Squatté depuis plusieurs années, un bâtiment situé au 46 boulevard de Strasbourg à Montpellier a été évacué ce samedi. Les occupants ont déménagé provisoirement dans des locaux mis à disposition par la ville, selon la méthode novatrice de "l'habitat intercalaire".
Les occupants du bâtiment situé au 46 boulevard de Strasbourg, à Montpellier ont quitté leur logement, surnommé "squat du court-circuit", ce samedi à 14h. Deux heures plus tard, le maire Michaël Delafosse organisait une conférence de presse dans la cour. A ses côtés, le représentant de Vinci Immobilier, propriétaire des lieux. Un calme bien éloigné des images fréquentes d'opérations d'évacuation de squat, menées à l'aube par les forces de l'ordre. C'est cette brutalité que les différents acteurs ont voulu éviter, en utilisant la méthode de "l'habitat intercalaire".
Vinci finance la rénovation du relogement provisoire
Une petite trentaine de personnes, composée de plusieurs familles avec enfants, habitait ce bâtiment depuis cinq ans. Le propriétaire, Vinci Immobilier, a manifesté sa volonté de récupérer les locaux après des années d'inertie. En contrepartie de la libération de son bien, Vinci a accepté de financer la rénovation d'habitations pour plus de 100 000€. Les éléments de confort essentiels (sécurisation électrique, création de sanitaires, changement de chauffage...) ont été installés dans des logements vacants appartenant à la ville de Montpellier. Les familles ont donc quitté le 42-46 boulevard de Strasbourg pour réemménager dans ces locaux pour une durée de 18 à 24 mois.
Michaël Delafosse, maire de Montpellier, a tenu à saluer le geste de l'entreprise.
Vinci aurait directement pu faire valoir son droit légitime sur le bien, et faire intervenir la force publique. Ce sont des scènes violentes que personne n'aime. L'entreprise a préféré nous contacter pour que nous trouvions une solution ensemble. Dans le cas de ce bâtiment, tout s'est passé dans la concertation et l'intelligence collective.
Le maire tient à souligner qu'il ne s'agit en aucun cas de logements sociaux. "Ces familles ne passent pas devant des personnes qui seraient sur liste d'attente pour un logement social. Ce sont des locaux vacants, destinés à d'autres usages, qui sont mis à disposition pour un temps limité."
L'habitat intercalaire est rendu possible par la loi ELAN, entrée en vigueur en 2018. Elle permet d'utiliser des biens de la collectivité promis à la destruction ou à un changement de destination sur le moyen terme, pour loger des personnes sans abri. Ce dispositif permet notamment de mobiliser les contributions financières de partenaires privés, d'où la participation de Vinci.
Un "déménagement" en concertation avec les habitants et les associations
En mars dernier, le squat "Luttopia", à Montpellier avait été évacué suite à un travail de concertation mené entre les occupants, les associations et la municipalité. Pour que cette nouvelle évacuation - appelée "déménagement" par la mairie - se déroule également en douceur et dans les délais impartis, les différents acteurs ont voulu réitérer l'expérience.
Pour accompagner les habitants, la municipalité a fait appel à la Fondation Abbé Pierre, à Médecins du Monde et au Secours Catholique, en renfort des travailleurs sociaux du CCAS. "C'est une situation qui touche à la dignité humaine, c'est toujours délicat, mais les occupants ont été très coopérants", explique Amélie Corpet, déléguée du Secours Catholique dans l'Hérault.
Même si les nouveaux logements sont plus exigus que ceux que les familles occupaient, elles ont au moins l'esprit tranquille et la certitude de ne pas devoir déménager avant 18 mois. Notre rôle désormais, c'est d'accompagner ces personnes vers leurs droits, certains vers l'emploi, les enfants vers l'école.
"Cette méthode de l'habitat intercalaire n'es pas parfaite car elle n'est pas pérenne, mais elle évite la mise à la rue, et c'est essentiel", poursuit Amélie Corpet. "Nous sommes très fiers d'avoir participé à ce déménagement, et heureux d'être précurseurs avec cette méthode", a quant à lui déclaré Thierry Iacazio, directeur de Vinci Immobilier en Languedoc-Roussillon.
Le bâtiment du 46 boulevard de Strasbourg devrait être transformé en résidence pour jeunes actifs.