Hérault : enquête sur la disparition de navires génois au large de La Grande Motte en 1165

Des archéologues tentent de percer le mystère d'une flotille de bateaux gênois disparue entre La grande Motte et Palavas en 1165. La découverte d'ancres par plusieurs mètres de fond pourrait livrer ce secret enfoui depuis le moyen âge. Une datation au carbone 14 doit avoir lieu prochainement.

C'était en 2018. Le Groupe de recherche en archéologie navale (GRAN) venait de terminer au large de la Grande Motte sa troisième campagne sous-marine pour tenter de retrouver les épaves de cinq navires gênois coulés en septembre 1165 par une petite escadre de galères pisanes (originaire de la ville de Pise).
Après des années de recherches, ces responsables du GRAN venaient sans doute de localiser les restes d’une bataille navale entre provinces italiennes datant du XIIe siècle.
Après deux campagnes de prospection réalisées à l’aide d’un magnétomètre en 2016 et 2017, l'équipe a effectué des sondages de vérification sur les points où des masses de fer avaient été détectées. Désormais il faut sortir l'une de ces ancres de l'eau pour la dater. Ce qui sera fait ce vendredi 18 septembre 2020 au large du Grand Travers. 

Une découverte déterminante

Enfouies sous près de 60 cm de sédiments (sable et vase), plusieurs ancres brisées ont été découvertes dès les premiers sondages. C'est leur aspect pour le moins atypique et leur disposition qui a intrigué les archéologues. Tout laisse à penser qu’elles pourraient appartenir aux navires recherchés. En attendant, une analyse détaillée des éléments découverts sera necessaire pour établir ou non la présence de ces navires en face de nos côtes. 

La zone de recherche se situe sur le littoral Héraultais entre La Grande Motte et Palavas au lieu dit le grau de Melgueil. La bataille entre les 5 bateaux gênois coulés et l'escadre pisane en 1165 s'est probablement déroulée dans le cadre d'une lutte de pouvoir entre les deux cités qui n'étaient pas d'accord sur le pape qui devait siéger au Vatican. A cette époque-là, le pape Alexandre III et l'empereur Frédéric Premier dit Barberousse se livrent une lutte sans merci pour la prise du Saint-Siège. En 1162, Alexandre III se réfugie en France, à Maguelone puis à Montpellier ce qui expliquerait qu'une telle bataille navale ait eu lieu au large de l'actuelle plage du grand travers.

Les troupes de l'empereur romain germanique ont cherché à faire tomber ce pape qui, avec ses cardinaux, s'est opposé à l'empereur Frédéric Barberousse, fraîchement élu Roi des Romains en 1152, alors que ce dernier voulait étendre son pouvoir sur l'Italie.
Les éléments trouvés en 2019 présagent donc d'une possible épave. Si tel était le cas, ce serait une découverte archéologique de la toute première importance en Méditerranée occidentale.

Des ancres atypiques retrouvées par 9 mètres de fond  

D’après les responsables du groupement de recherche archéologique navale, d'autres points où des masses ferreuses ont été localisées doivent encore être vérifiés. Ces masses devraient faire l’objet de campagnes de recherches ultérieures. Ces premiers résultats ont pour conséquence de mettre en évidence la richesse du potentiel archéologique d’une zone qui était réputée très pauvre.
Pour l'équipe cette dernière ligne droite est peut être la plus longue mais aussi la plus passionnante. Les opérations subaquatiques sur le Grau de Melgueil, sont conduites par le GRAN (Groupe de Recherches Archéo-Navale) depuis 2017. Le GRAN, fondé par Max Guéroult dans les années 80 s'est fait connaître pour la fouille de l’îlot de Tromelin dans l'Océan Indien, où fut abandonné pendant de longues années un groupe d'esclaves malgaches.

Les données disponibles concernant les navires gênois du XIIe siècle sont assez peu nombreuses. Il y aurait d'après les Annales de Gênes plusieurs types de navires commes les galères, les nefs et les nefs huissières.

d'après les responsables de cette expédition archéologique

Une datation au carbone 14

Après avoir localisé ces ancres à la forme atypique, les plongeurs du groupe de recherche en archéologie navale vont donc exonder l'une d'entre elle qui gît par 9 mètres de fond, enfouie dans des sédiments et du sable.
Mais seule une partie de l'ancre sera remontée. L'ensemble pouvant peser plus de 400 kgs, il va falloir découper soigneusement un "organeau", l'anneau fixé sur l'ancre qui servait à accueillir le "bout" (la corde), cela afin de le faire expertiser.

Pour réaliser cette datation, ils vont faire appel au CEA, le Commissariat à l'Energie Atomique, qui utilisera la célèbre technique du carbone 14. Une technique éprouvée mais pas sur le métal. Le carbone 14 est en effet plus facilement utilisé pour dater des bois, des tissus ou des végétaux.

Les chercheurs du GRAN ne désepèrent pas de retrouver des bouts de chanvre fichés dans le métal.
Ces ancres, s'il s'avère que ce sont des ancres gênoises et non romaines étaient entourées de cordage sur "l'organeau".

Les résultats ne seront pas connus avant deux à trois mois. Si les conclusions sont positives, ce serait un vrai cadeau de Noël pour toute l'équipe, car les vestiges de navires datés du XIIe siècle sont rarissimes.
 
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