Nouveau (et ultime ?) rebondissement dans le dossier Oxylane porté par Décathlon, au nord de Montpellier. Après 13 ans de bataille, notamment juridique, le groupe renonce à faire construire cette zone ludico-commercial sur la ZAC de Saint-Clément-de-Rivière.
Jeudi soir, le conseil municipal de Saint-Clément-de-Rivière a adopté à la majorité, le reclassement des terres -sur lesquelles Oxylane devait être bâti- en terrain naturel et agricole. Même si cette décision ne porte pas atteinte au droit de poursuivre le projet Oxylane (les permis de construire ont tous été validés par la justice), le groupe Décathlon a décidé de l'abandonner.
“Nous sommes, bien entendu, déçus par les nombreux obstacles rencontrés depuis 2011. Ce projet était ambitieux et qualitatif. Toutefois, et comme nous l’avons fait depuis le début, nous restons à l’écoute des institutions locales et de leurs habitants", indique jeudi soir Décathlon dans un commniqué.
Le projet Oxylane avait été approuvé par la mairie de Saint-Clément-de-Rivière en 2014. Il consistait à regrouper sur 24 hectares des enseignes commerciales, dont Décathlon, mais aussi des terrains de sport et un parc accrobranche.
"Nous avons gagné au niveau des coeurs"
Ce projet était contesté point par point par les associations, qui ont multiplié les recours notamment sur les permis d'aménager et de construire.
Ils insistaient sur trois points :
- les risques d’inondation, avec des bassins de retenue d'eau inadaptés
- la protection des nappes phréatiques
- l'alimentation en eau potable : la commune de Saint-Clément-de-Rivière ne pourrait pas faire face aux nouveaux besoins que provoquerait le projet.
Une partie des recours, dont ceux de l'association "Non au béton" ont été rejetés. "Nous rappelons que le seul recours gagné portait sur l'insuffisance de l'étude d'impact, du fait de la sous-estimation de l'impact du projet sur les espèces protégées. Le recours de l'association SOS lez Environnement contre le SCOT du Grand Pic Saint-Loup portait quant à lui sur la consommation de terres agricoles, abusivement considérées comme de faible valeur. Outre les questions d'eau, les recours des associations portaient donc aussi sur la protection de la biodiversité et la consommation de terres agricoles", précisent Simon Popy pour France Nature environnement Languedoc -Roussillon et Jean-Michel Hélary, pour le collectif Oxygène composé de 15 associations hostiles au projet.
Celui de l'association SOS Lez Environnement sur l'insuffisance de l'étude d'impact a abouti à une annulation partielle du projet (TA Montpellier décision du 15/02/2018). Le 2 août 2021, le commissaire-enquêteur préconise que le projet Oxylane soit retiré du Plan local d'urbanisme (PLU) de Saint-Clément-de-Rivière. Il s'appuie notamment sur les très nombreux avis argumentés qui ont été déposés par le public : 1.246 des observations déposées étaient défavorables au projet et seulement 6 favorables.
Le PLU a donc été adopté hier soir par le conseil municipal, n'empêchant pas juridiquement le projet Oxylane mais rendant l'achat du terrain plus compliqué.
"Nous avons perdu au point de vue juridique mais nous avons gagné au niveau des coeurs et de l'opinion, Décathlon ne l'avait pas anticipé" se réjouit Alain Berthet, porte parole de l'association Non au béton.
"Contrairement à ce qui était affirmé par beaucoup jusqu'ici, il est possible pour une commune de changer d'avis dans l'élaboration de son PLU et de reclasser des terres agricoles, sans risquer la ruine liée à des pénalités financières, quand bien même cette commune aurait déjà délivré des permis. Là encore, ce sont nos associations, avec l'appui du réseau juridique de FNE, qui ont su lever les dernières craintes de la municipalité. Ce qui n'enlève rien au courage de sa décision que nous saluons" ajoutent Simon Popy, pour France Nature Environnement Languedoc-Roussillon et Jean-Michel Hélary, pour le Collectif OXYGENE.
Nous avons perdu au point de vue juridique mais nous avons gagné au niveau des coeurs et de l'opinion, Décathlon ne l'avait pas anticipé.
Même satisfaction du côté de la métropole de Montpellier. Son président Michaël Delafosse, maire PS de Montpellier, se félicite de la décision de Décathlon : "Stopper les projets de méga centres commerciaux était un de mes engagements de campagne. Avec l’abandon de Shopping Promenade, et désormais d’Oxylane, cet engagement est tenu. Si nous ne mettions pas un coup d’arrêt à ce type de mégaprojets hérités d’un modèle daté, consommateur d’espaces et de terres, nous nous retrouvions en 2025 avec 95 % de l’offre commerciale située en périphérie de la ville. Avec à la clef la déstabilisation totale du commerce de centre-ville mais aussi des quartiers de Montpellier et des villages de la métropole".
Un nouveau projet Oxylane... ailleurs ?
Si c'est une victoire pour les associations, le porte-parole reste cependant vigilant, en effet, le groupe Décathlon ne renonce pas complètement au projet Oxylane, "le projet de Saint-Clément-de-Rivière ne pourra pas aboutir mais nous restons convaincus de la valeur ajoutée d’un magasin Decathlon au plus proche des sportifs du nord de Montpellier. Nous allons donc repenser notre projet et aller à la recherche d’un lieu adéquat, toujours en collaboration avec la municipalité", indique le groupe dans son communiqué.
Pour Alain Berthet, la bataille continue, "c'est une victoire pour cette zone en question, mais il y a beaucoup d'autres zones naturelles à Saint-Clément-de-Rivière... Il n'est pas question que le projet se fasse ailleurs, Décathlon sait qui il aura en face de lui.".