Le patron du restaurant Le Sud à Valras-Plage, près de Béziers, se souviendra longtemps de sa soirée du 14 juillet 2023. Dans son établissement bondé, un couple avec trois enfants fait un esclandre. La jeune femme, une influenceuse, lui promet alors "de le détruire sur les réseaux sociaux". Dès le lendemain, il reçoit des avis négatifs, des insultes et des menaces.
L'affaire démarre comme un banal différend entre un commerçant et un client. Mais au final, cela se transforme rapidement en bad buzz sur Tik Tok, Instagram et Facebook, sans oublier une main courante à la gendarmerie et bientôt deux plaintes.
Un soir de 14 juillet à Valras-Plage
Dans le restaurant de Pierre, en front de mer, c'est le rush. L'établissement est complet en ce jour de fête nationale et en attente du feu d'artifice. Un couple avec trois enfants se présente avec un adulte et demande une table pour six.
Après 15 à 20 minutes d'attente pour qu'une table se libère, la femme dit qu'elle et son mari mangeront et que les enfants prendront seulement une glace car ils ont déjà dîné explique le restaurateur. Impossible pour lui de mobiliser une table de six personnes pour seulement trois adultes qui vont manger quand il y a foule et des clients qui attendent.
Selon la cliente, tout se passait bien (prise de commande dans l'attente d'une table) jusqu'à ce qu'un groupe de 6 à 8 personnes arrive et que la serveuse lui dise qu'elle ne pouvait plus les accueillir car les enfants ne prenaient qu'une glace.
Un enregistrement de l'altercation en story sur Instagram
Le ton monte entre la femme, soutenue par son mari, et le restaurateur. "Elle se présente alors comme Djena Della influenceuse et menace le patron de représailles numériques grâce à son million de followers" (415.000 sur Instagram et autant sur Facebook) raconte le commerçant.
Selon le témoignage du patron du restaurant, l’influenceuse l’aurait menacé de nuire à la réputation de son établissement, pendant que l'homme l’accompagnant l’aurait agressé verbalement ainsi que deux de ses employés.
Pour la cliente, la conversation avec le restaurateur a dégénéré quand un serveur est intervenu en haussant la voix. Et quand il n'a pas reculé alors que le mari lui demandait de s'éloigner de sa femme.
Oui, il est vrai que je suis sortie en conseillant aux personnes de la file de tracer leur route, après une injustice que je venais de subir sachant que je venais de patienter 25 minutes. Je suis atteinte de sclérose en plaques donc 5 minutes debout me paraissent une éternité. Mais il est ABSOLUMENT FAUX que j'ai dit que j'avais 1 million d'abonnés et que je les détruirais, c'est mon mari qui leur a dit qu'on le dénoncerait sur les réseaux sociaux. Ca les a fait rire.
Djena della.Lettre ouverte envoyée à France 3 Occitanie.
Un bad buzz sur les réseaux sociaux
Dès le lendemain, le restaurateur de Valras affirme que "la jeune femme a mis ses menaces à exécution". Il raconte d'une part, que la vidéo enregistrée à son insu la veille est sur Tik Tok, Instagram et Facebook. Et d'autre part que l'influenceuse invite ses abonnés à mettre des avis négatifs au restaurant sur les différentes plateformes.
"Là, les messages de menaces et de haine apparaissent" poursuit le patron. Tout comme les avis négatifs venant de personnes qui ne connaissent pas le restaurant : "restau degueu", "restaurant de facho", "il suffit de le brûler y aura plus de problème". La note du restaurant passe selon ses explications de 4,5/5 à 3,9 en une nuit seulement.
Djena della ne partage pas la version du restaurateur. Elle rejette de son côté toute incitation : "Non, je n'incite pas à la haine, je partage juste cette injustice pour que plus jamais un restaurateur ai l'occasion de choisir sa clientèle. J'ai été harcelée par l'entourage et les personnels du restaurant, j'ai reçu des insultes" précise-t-elle.
Le patron reçoit le soutien de collègues et de clients
Le restaurateur lynché sur la toile par des internautes et ayant peur pour sa sécurité, celle de ses employés et de sa famille, décide d'aller à la gendarmerie pour expliquer sa mésaventure.
Je souhaite tourner la page. C'est une expérience douloureuse. J'ai tout de même fait une main courante à la gendarmerie et porté plainte car l'influenceuse menace de le faire contre moi. Mais étant une personne morale, la décision des suites apportées à mon action en justice dépend du procureur de la République.
Pierre, gérant du restaurant Le Sud à Valras-Plage
Lundi, Pierre a donné sa version des faits dans une lettre ouverte sur son compte Facebook. "Aujourd'hui, on veut détruire un homme, un restaurant, une entreprise ou des employés, en faisant la promotion de la haine sur les réseaux sociaux juste pour 3 glaces. (...) On va continuer à servir les gens, à les accueillir avec le sourire et à tout faire pour qu'ils passent un bon moment chez nous, Restaurant le Sud à Valras-Plage" conclut-il.
Il a déjà reçu de nombreux soutiens et encouragements. Son post a été partagé plus de 4.000 fois.
Parmi les commentaires, des professionnels du tourisme qui dénoncent le déferlement gratuit de haine contre leur établissement et souvent un harcèlement personnel sur les réseaux sociaux. Mais aussi des clients, des habitués qui soutiennent le patron et son restaurant.