Vendredi 2 octobre, Emmanuel Macron a tenu un discours ferme sur le "séparatisme islamiste", qui a ravivé des souvenirs douloureux dans l'Hérault. Touchée par une vague de départs vers la Syrie en 2014, la ville de Lunel veut définitivement tourner la page après ce traumatisme.
Il y a six ans, la petite ville héraultaise se retrouve malgré elle sous le feu des projecteurs : une vingtaine de jeunes Lunellois radicalisés ont pris la route pour rejoindre les rangs du groupe "Etat islamique" en Syrie.
La commune de 26 000 habitants hérite alors de l'étiquette de "berceau français de l'islamisme radical". Une image injustifiée dont les habitants et les autorités veulent aujourd'hui se défaire.
Depuis des années, responsables associatifs, travailleurs sociaux et élus travaillent ensemble au développement du lien social et à la reconstruction de leur ville.
"Notre seule arme, c'est l'éducation populaire"
Tahar Akermi est une figure bien connue à Lunel. Cet éducateur passionné connaissait la plupart des jeunes embrigadés en 2014. "Est-ce que j'ai foiré ?", s'interrogeait-il à l'époque devant les caméras de France 2.Aujourd'hui, le travailleur social, qui est aussi président de l'association Arts de Culture, s'est détaché de son sentiment de culpabilité. Il s'investit toujours auprès des jeunes, notamment ceux issus de classes populaires ou de l'immigration. "Il n'y a pas d'arme contre l'extrémisation", confie-t-il. "Notre seule arme, c'est l'éducation populaire."
Les jeunes de Lunel souffrent d'ailleurs de la réputation de leur commune. Parmi les témoignages recueillis par France 2, beaucoup affirment se sentir "catalogués" : ils sont également "révoltés" et "tristes" d'être perçus comme des habitants de la "ville du Djihad".
La vigilance reste de mise
Avant leur départ en Syrie, certains des djihadistes fréquentaient la mosquée de Lunel. Depuis, le lieu de culte assure avoir fait place nette : il a recruté un nouvel imam et pris des dispositions. "On ne peut plus se réunir ni dispenser un enseignement religieux sans avoir au préalable obtenu l'accord du bureau de la mosquée", affirme son président Jamel Benabdelkhader.Du côté de la mairie, l'édile lunellois Pierre Soujol affirme avoir un oeil sur la situation et prendre regulièrement le pouls auprès des acteurs de terrain. Depuis deux ans, aucun signalement pour radicalisation n'a été enregistré sur la commune.Père d'un jeune homme de 21 ans, qui s'était d'abord converti avant de rejoindre le groupe EI en 2014, Laurent Amar espère toutefois que la vigilance sera suffisante pour éviter de nouveaux cas de radicalisation. "Nous avons été vigilants au cours de la conversion de notre fils Raphaël. Jour après jour et pendant des années, nous avons essayé de garder le contact avec lui pour éviter un dérapage."Aujourd'hui, il n'y a pas de menace, on ne nous remonte rien. L'extrémisation n'est pas un sujet du quotidien pour nous, même si tout maire se doit bien sûr de surveiller le phénomène.
Il y a six ans, son fils a finalement perdu la vie en Syrie. Laurent Amar a porté plainte contre X pour obtenir des réponses.