Un gypaète, rapace emblématique du massif des Pyrénées, a été surpris en plein vol par l'attaque d'une corneille. Il en a fait une pirouette des plus acrobatiques. Une vidéo insolite publiée et commentée par le Parc national des Pyrénées sur sa page Facebook.
Un rapace bousculé en plein vol par une corneille. Le Parc national des Pyrénées a publié sur sa page Facebook une vidéo de Laurent Nédélec montrant un gypaète, espèce protégée de rapaces plutôt bien bâtie, se faire bousculer en plein vol par une corneille pour le moins audacieuse. Le rapace est littéralement retourné de surprise et en perd une plume.
"Chacun son espace ! commente le Parc. Lors de sa quête alimentaire, il peut arriver que le gypaète pénètre le territoire d’un corvidé. Mal lui en a pris : la corneille est venue à sa rencontre. D’une pirouette, le casseur d’os l’a évincée. Ce gypaète prénommé Cotiella a été marqué il y a plusieurs années (marquage rouge à l'aile), par les scientifiques espagnols, permettant aux gardes-moniteurs du Parc national des Pyrénées de la reconnaître lors des suivis naturalistes".
Défendre son territoire
Des oiseaux plus petits qui pourchassent des plus gros, c'est très courant, nous explique Franck Reisdorffer, chargé de mission faune au Parc national. "C'est vraiment très fréquent, notamment en ce moment, en période de reproduction. Les oiseaux, ils sont un peu comme nous, on va dire, ils défendent leur nid et leur progéniture."
C'est une défense de territoire sur un rapace. La corneille réagit, on va dire, à la taille de l'intrus. Et ça pourrait être n'importe quel intrus, elle réagirait exactement pareil.
Franck Reisdorffer, chargé de mission faune au Parc naturel des Pyrénées
La corneille se met-elle en danger ?
Mais foncer ainsi sur un gypaète, est-ce bien raisonnable ? "La corneille ne risque absolument rien. Le gypaète, c'est vraiment l'espèce placide par excellence qui n'a de comportement agressif que pour défendre son territoire. Il n'a aucun comportement de prédation envers aucune espèce animale", nous explique le spécialiste. En revanche, face à un faucon, la corneille aurait pris de gros risques car le rapace est de plus petite taille, donc plus véloce et très puissant, et c'est un prédateur...
Comment le gypaète a-t-il senti venir l'attaque ? Tout simplement parce que l'oiseau a un très large champ de vision, avec très peu d'angles morts. Et il faut savoir que le mode de fonctionnement du gypaète, "c'est de vadrouiller toute la journée le long des falaises. Lui ne se nourrit que d'os, donc il faut qu'il repère la moindre carcasse à des vitesses assez rapides. Donc il est toujours en train d'observer à 360°. C'est un animal qui table énormément sur sa vigilance."
Très bon planeur, le gypaète est aussi un habitué des figures en vol. À l'image de cette pirouette d'évitement.
Un vautour appelé le "casseur d'os"
Le gypaète barbu est aujourd'hui principalement présent en Asie centrale et Moyen-Orient, mais est aussi en Afrique et en Europe. Il est l'une des quatre espèces de vautours en France. Elle n'est encore présente que dans les Pyrénées, les Alpes où le gypaète est en cours de réintroduction, le Massif central et le Massif corse. Sa caractéristique physique est une touffe de plumes qui fait saillie sous son bec et donne l'impression qu'il arbore une barbe noire.
Il est appelé le "casseur d'os" car il a l'habitude de laisser tomber les os trop volumineux pour être ingurgités d'une hauteur de 50 à 100 mètres sur les flancs de falaise ou sur les pierriers. C'est ainsi qu'il peut en déguster les ligaments. Les Espagnols le nomment d'ailleurs ainsi "el quebrantahuesos".
Ce vautour se nourrit de cadavres d'animaux sauvages comme les isards ou les bouquetins ou d'animaux domestiques comme les brebis ou les chèvres. "Il ne passe qu'après que les vautours ont déjà nettoyé la carcasse. Lui, c'est vraiment l'os. Son régime alimentaire, c'est quasiment que de l'os, quelques tendons", nous rappelle le chargé de mission faune du Parc naturel des Pyrénées.
Un point commun avec la corneille noire qui se nourrit aussi de cadavres. Mais elle ne dédaigne pas les fruits, les graines, insectes, vers de terre, petits mammifères, œufs et oisillons. Elle se promène au sol pour se nourrir, mais peut aussi poursuivre d'autres oiseaux pour leur faire lâcher leur proie.
Son adaptabilité et ses capacités cognitives sont connues de nombreuses civilisations. À titre d'exemples, elle est capable de déposer des noix devant des voitures pour qu'elles soient cassées ou de remonter avec son bec des fils de pêche pour manger le poisson.