"Le syndrome Ian", troisième volet d'une trilogie que le chorégraphe Christian Rizzo consacre aux danses anonymes et populaires, a plongé, vendredi soir, les spectateurs de Montpellier Danse dans le monde du clubbing au temps du punk-rock.
Pour cette création très attendue du grand rendez-vous annuel de la chorégraphie contemporaine à Montpellier, Rizzo est parti du souvenir d'une soirée en discothèque à Londres en 1979.
"Danser sur les ruines d'une nuit à jamais dissipée"
"Alors que la planète vibre sous le son du disco et de ses adeptes d'une danse ondulatoire et lancinante, l'Angleterre voit naître une musique sombre et poétique rythmée par des corps électriques, angulaires, saccadés", explique le danseur et chorégraphe autodidacte. "Entre solitude et communauté, quels vestiges de ces corps (peut-être) contradictoires me reste-t-il aujourd'hui, alors que nous tentons encore, quoi qu'il arrive, de danser sur les ruines d'une nuit à jamais dissipée ?", s'interroge Rizzo.
"Vibration collective"
La pièce réunit neuf danseurs "dans une vibration collective où le tempo se distribue entre physicalité des sub-bass et abandons mélodiques, en écho filtré à la poésie de Ian Curtis", le chanteur du groupe Joy division, explique Rizzo, night-clubber invétéré depuis l'adolescence. Figure emblématique pour la jeunesse de l'époque, Curtis, atteint de crises d'épilepsie de plus en plus violentes, se suicida en pleine gloire en 1980 à l'âge de 23 ans.
Hymne nostalgique
Le chorégraphe quinquagénaire évoque le monde de la nuit et des discothèques de cette époque avec une nostalgie retenue, presque involontaire. Sur la scène de l'Opéra Comédie à Montpellier, les gestes des danseurs sont parfois décomposés à l'extrême pour parvenir à un effet de ralenti qui semble arrêter le temps. Placés entre trois grands soleils mobiles métalliques qui crachent tour à tour lumière, son et fumées, les danseurs recréent une forme d'énergie désespérée de l'époque.
"Le syndrome Ian", troisième volet
Mais ce troisième volet ne parvient pas à atteindre la puissance du premier, "D'après une histoire vraie", crée en 2013 au festival d'Avignon. Dans cette pièce qui a donné une véritable notoriété à Christian Rizzo, dix interprètes masculins sont réunis dans une danse collective masculine inspirée du folklore turc.
En 2015, le deuxième volet, "Ad noctum" évoquait la danse populaire de couple, ses pas et ses cycles tournoyants.
Rizzo, figure atypique de la danse contemporaine
Figure atypique de la danse contemporaine, qui a lui-même touché au punk-rock, puis à la publicité et aux arts plastiques, Rizzo a été dans les années 1990 interprète auprès de nombreux chorégraphes contemporains, dont Mathilde Monnier et Mark Tompkins, ses "parents de danse".
Après s'être nourri de ces aventures artistiques diverses, le chorégraphe et plasticien à la barbe poivre et sel a bâti depuis 25 ans une oeuvre singulière. Il est depuis début 2015 le directeur du Centre chorégraphique national de Montpellier.