Avec "les folies montpelliéraines", la mairie de Montpellier veut surfer sur son image de capitale de l'architecture contemporaine.
Avec "les folies montpelliéraines" que la mairie lance en avril, la cité héraultaise veut surfer sur son image de capitale de l'architecture contemporaine, confortée par le New York Times. Il l'a récemment désigné ville française à visiter en 2012, notamment son hôtel de ville. Alors, Montpellier, capitale de l'architecture ou folie des grandeurs ?
Cette opération vise à transformer dans les mois à venir onze terrains au bord des lignes de tramway. Des lieux où les architectes bénéficieront d'une forte liberté de création, avec au final un choix effectué par des jurys d'élus et d'habitants de chaque quartier.
Ce projet s'ajoute aux programmes déjà confiés récemment à de grands créateurs.
Comme Montpellier le fait depuis 30 ans. La ville attend ainsi la livraison d'un immeuble de bureaux en jeu de boîtes, d'un "origami" avec brasserie, hôtels et logements d'Emmanuelle Gontrand, d'un "vaisseau spatial" pour le Lycée Georges-Frêche de Massimiliano Fuksas ou encore des archives départementales, "Pierres Vives", conçues par Zaha Hadid.
Dans cette ville de 258.366 habitants, ce concours s'inscrit dans une politique d'urbanisation devant faire face à une démographie galopante (460.000 à 510.000 habitants envisagés pour 2030 pour l'ensemble de l'agglomération). Avec pour ligne directrice un partage égal entre logements sociaux (73% de la population éligible), logements libres et accession à la propriété.
Cette nouvelle opération risque aussi de relancer un débat jamais totalement clos entre les partisans de l'architecture contemporaine et les sceptiques. Une opposition que l'hôtel de ville flambant neuf créé par Jean Nouvel n'a pas apaisée et qui remonte aux années 1980 avec la construction, ex-nihilo, du quartier d'Antigone par Ricardo Bofill.
Aujourd'hui la ville considère Antigone comme une référence en matière d'urbanisation.
Mais il essuie beaucoup de critiques esthétiques autant que qualitatives. "Il faudra ravaler comme on ravale les façades haussmanniennes", se défend l'adjoint à l'urbanisme, Michael Delafosse, assurant qu'Antigone "se comporte bien sur le marché".
Interrogées, les agences immobilières mettent un petit bémol à cette affirmation, notamment sur la partie piétonne en raison de l'absence de balcon.
"Le beau ne se décrète pas. Il faut susciter un geste, créer la discussion", souligne M. Delafosse, décidé à poursuivre dans la voie de "la diversité des architectes",
"pour ne pas être lisse" et "traduire "le cosmopolitisme de la ville". Quitte à ce que la cité manque un peu d'unité.
"L'aménagement a été conçu comme une campagne de publicité pour la ville", reprend son prédécesseur à l'urbanisme, désormais à la culture, Philippe Saurel. "On me dit verrue" (pour certains lieux), moi je réponds greffe", ajoute-t-il.
Des habitants pourtant ne cachent pas leur mécontentement, déplorant les finitions et le standing qui ne sont pas au rendez-vous, notamment dans l'isolation phonique, et surtout les prix exorbitants (4.000 à 6.000 euros le m2, relèvent les agences).
Les objections sont aussi politiques. Aliénor Bertrand, porte-parole d'EELV dans le Languedoc-Roussillon, dénonce le coût du nouvel hôtel de ville (135 millions d'euros) ou de "Pierres Vives" (125 M), et des "choix d'architectures de prestige avec un résultat contestable" notamment en terme "d'écologie ou de prise en compte des normes futures".
Pour elle, à quelques exceptions près, ces quartiers sont "un raté historique dans une période où il y a des besoins d'économie d'énergie".