Après une annulation due à la grève des intermittents en 2014 et une édition 2015 affaiblie, le Printemps des comédiens de Montpellier, l'un des principaux festivals de théâtre en France, espère pour ses 30 ans repartir "toutes voiles déployées". Il démarre ce vendredi soir, jusqu'au 10 juillet.
Faute d'accord à ce jour, dans la négociation sur l'assurance chômage de la profession du spectacle, une menace pèse toujours sur les festivals de l'été, dont le Printemps des comédiens de Montpellier qui lance traditionnellement la saison.
Jean Varela, le directeur du Printemps se dit, comme en 2014, "très solidaire des intermittents" mais il prévient que le festival peinerait à supporter de nouvelles perturbations.
Le conflit de 2014 n'a pas été vain. Il a permis de grandes avancées sociales", a-t-il dit à l'AFP. "Mais aujourd'hui je pense que les artistes et techniciens qui ont porté la grève au festival en 2014 sont conscients que le Printemps a beaucoup donné et qu'autant il s'est relevé une première fois, autant deux ans après, "c'est un peu court jeune homme" comme dirait Cyrano".
"Si d'autres actions des intermittents empêchaient le festival de se dérouler cette année, "ça mettrait l'outil véritablement en péril", prévient-il.
Deux ans après le cataclysme de l'annulation, le directeur du Printemps des comédiens, qui inaugure la saison des festivals, se félicite de la stabilisation de ses financements, avec un budget de 2,3 millions d'euros. Il prévoit du 3 juin au 10 juillet une riche programmation qui se veut "un état possible du théâtre". Et ce sur près d'un mois et demi alors que l'édition 2015 avait été réduite à 18 jours.
Quelque 60.000 spectateurs sont attendus cette année dans le vaste Domaine départemental d'O à Montpellier.
Retrouvez le programme 2016.
Le festival, un lieu de transmission qui se décentralise à Béziers
"Il y a beaucoup plus de spectacles prévus que l'an dernier puisque la grève nous avait affaiblis, ou disons que c'était une année de reprise", dit Jean Varela.
"Cette année, le festival est toutes voiles déployées... on verra où les vents nous mènent", philosophe-t-il.
Souhaitant pour ses 30 ans rendre hommage aux "grands maîtres du théâtre européen", le Printemps débute ce vendredi avec le symbole même des comédiens, "l'Arlequin, serviteur de deux maîtres" de Carlo Goldoni dans la légendaire mise en scène de Giorgio Strehler.
Parmi les prestigieux invités du Printemps, figurent également Peter Brooks avec "Battefield", un "Dom Juan" de Molière mis en scène par Jean-François Sivadier et joué par Nicolas Bouchaud, ou encore Georges Lavaudant pour une création, "Le Rosaire des voluptés épineuses", d'après l'oeuvre d'un maudit de la littérature, Stanislas Rodanski, qui passa la moitié de sa vie en hôpital psychiatrique.
"Ca ira (1) Fin de Louis", le spectacle de Joël Pommerat plebiscité fin mai par les Molières, sera également à l'affiche et permettra selon Jean Varela d'aborder une question "très actuelle: l'ordre ancien qui s'effondre et celui qui va naître".
Le Printemps doit également accueillir cette année des "bricoleurs de génie, qui, comme les Italiens l'ont fait avec la machinerie au 17e siècle, utilisent les technologies d'aujourd'hui pour amplifier la résonance de la cage de scène", souligne le directeur du festival.
"Cold Blood" du cinéaste Jaco Van Dormael, qui voyage dans les nano-univers en s'interrogeant sur la dernière image que l'on garde avant de mourir, se place dans cette catégorie. Tout comme "La Rencontre" de Simon McBurney, qui explore la conscience humaine en utilisant la technologie binaire. Pour ce spectacle, chaque spectateur est muni d'un casque audio pour une expérience sensorielle unique.
Mais le festival se veut également un lieu de transmission, d'où la présence de la jeune garde française de Yoann Bourgeois à Dag Jeanneret en passant par David Lescot ou les élèves de l'Ecole nationale supérieure d'art dramatique de Montpellier dirigés par quatre metteurs en scène différents: Alain Françon, Robert Cantarella, Gildas Milin, Jean-Pierre Baro.
Le Printemps se déplacera aussi à Béziers pour une vingtaine de représentations de "On achève bien les anges", dernier spectacle du théâtre équestre Zingaro de Bartabas.