Le principe de ce réfrigérateur libre-service est simple : chacun y dépose ce dont il n'a pas besoin et y prend ce dont il a besoin.
Installé dans la rue Frégère à Clermont l'Hérault, par David Bour, ce frigo solidaire est une arme contre le gaspillage alimentaire et la précarité financière.
À l'angle de la rue Frégère et de la rue de l'Egalité, les véhicules ralentissent, intrigués. Un frigo blanc trône sur une palette. "Solidarité, partage, don", peut-on lire sur sa porte.
À l'intérieur, poireaux, tomates, oignons, conserves, pain... Tout le monde peut venir y déposer ce qu'il ne mange pas, et y prendre ce dont il manque. "Tout ça peut disparaître en quelques heures !", s'exclame David Bour, 32 ans. À l'origine de cette initiative, le jeune habitant de Clermont-l'Hérault ne s'attendait pas à un tel succès.
De la débrouille au partage
Tout commence à la fin du mois de novembre. Agent d'entretien dans une salle de sport, mis au chômage partiel, David voit ses revenus chuter. Habitué de la "récup", pratique qui consiste à extraire les aliments en bon état des poubelles des magasins, le jeune homme a l'idée de déposer devant sa porte le surplus de sa collecte. Dans de simples cageots, d'abord. Puis, dans un réfrigérateur, donné par son ami Etienne Coet.
Le vent glacial qui s'engouffre dans la rue Frégère se charge de garder les aliments au frais, car le frigo n'est pas branché. Plusieurs fois par jour, David vérifie que tout reste propre et bien conservé.
Chaque soir, c'est en accord avec la direction d'un supermarché tout proche que David récupère des cageots d'invendus en excellent état. Il sollicite également les petits commerces locaux.
"Il faut voir ce que les magasins sont amenés à jeter ! Là, ça évite de passer par la case poubelle, c'est bien plus hygiénique"
À l'intersection entre les difficultés financières et le combat contre le gaspillage alimentaire, l'envie de partager est née.
La communauté de "'L'Assiette vide"
Sur Facebook, David anime la page "L'Assiette Vide". Une petite communauté s'est fédérée autour du réfrigérateur, sur les réseaux sociaux comme dans la réalité. Tous les passants saluent David. "C'est le nouveau Coluche !", lui lance de loin un adolescent.
"Ca fait seulement deux semaines qu'il est en place, et ça fonctionne très bien ! Les habitants participent, ils m'encouragent à continuer !"
David est encore surpris de l'engouement des habitants du quartier. "Une dame s'est même proposée pour cuisiner des petits plats et des soupes. C'est très généreux de sa part", sourit-il.
Gracieusement, le graffeur Mo est venu peupler de personnages colorés l'extérieur du frigo. "Ça donnera encore plus envie aux gens de s'arrêter", espère-t-il.
Curieuse, une passante âgée s'arrête justement pour discuter avec le groupe. "C'est une très bonne initiative ! Je viendrai déposer des livres", promet-elle avant de s'éloigner.
Répondre à un besoin
"On ne pensait pas que tant de gens étaient dans le besoin", s'étonne Etienne.
Certaines personnes qui viennent de l'autre côté de la ville pour prendre ou déposer des choses, c'est incroyable !
Entourés de leurs amis, dont certains tirent leurs revenus de la manche, les deux jeunes racontent la difficulté à trouver du travail dans la région. Ils ont eux-mêmes connu cette peur de "l'assiette vide". "C'était déjà dur ici pour tout le monde, mais avec le corona, c'est pire", souffle Etienne.
La demande est telle que David doit réapprovisionner les étagères deux à trois fois par jour. "Hier, quand je suis passé, c'était un contenu totalement différent", s'exclame Etienne. "Donc ça veut dire que dans le quartier, des gens se font des petits plats... grâce au partage ! Si ça sent bon, ça vient de la rue Frégère !"
David et Etienne veulent maintenant créer une association. D'autres frigos pourraient être installés dans la ville.