Coronavirus : un médecin, nu, en colère appelle tous les soignants à s'identifier : "chair à canon"

Il crie sa colère. Médecin de campagne depuis 31 ans, ce matin, comme tous les jours, le docteur Colombié "part au front." Sans équipement ou presque. Alors il exhorte les professionnels de santé à s'identifier : "chair à canon".

"Je demande l’insurrection générale de tous les professionnels de santé. Ne pouvant entrer en grève, je demande à tous et à toutes de travailler avec un brassard, un plastron ou tout autre moyen, intitulé : CHAIR À CANON ». "C’est un coup de gueule, c’est sorti du cœur mais là, la coupe est pleine et on va la boire jusqu’à la lie", explique-t-il.

Et voilà comment Alain Colombié s’est retrouvé nu sur sa page Facebook avec pour seul habit, un brassard. "Je n’avais jamais fait de naturisme avant". Ce sera sa seule note d’humour car le docteur Colombié est un homme en colère.
 

Il exerce dans un village d’un peu plus de 2000 habitants, à Pomerols, à une cinquantaine de kilomètres, à l’ouest de Montpellier. Depuis 31 ans. "Ma vocation : médecin de campagne et médecin de famille".

Equipés comme nous le sommes aujourd’hui, nous sommes le principal vecteur du virus pour nos patients


"Je me sens utile à la société comme aujourd’hui les routiers, les caissières des grandes surfaces ou tout le personnel soignant".

Le docteur Colombié, comme de nombreux autres, ne supporte pas le manque de protection. "Equipés comme nous le sommes aujourd’hui, nous sommes le principal vecteur du virus pour nos patients. Le cheval de Troie, c’est nous ! Nous sommes, en première ligne, le dernier rempart de la population mais si on tombe comme des mouches ? " .

Président Macron, vous demandez à vos petits soldats de partir au front sans armes et sans défense ( masque, gel, surblouse ) et bien sûr sans considération, le petit doigt sur la couture du pantalon....., à non merde ! Pardon ! (Docteur Colombié)


"Humainement, ce n’est plus possible. Veut-on nous abattre ? Il s’agit d’une mise en danger de la vie d’autrui et de non assistance à personne en danger ", explique-t-il. En ce 23 mars, cinq médecins sont déjà décédés.
 

"Ce matin, j’étais au front, comme tout le monde. Ma salle d’attente étant trop petite, je l’ai fermée jusqu’à la fin du confinement. Je fais de la téléconsultation et je me déplace chez mes patients".

Ce matin, j’étais au front, comme tout le monde


Beaucoup ont plus de 80 ans. "Je les considère un peu comme mes parents". Ce lundi, Alain Colombié s’est déplacé chez six patients. "Selon moi, 4 ½ sont atteints du coronavirus". Le docteur milite lui aussi pour l’utilisation de la chloroquine, chère au professeur Raoult, de l’IHU Méditerranée à Marseille.
 

Une tenue par patient

"Avant mon arrivée, je demande à ce que le sol et la table soient javellisés. Je porte une tenue par patient que je mets dans un sac en partant et en rentrant je lave tout. Il me reste quelques masques, j’en ai encore pour une dizaine de jours, maximum. Aujourd’hui, j’ai limité mon activité pour ne pas faire prendre de risques à mes patients".

Heureusement, la solidarité joue, la mairie du village lui a livré plusieurs boites de masques périmés depuis 2014 ("mais c'est mieux que rien"), la pharmacie lui a proposé 18 masques FFP2 ( de quoi tenir 4-5 jours) et dans sa boite aux lettres, une infirmière à la retraite lui en a aussi déposé quelques-uns.

Nous avons déclaré la guerre à cette saloperie et nous la gagnerons

Comme tous les personnels soignants, le docteur Colombié rabache l'importance des gestes barrière : "Rappelez sans relâche les gestes barrière, lavage des mains, confinement, isolement en pièce séparée et ventilée à domicile, contrôle de la température. Pour ceux qui ont la chance d’avoir un garage attenant à leur habitation, s’en servir comme sas d’entrée avec mise en place d’un lieu dédié au linge et aux chaussures venant de l’extérieur avec possibilité de désinfecter".

Il veut néanmoins garder espoir : "nous avons déclaré la guerre à cette saloperie et nous la gagnerons".
 


 
Appel à la plus grande prudence
Quelques heures après cet entretien, le Docteur Alain Colombié a souhaité préciser sa pensée.
"Présent sur le terrain et conscient de la situation sanitaire qui s’aggrave de plus en plus. J’appelle, les soignants qui ont suivi mon appel à porter un brassard « CHAIR À CANON », à la plus grande prudence. Vous pouvez mettre ce brassard sur votre profil, sur votre véhicule mais évitez de le porter sur vous pour ne pas qu’il serve de point de fixation au COVID".
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