Hautes-Pyrénées : 9 tonnes de déchets potentiellement toxiques menacent la rivière la Lène à Caharet

Dans le hameau de Caharet près de Capvern-les-Bains, un amoncellement de déchets déposés illégalement menace de polluer une rivière, la Lène. Les inspecteurs de l’Office Français de la Biodiversité sont intervenus pour faire cesser ces agissements. Une enquête a été ouverte.

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Tout commence sous les fenêtres d’un habitant du secteur de Caharet, un hameau rural d’une quarantaine d’habitants dans les Hautes-Pyrénées, à une trentaine de kilomètres de Tarbes.

Un étrange manège attire son attention en période de confinement. Il s’inquiète de voir défiler des camions. Déjà une dizaine de voyages depuis une semaine !
Mais les bennes ne sont pas chargées à fond et impossible de voir ce qu’elles contiennent. Il décide de suivre le chargement pour comprendre. A proximité se trouve un ruisseau…la Lène, un affluent de l’Arros dans le bassin versant de l’Adour. Et ce qu’il y trouve est stupéfiant !
  

9 tonnes de déchets


Il prend des photos et les envoie à l’Office Français de la Biodiversité (OFB). Cet établissement public d’Etat a été créé en janvier 2020 pour la sauvegarde du patrimoine naturel avec des pouvoirs de police renforcés. Un inspecteur qui souhaite rester anonyme les reçoit.
« Il y avait des fauteuils, des canapés, des gravats, des bidets, de la ferraille, des pots de peinture, du placo… » Un inventaire à la Prévert. Au total 9 tonnes de déchets issus de la démolition d’un hôtel déversées en toute illégalité au bord d’une route, juste en dessous une ravine qui surplombe le cours d’eau.
 


« Dans notre département nous avons une augmentation significative de signalements de la part des citoyens mais en période de confinement, nous donnons la priorité à ceux qui portent une atteinte grave à l’environnement » explique Pierre Landaburu, chef de service à l’OFB pour les Hautes-Pyrénées. Il demande alors une autorisation spéciale à sa hiérarchie pour se rendre sur le terrain.

«  9 tonnes c’est heureusement rare. C’est un volume très important qui nous a conduit à prendre des mesures immédiates »  ajoute Sylvie Soumet chef du service police à la Direction régionale de l’OFB.

Des écrevisses à pattes blanches dans la rivière


Car il y a une menace grave de pollution dans cette rivière qui abrite des écrevisses à pattes blanches, une espèce de crustacés protégée et emblématique des cours d’eau français. Victime de la dégradation de son habitat et de la mauvaise qualité des eaux, concurrencée par une espèce invasive d’origine américaine, elle est aujourd’hui en voie de disparition. Elle est classée sur la liste rouge mondiale de l’Union internationale pour la conservation de la nature. Elle est très sensible à la pollution de son milieu naturel.
 


Deux inspecteurs font le déplacement. A leur arrivée, un individu est en train de pousser les déchets vers le cours d’eau. Les inspecteurs identifient rapidement les auteurs de ce dépôt sauvage : une entreprise locale du bâtiment qui a reconnu les faits. On ne connaît pas encore les raisons de cette infraction mais il faut savoir qu’une tonne de déchets à traiter coûte 150 euros sur un site habilité.
« Nous procéderons aux auditions après le confinement. Nous avons identifié 3 infractions qui relèvent du délit et d’amendes pour altération ou dégradation non autorisées de l’habitat d’une espèce animale non domestique protégée, dépôts d’ordures à l’aide d’un véhicule dans un lieu non autorisé et abandon de déchets dans des emplacements interdits » résume l’OFB.


Des déchets potentiellement toxiques


Des échantillons de ces ordures sont alors prélevés car ce que craint la vice-procureur en charge de l’environnement au Parquet de Tarbes, Bénédicte Gilbert, c’est la toxicité de ces déchets.

« Les plaques de fibrociments pourraient contenir de l’aimante. L’enjeu écologique est très important » précise t’elle.


Et Pierre Landaburu d’ajouter « nous pourrions assister au phénomène de Lixiviat à savoir que de l’eau de pluie pourrait s’infiltrer sur ces déchets, se charger en polluants et endommager l’environnement. »

Une enquête a été ouverte. L’OFB a fait cesser les agissements de cette entreprise du bâtiment. « La justice demandera aux auteurs des faits une remise en état des lieux » précise Bénédicte Gilbert.

La gestion des infractions pendant le confinement?


Les inspecteurs de l’OFB Hautes-Pyrénées s’appuient sur un réseau d’informateurs citoyens qui les renseignent.  Et depuis le début du confinement, ils reçoivent un nombre plus important que d’habitude de signalements. Parmi eux des agriculteurs qui ont encore la possibilité de travailler.
« C’est plutôt une bonne nouvelle de voir que les gens sont soucieux de l’environnement. Nous avons été interpellé sur des traitements phytosanitaires à proximité des rivières, ce qui est interdit dans une zone de moins de 5 mètres. Des haies auraient aussi été arraché ou encore des barrages édifiés pour détourner des cours d’eau » raconte Pierre Pierre Landaburu, chef de service à l’OFB  pour les Hautes-Pyrénées.
Des signalements qui devront être vérifiés sur place après le confinement mais lorsque les faits sont graves, les inspecteurs agissent. 

Les missions de terrain sont plus limitées et ciblées sur les dommages importants liées à l’environnement 

« Nous avons des signalements assez nombreux sur l’ensemble des départements de notre région mais l’heure n’est pas encore au bilan car il nous faut trouver un juste équilibre entre la protection des salariés de l’OFB qui doivent eux aussi respecter le confinement le plus possible et les missions de terrain qui sont plus limitées et ciblées sur les dommages importants liées à l’environnement » explique Sylvie Soumet, chef du service police à la Direction régionale de l’OFB.

Le confinement aura t-il eu des effets positifs sur la nature ou aura t-il laissé le champ libre aux citoyens mal intentionnés ? Il est encore trop tôt pour y répondre. Mais les citoyens veillent surtout en période de confinement et les agents de l’OFB restent mobilisés pour faire respecter la loi.
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