"Les lacs de montagne ne sont pas des stations balnéaires d'altitude" alerte Océane Pasquet conservatrice de la Réserve Nationale du Néouvielle

En été, plus que jamais, on cherche à se rafraîchir. Les lacs de montagne font figure de nouvelle oasis. Une tendance nettement accrue depuis les confinements, certains touristes viennent même exclusivement pour se baigner. Or c'est un péril pour les lacs et torrents de montagne. Trois questions à Océane Pasquet, conservatrice au Parc National des Pyrénées.

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Face aux chaleurs étouffantes, l'idée de se rafraîchir dans l'eau est tentante. Des touristes, de plus en plus nombreux, font le choix de venir en altitude pour se baigner. D'autres, au cours d'une randonnée, se laissent tenter par le fait de "piquer une tête" quand d'autres encore s'y lavent au savon après une nuit passée sous la tente. Or, il est fortement déconseillé, parfois même interdit de se baigner dans les lacs de montagne. Le pourquoi avec Océane Pasquet, conservatrice de la Réserve Nationale du Néouvielle.

France 3 : Quelle évolution constatez-vous par rapport aux comportements en montagne et notamment concernant les lacs ?

Océane Pasquet : Au niveau du massif du Néouvielle, les lacs constituent une des principales richesses même si au plan de la biodiversité, c'est tout le massif qui est très intéressant. On a une succession de milieux aquatiques, que ce soit les lacs, les laquets, les ruisseaux, etc. Et effectivement, avec un accès qui est très facilité au niveau routier, on se retrouve avec des comportements et des activités qu'il n'y avait pas forcément avant, et encore plus depuis l'après-COVID. Or, on essaie de sensibiliser les gens en expliquant qu'on n'est pas dans des stations balnéaires d'altitude.

C'est un peu compliqué, parce que les gens montent vraiment avec cette optique de venir uniquement se baigner, donc avec la serviette, le maillot de bain, la glacière. C'est d'autant plus difficile que nous avons un accès routier direct aux lacs d'Oredon ou d'Aubert. Et on observe ce comportement particulièrement en fin de journée. Or ça crée plein de dérangements que ce soit déjà visuels, parce que les gens ne viennent pas non plus pour voir des gens à moitié habillés, voire carrément nus sur les lacs de montagne. Et après, ça pose des problèmes de cohabitation avec les randonneurs, en termes de bruit aussi, et c'est un dérangement bien sûr pour la faune et la flore.

France 3 : Quelles sont les conséquences ?

Océane Pasquet : Cette présence dégrade directement le biotope avec le piétinement, le soulèvement des sédiments, la pollution. On a des personnes qui viennent là avec la crème solaire, l'antimoustique, sans parler de tous les produits qu'on peut avoir sur nous : la crème pour l'eczéma etc. Il y a aussi les personnes qui se savonnent et qui se lavent dans le lac. C'est difficilement quantifiable, mais on voit sur certains secteurs des taches d'huile, de matières grasses liées aux pollutions.

Ça fait désormais partie des pollutions qu'on a sur les plans d'eau où vivent beaucoup d'espèces très sensibles, très fragiles, rares, voire endémiques, comme le calotriton des Pyrénées qu'on va avoir notamment sur les ruisseaux en aval, le desman des Pyrénées, une espèce endémique et protégée. Toutes les espèces en fait vont être dérangées parce que le piétinement en baignade implique le soulèvement des sédiments.

Ça dégrade aussi beaucoup les berges, la végétation qui peut être écrasée ainsi que la faune, les insectes, les larves... C'est difficile à gérer au quotidien. On a souvent des questions de personnes qui nous demandent si c'est autorisé. Actuellement, on est sur de la sensibilisation, la baignade n'est pas interdite, mais on travaille sur une réglementation de cette activité.

France 3 : quelle est la réglementation en vigueur dans le Parc national des Pyrénées justement ?

Océane Pasquet : Sur la baignade, il n'y a pas de réglementation car c'est un phénomène nouveau. L'eau était plus froide avant et il y avait moins de monde. Lors de la création des espaces naturels protégés, il n'y a pas eu de prise en compte. La baignade est juste interdite pour l'instant à 50m des ouvrages. Mais il peut y avoir des PV si le dérangement de la faune est avéré.

On a plusieurs lacs, notamment en montagne et dans des réserves, qui ont fait l'objet de réglementations avec des arrêtés pour interdire la baignade y compris au plan national, dans les Alpes par exemple. Ça fait partie des problématiques à régler à l'échelle nationale. Et la réglementation apparaît comme l'une des solutions. 

Il faut bien préciser les choses. Nous avons des difficultés avec tout ce qui est en lien avec les activités de baignade. Le paddle ou le kayak qu'on n'a pas encore mentionnés par exemple sont des activités qui font que les personnes peuvent passer de lac en lac et transporter des pathogènes, des champignons ou des maladies qui peuvent être très néfastes, notamment pour les amphibiens.

Il y a des zones plus ou moins difficiles d'accès. En Vallée d'Aure par exemple, le lac de Baroude est plus difficile d'accès donc moins impacté. Sinon, il existe quand même une réglementation : dans la réserve, au niveau du bivouac. Elle est assez stricte. On n'a que deux aires de bivouac qui sont autorisées sur la plage du lac d'Oredon sous le parking d'Oredon et sous le barrage d'Auber, on trouve une aire qui est matérialisée. Le bivouac est autorisé seulement de 19h à 9h. D'autres règles sont à respecter impérativement : les chiens sont interdits, même tenus en laisse, dans le Parc National des Pyrénées et la Réserve. Les feux, les drones ainsi que tout prélèvement et dépôt de déchets également. 

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