Des annonces chez France Travail ou sur des plateformes de recrutement qui peuvent créer la confusion. L'armée française multiplie les canaux pour gonfler ses effectifs. Faut-il y voir les prémices d'un envoi de troupes en Ukraine alors qu'un faux site appelle à s'engager dans ce conflit avec la Russie ? De quoi créer la confusion dans les esprits.
Une alerte à la désinformation a été publiée par le ministère des Armées, ce jeudi 28 mars 2024. L'adresse d'un site intitulé "S'engager en Ukraine" circule actuellement sur le réseau social X, anciennement Twitter. Problème : il reprend la charte graphique des sites gouvernementaux. C'est pourtant un faux.
🚨 #Désinformation. L’URL d’un site « s’engager en Ukraine » qui reprend la charte graphique des sites gouvernementaux circule actuellement sur X. Ce site est un faux site gouvernemental, relayé sur les réseaux sociaux par des comptes malveillants, pour une campagne de… pic.twitter.com/SuVUrocVPk
— Ministère des Armées 🇫🇷 (@Armees_Gouv) March 28, 2024
Dans le même temps, des offres de recrutement, bien officielles, se multiplient sur le site de France Travail. Ainsi, le 26 mars 2024 sont mises en ligne des offres de l'Armée de terre qui cherche à recruter un combattant engins blindés, un chef d'engin blindé à Albi (Tarn). Ces publications qui transitent parfois par des plateformes de recrutement annexes ne créent-elles pas plus de confusion ? D'ailleurs la député LFI, Sophia Chikirou semble avoir été prise au piège.
Qui est prêt à aller sur le front pour 1970 euros bruts par mois ?
— Sophia Chikirou (@chikirouparis) March 27, 2024
Cette offre est publiée dans de nombreux départements. L'État créé des emplois avec la guerre.
Citoyens français : n'allez pas mourir pour des industriels ! Refusez la guerre ! Ne répondez pas ! @SebLecornu pic.twitter.com/QeMDvNn2vq
Nous avons posé la question au chef du bureau armée de terre du Centre d'information et de recrutement des forces armées de Toulouse.
Pôle emploi, un partenaire de recrutement
Le Lieutenant-Colonel Maëlle de Remond du Chelas est chef du bureau Armée de terre au sein du CIRFA de Toulouse. Elle nous confirme que le fait de passer des offres de recrutement via France Travaili n'est pas vraiment une démarche récente. Cela est prévu dans le cadre d'un partenariat entre le ministère des Armées et France Travail.
"Pour la partie Occitanie, nos équipes transmettent régulièrement les offres à pourvoir sur le territoire pour l’ensemble des unités. Au niveau national, entre 600 et 1200 postes sont disponibles chaque mois", nous précise-t-elle.
Comment expliquer que ces annonces transitent ensuite par d'autres plateformes de recrutement ? Le Lieutenant-Colonel Maëlle de Remond du Chelas reconnaît que cela peut être assez déroutant. Il faut en effet passer plusieurs étapes avant de se retrouver sur le site officiel www.sengager.fr.
Le fake de l'Ukraine
Ce jeudi 28 mars 2024, le ministère des Armées a, dans le même temps, dénoncé publiquement la circulation sur les réseaux sociaux de l'adresse d'un faux site de recrutement pour l'Ukraine. "Une manœuvre de désinformation qu'il est important de dénoncer", commente la spécialiste du recrutement de l'Armée de terre du CIRFA de Toulouse.
Concernant ces offres de recrutement de combattant ou chef d'engins blindés publiés récemment, le lieutenant-colonel Maëlle de Remond du Chelas ne fera pas de commentaire sur le fait d'y voir un possible lien avec une préparation d'envoi de troupes en Ukraine. "Les postes de combattants ou chefs d'engins blindés sont une spécificité de l'Armée de terre pour laquelle nous recrutons et formons nous-mêmes nos jeunes engagés", nous précise-t-elle simplement.
Depuis le début de la guerre en Ukraine, des militaires français ont été déployés en Europe de l'Est dans le cadre de missions d'appui de l'OTAN. Les Armées Françaises comptent aujourd'hui plus de 240.000 militaires d’active et de réserve sur tout le territoire national et dans le monde entier.
Fidéliser les militaires
Le 18 mars 2024, le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, a présenté une quarantaine de mesures inscrites dans un plan baptisé "Fidélisation à 360°". Objectif : garder plus longtemps les militaires dans ses rangs alors que les départs à la demande des intéressés ont connu une hausse de 70% depuis 2018. "L’objectif, d'ici à 2027, est de faire progresser la durée moyenne de service d’un an pour les officiers, les sous-officiers et les militaires du rang", a indiqué le ministère des Armées lors de cette présentation.
Ce plan prévoit une rémunération plus attractive, une aide à la mobilité ou encore des parcours professionnels flexibles et évolutifs. De nouveaux engagés, les armées continuent d'en trouver. Mais, entre les missions Sentinelle ou encore la sécurité des JO de Paris, certains peuvent avoir tendance à ne pas s'y retrouver dans leur mission.
Le 22 mars 2024, un ancien parachutiste du régiment de Tarbes dans les Hautes-Pyrénées a comparu devant le tribunal militaire de Bordeaux pour désertion. Il s'était engagé en 2021 dans l'armée, mais, entre comportements indaptés et des missions qui ne correspondent pas à ses attentes, il va rapidement déchanter. "On nous dit beaucoup de nous engager pour partir faire de l'opérationnel, mais certains, en cinq ans, ne sont jamais partis en mission" raconte-t-il.
Des spécialités recherchées
Aujourd’hui, 70% des militaires sont contractuels et 30% sont militaires de carrière, nous indique le lieutenant-colonel Maëlle de Remond du Chelas. Les nouveaux arrivants, "les primo contrats sont généralement des CDD renouvelables. On recrute, puis on forme au métier de militaire, puis à une spécialité", nous explique la responsable de recrutement.
L’Armée de terre propose ainsi une palette de 117 spécialités réparties dans 16 domaines d’activités différents. "Comme toute entreprise, nos technologies évoluent et les besoins en main d'œuvre qualifiée également. Dans le monde militaire, nous recrutons dans le domaine de la cybersécurité et l’informatique, la maintenance, mais aussi dans le renseignement ou la conduite d’engins blindés", nous précise le lieutenant-colonel Maëlle de Remond du Chelas.