainant une fragilisation des situations psychologiques et/ou matérielles de nombreux étudiants”. Les mots sont forts, le constat est sans appel à leurs yeux : “la direction du vaccinodrome n’avait absolument pas les capacités pour gérer une telle quantité de personnes, ce qui a donné lieu à une gestion chaotique et des dérapages personnels.

Inégalités de traitement entre étudiants

En cause notamment, des erreurs dans les fiches de paie, mais aussi et surtout la répartition des heures de travail entre étudiants. Faite automatiquement par un logiciel, elle aurait donné lieu a de “nombreuses inégalités” selon les “pioupious désoeuvrés”. Si certaines personnes obtenaient des semaines à plus de 70h, d’autres obtenaient 0 créneaux sur plusieurs semaines d’affilées. Les créneaux restés vacants, ont été mis en ligne à travers une “bourse au poste", où chaque étudiant pouvait postuler.

Ce système a accru la pression sur les étudiants, en compétition direct avec les collègues du vaccinodrome” dénoncent les étudiants.

Les pioupious désœuvrés dénoncent aussi “un traitement humain plus que douteux”. Tweets virulents des responsables du centre, “humiliations et menaces qui étaient monnaie courante ”. A cela s’ajoute une constante infantilisation comme l’explique Lucas (son prénom a été changé), un étudiant toulousain qui travaille au vaccinodrome depuis bientôt deux mois.

A cela s’ajoutent d”autres problèmes. Notamment des propos sexistes d’un pompier à la retraite du SDIS, chef du centre ce jour-là. Le dimanche 27 juin, expliquent les “pioupious désoeuvrés”, lors du brief matinal, devant toutes les équipes, il aurait déclaré : " Les jeunes filles en tenue légère, c’est une tenue inappropriée parce que quand des hommes de mon âge voient des belles plantes comme ça, ça nous donne envie de les arroser “.

Des bugs et des ratés !

Oui il y a eu des bugs, je le reconnais ” répond Vincent Bounes, le patron du SAMU, très impliqué dans la gestion du vaccinodrome de Toulouse. “Je trouve ça dommage que personne ne m’en ai jamais parlé, alors quil est très facile de me contacter, je suis toujours ouvert au dialogue” explique l’urgentiste. Il ne nie pas les problèmes soulevés par ce groupe d’étudiants restés anonymes. “Toutes les erreurs, tous les problèmes sont en train d’être traités et réglés”. Le pompier, auteur de propos sexistes, a quitté ses fonctions de chef de centre. Quant au système de plannification des étudiants, il a été revu afin d'assurer une plus grande équité.

Oui il y a eu des inégalités entre étudiants, c’est un fait. Mais pour moi le problème de fond c’est qu’il n’y a pas assez de personnes qui viennent se faire vacciner, donc les besoins en étudiants sont hélas moins importants que prévu”.

Le vaccinodrome de Toulouse vient en effet de fermer l’un des deux halls mis à disposition pour la vaccination, faute de demande. “On tablait sur 10.000 injections par jour, on en est toujours à 4-5.000 en moyenne. Il y a de moins en moins de primo-injections”. Et par conséquent moins de travail pour les étudiants qui tablaient sur ce job d’été pour gagner de l’argent. Ce qui est le cas de Lucas : “Je me sens floué. Je pensais que j’aurais du travail tout l’été, j’ai moins de 10 heures pour le seul mois de juillet”.

300.000 personnes vaccinées en 3 mois

Tout est fait pour bien accueillir les étudiants : on a mis en place des pauses obligatoires, on a veillé à leurs conditions de travail, ils sont nourris, ils ont un salaire décent ” explique avec un brin d’amertume Vincent Bounes, le patron du SAMU 31.
Moi ce que j’aimerais qu’on retienne, c’est qu’on a vacciné 300.000 personnes en trois mois. Globalement, c’est une vaccinodrome qui fonctionne bien” conclut celui qui vient d’être élu conseiller régional sur la liste de Carole Delga.

Il a décidé de reprendre les choses en main, désormais c’est lui qui sera au coeur de l’interface avec les étudiants. Et de tendre la main aux “pioupious désoeuvrés” : “Je suis prêt à les rencontrer et à les écouter”.

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