La machine judiciaire réussira -t-elle à être relancée après la crise du Covid-19 ? Au tribunal judiciaire de Montpellier, des avocats s'inquiétent notamment pour les procédures de divorce. Un couple ne peut pas espérer obtenir une tentative de conciliation avant le mois de mars 2021.
Pendant combien de mois encore, la justice de France va t-elle continuer à payer les lourdes conséquences du confinement ? Si globalement la reprise se fait sentir sur le plan économique, c'est loin d'être le cas dans les tribunaux : « La justice est complétement déphasée par rapport au monde moderne», confie Maître Emmanuelle Carretero, avocate à Montpellier.
À l'heure actuelle, un couple qui souhaite divorcer ne peut espérer obtenir une tentative de conciliation avant le mois de mars 2021. Avant le confinement, il fallait attendre en moyenne un peu plus de mois pour ce type de rendez-vous. Ces délais de plus en plus longs, sont une fois de plus la preuve du fossé entre une société ou la réponse instantanée est devenue la norme et la lourde machine judiciaire qui met du temps à démarrer.
Aujourd'hui, on consomme du divorce. Les gens ne comprennent pas pourquoi les juges mettent aussi longtemps à prendre une décision.
Grève, Covid : une année noire
À cause de la crise sanitaire, des milliers d'audiences ont été reportées dans les tribunaux de la région Occitanie. Certaines, initialement prévues au printemps ont lieu en ce moment. Cependant, la crise sanitaire n'est pas la seule explication aux nombreux reports, « on paie aussi le prix de la grève des avocats du début de l'année», ajoute Maître Carretero. Pendant trois mois, les avocats avaient fait grève contre le projet de réforme de leur système de retraite, mais pour le bâtonnier de Montpellier, Rémy Lévy, l'institution judiciaire paie aujourd'hui le manque de moyens investis pendant plusieurs années.Le garde des Sceaux annonce une hausse du budget de la Justice de 8%, c'est bien. On espère juste que la justice civile ne sera pas oubliée une fois de plus
Alors, la justice doit faire des choix sur les dossiers à traiter en priorité comme l'explique Stéphanie Hébrard, à nos confrères de Midi-Libre. Elle préside le tribunal des affaires familiales de Montpellier: « nous avons remplacé ces audiences par des audiences (...)concernant des conflits liés aux enfants».
Des années pour se remettre de la crise
Déjà, pendant le confinement, le président du Tribunal Judiciaire de Béziers, Luc Barbier avait tiré la sonnette d'alarme : «Il est clair que si la Chancellerie ne nous aide pas en nous fournissant des vacataires ça sera très compliqué. Cela risque de prendre des années pour se remettre de la situation». Une situation partagée par toutes les juridictions. À Montpellier, il manquerait, au moins « 20 postes de greffiers et 8 à 10 de magistrats» d'après le bâtonnier.Selon la Commission européenne, en 2019, on comptait en France en moyenne 10 juges pour 100 000 habitants. Soit deux fois moins que la moyenne de l’Union Européenne.