"C’est le taureau qui décide", la course camarguaise pour trouver sa place dans la société, mais à quel prix ?

Dans le Gard, deux jeunes, Jawad et Belkacem, choisissent de s’investir dans la course camarguaise. Une pratique très ancrée dans la culture locale, sans mise à mort du taureau, mais pas sans risque pour celles et ceux qui la pratiquent. Malgré tout, c’est par ce biais qu’ils arrivent à trouver leur voie pour affirmer leur identité.

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Documentaire "fragments de la jeunesse française". Un film de Jérémie Battaglia à voir le jeudi 10 octobre 2024 à 22h50 sur France 3 Occitanie. Une coproduction Extérieur jour, les productions du Lagon, 13 Prods, Aljazeera Documentary Channel. Avec la participation de France Télévisions

Belkacem Benhammou entre dans l’arène. Il est suivi par huit raseteurs, comme lui. Les jeunes hommes tous vêtus de blanc s'éparpillent. Quelques instants plus tard, le taureau noir massif apparaît. Belkacem s'élance. La danse entre l’homme et l’animal peut commencer.

La course camarguaise ?

La course camarguaise est un spectacle traditionnel qui se déroule dans quelques départements du sud de la France, comme l’Hérault ou le Gard. La saison commence au mois de mars et se termine au mois d’octobre. Un jeu et un sport dans lequel il n’y a ni mise à mort, ni volonté de blesser l’animal. 

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Moments d'échanges entre Jawad et Belkacem, deux raseteurs qui pratiquent la course camarguaise. Un plaisir et une passion, mais aussi un facteur d'intégration; ©Jérémie Battaglia

Dans l'arène, le raseteur, entièrement vêtu de blanc, va devoir affronter le taureau et s'approcher le plus près possible de sa tête, pour lui enlever avec un outil particulier en forme de peigne (le crochet), tous les attributs placés entre ses cornes : cocardes, glands et ficelles. L’action doit se faire dans un ordre et un temps bien défini. 

"Je disais à mes parents que j’allais au foot"

Enfants d’immigrés, Jawad et Belkacem font partie de ces jeunes qui se sont pris de passion pour cette pratique profondément ancrée dans le patrimoine local. "Mes parents ne voulaient pas que je fasse de la course camarguaise. Je leur disais que j’allais au foot et je partais m’initier à Baillargues" raconte Jawad. "Ce n'était pas dans nos traditions" rajoute-t-il. "Mes parents ont subi mes choix et puis, ils ont accepté".

Pour Belkacem, sa vie avec les taureaux a commencé par son père, puisqu’il était lui-même raseteur "il a commencé juste après la guerre d’Algérie, par plaisir, mais aussi pour ramener 2-3 sous à la maison..." confie-t-il.

Un vecteur d’intégration

La course camarguaise est un sport professionnel. "On gagne 200 euros par prestation" précise l’un d’eux. Ce qui oblige bien souvent ces jeunes à trouver un travail à côté, sachant que du jour au lendemain, tout peut s’arrêter. Mais au-delà du défi, du plaisir et de l’adrénaline que le jeu procure, ces jeunes mènent à travers cette pratique, un tout autre combat : celui qui leur permet de trouver leur place dans la société, susciter le respect et affirmer leur identité.

Leur volonté et leur détermination pour atteindre l’excellence forcent le respect. Jawad et Belkacem en sont conscients, leur engouement pour la course camarguaise n’est pas sans risque.

Cette reconnaissance que j'ai eu à travers la course camarguaise, c'est qu'en fait on m’a laissé le droit de m’exprimer et montrer mes qualités. Après, c’est le taureau qui décide si j’ai le niveau ou pas.

Jawad Bakloul, raseteur professionnel

Ils savent qu'ils peuvent à tout moment se faire encorner, essuyer de graves blessures ou pire, y laisser la vie. Malgré tout, rien ne les arrête car à travers la course, c’est une place qui leur est refusée dans la société que ces jeunes hommes tentent de s’approprier. 

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