Avec le changement climatique, l'accès à l'eau sera l'un des enjeux majeurs des prochaines années. Avec de multiples problématiques : comprendre les modifications des cycles naturels en cours, favoriser les accès, économiser la ressource, etc. Toute cette semaine, des chercheurs du monde entier seront à Montpellier (Hérault) pour évoquer ces différents enjeux. Car la capitale héraultaise est en pointe sur le sujet
Ce mois de mai finissant en a été la parfaite illustration, avec des températures moyennes qui finiront vraisemblablement bien au-dessus des maximums observés jusqu'ici : le changement climatique est en cours. Des températures plus chaudes et des précipitations plus rares : la sècheresse en cette fin de printemps est déjà une réalité pour de nombreux territoires.
Des constats qui rendent plus que jamais nécessaires de réfléchir à la question de l'eau. Et Montpellier possède depuis de nombreuses années une sacrée expertise en la matière ! Une position reconnue en 2019 lorsque l'Unesco a décidé de faire de la capitale héraultaise le siège d'un centre international dédié à l'eau l'ICIREWARD (pour "International Center for Interdisciplinary Research on Water System Dynamics").
L'eau, une spécialité montpelliéraine
L'IM2E, l'Institut Montpelliérain de l'eau et de l'environnement fondé en 2013, est devenu l'ICEREWARD, véritable bras armé de l'organisation internationale pour toutes les questions hydrologiques. L'Unesco, dans un tweet en août 2021, parlait même de l'ICIREWARD comme "d'un des plus grands centres de recherche et de formation au monde sur les questions de l'eau."
L'ICIREWARD réunit donc plus de 400 scientifiques issus de 17 laboratoires de recherche et près de 150 doctorants. Et travaille en partenariat avec tous les plus grands organismes de recherche : le CNRS (Centre national de la recherche scientifique), l'INRAE (institut national de la recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement), le Cirad (Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement), l'IRD (institut de recherche pour le développement) et biens d'autres.
Ses domaines d'expertise sont nombreux et variés. L'ICIREWARD "se projette sur les 10 prochaines années avec l'ambition de répondre aux défis rencontrés par les régions particulièrement vulnérables du fait de l'urbanisation rapide de nos sociétés, de la pression démographique croissante et des effets du changement climatique," indique le site internet de l'organisme.
Les questions hydrologiques sont toutes liées. Il n'est par exemple pas possible de parler des risques d'inondations, si on parle pas de l'urbanisation.
Eric Servat, directeur de l'ICIREWARD
Une transversalité, une approche à 360 degrés qui fait la fierté d'Eric Servat, son directeur : "Tous les domaines en relation avec l'eau sont couverts par nos chercheurs. Des plus théoriques, comme les modélisations mathématiques et informatiques, jusqu'au plus concrets comme les sciences sociales." Car les questions hydrologiques sont complexes et souvent liées les unes aux autres. "C'est difficile d'aborder la question de la rareté de l'eau, donc des quantités disponibles, sans parler de la qualité de l'eau qu'on amène aux gens. De la même manière, il n'est pas possible de parler des risques d'inondations, si on ne parle pas de l'urbanisation", explique Eric Servat.
Une expertise montpelliéraine reconnue dans le monde entier qui a motivé l'Association internationale des sciences hydrologiques (AISH) à faire de Montpellier la ville hôte pour sa onzième assemblée scientifique. "C'est la première fois que l'assemblée scientifique de l'AISH se tient en France. Et c'est Montpellier qui a été choisie. Cela montre que la ville est identifiée comme un centre important sur la question : c'est l'une des capitales mondiales de l'eau," contextualise Eric Servat, le directeur de l'ICIREWARD.
600 chercheurs, en provenance de 60 pays des cinq continents vont ainsi échanger pendant une semaine. Une trentaine de symposiums sont proposés, sur des thèmes parfois très pointus. Des scientifiques apparemment heureux de se réunir en présentiel, après deux longues années de réunion en visioconférences à cause de la crise sanitaire. Et qui affichent leur joie sur les réseaux sociaux.
Cette spécialisation de Montpellier sur les questions hydrologiques présente aussi un intérêt pour les acteurs économiques du secteur. Romain Salza a créé et dirige Acqua.Eco, une entreprise innovante installée à Clermont-l'Hérault, au nord du département. Sa société propose des solutions de recyclage et de réutilisation des eaux usées et/ou polluées.
Pour ce docteur en biochimie, formé du côté de Lyon, s'inscrire dans un tissu de laboratoires "présente un réel intérêt pour une jeune entreprise qui se développe, comme la notre. C'est toujours bien de pouvoir s'appuyer sur les dernières trouvailles de laboratoires de recherche fondamentale ou appliquée. De trouver des solutions en collaboration, pour aller plus loin sur le recyclage." Une concentration de matière grise et d'expertise aussi précieuse pour le recrutement de la jeune entreprise : "Ca nous permet de recruter des gens hyper-spécialisés sur les questions qui nous intéressent. Cela fait un sacré vivier, et ça nous permet de gagner du temps."
Des animations pour le grand public
La tenue de la XIème assemblée scientifique de l'association des sciences hydrologiques sonne donc comme une reconnaissance du savoir-faire montpelliérain. Et pour que la population ne passe pas à côté de cet évènement mais aussi pour la sensibiliser à ces questions, les organisateurs ont tenu à proposer un versant plus "grand public" au congrès. En organisant une semaine "Eau - Europe, Méditerranée, Afrique" : deux expositions sont ainsi proposées au Corum. Une fresque participative sera réalisée tout au long de la semaine sur l'Esplanade Charles de Gaulle à proximité du Corum. Le programme complet est disponible à cette adresse. Ce mardi 31 mai, l'académicien Erik Orsenna interviendra ainsi pour une conférence-débat sur les grands fleuves.