Violences à la Fac de Droit de Montpellier : 7 personnes bientôt jugées par le tribunal correctionnel

18 mois après les violences commises par des hommes encagoulés contre des étudiants, le procureur de la République demande le renvoi des commanditaires et de plusieurs "gros bras" devant le tribunal correctionnel.

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Après une année d'enquête et six mois d'instruction, le dossier est clos. La juge montpelliéraine en charge du dossier des coups portés sur des étudiants désarmés, dans l'enceinte même d'un lieu de savoir et d'apprentissage, dans un lieu où s'enseigne le Droit, doit prochainement renvoyer sept personnes devant le tribunal correctionnel aux motifs de violences, violences en récidive et complicité d'intrusion. Les parties civiles espèrent un procès dans les premiers mois de 2020.

Et il y reste du beau monde dans ce dossier : Philippe Pétel, ancien doyen de la faculté démissionné au lendemain de ces événements de mars 2018, Jean-Luc Coronel de Boissezon, historien du Droit aujourd'hui révoqué de l'enseignement supérieur. Mais aussi l'amie de ce dernier, Patricia M. de R., ancienne candidate de l' "Alliance Royale" aux législatives de juin 2012 et quatre "hommes de main" recrutés pour l'occasion dans des associations défendant des idées d'extrême-droite, notamment la "Ligue du Midi".

Comment ceux qui devraient "dire le Droit" risquent-ils de se retrouver du mauvais côté de la barre ? Retour sur ces heures où tout a basculé.

Blocus de la fac


Faculté de droit de Montpellier, nuit du 22 au 23 mars 2018, malgré le froid extérieur les esprits s'échauffent dans un amphithéâtre bondé. La simple réunion organisée par des professeurs de la Fédération Syndicale Unitaire pour échanger et informer sur la réforme de l'accès aux universités s'est transformée en assemblée générale. Les étudiants venus en masse, notamment des universités voisines, ont pris le pouvoir. A main levée, ils ont voté le blocus de la fac de droit. Une grande victoire symbolique : la dernière fois que les cours ont cessé dans la vénérable et conservatrice institution montpelliéraine, c'était en mai 1968 !
 

Tension extrême et invectives


Dans cette institution connue pour les convictions très "à droite" de ses professeurs et doctorants, c'est du jamais vu... les organisateurs ont été mis en minorité ! La tension est extrême et les invectives pleuvent. Alerté, le président de l'université demande au Préfet d'envoyer des policiers mais il essuie un refus et doit se contenter d'un renfort d'agents contractuels de la société privée qui assure la sécurité de l'établissement. Peu après 22 heures, les partisans du blocus de la fac de droit exigent le départ des non grévistes. Bousculés et insultés, ces derniers sont conduits vers la sortie et les vigiles postés à l'extérieur du bâtiment s'interposent entre les belligérants. 
 

Des vidéos analysées par la police


Deux heures plus tard, la tension est retombée et une cinquantaine d'étudiants redevenus paisibles organise le blocus et filment des vidéos ou prennent des photos destinées à leurs partisans restés à l'extérieur. Ces documents horodatés seront minutieusement analysés par les spécialistes de la Police et déterminants dans la procédure judiciaire.
 
Les images filmées par les étudiants agressées témoignent de la violence de l'attaque à Montpellier ©F3LR

Plusieurs smartphones de ces étudiants enregistrent en effet une scène surréaliste et totalement imprévue : Sortis d'on ne sais où, des hommes cagoulés de noir et armés d'objets contondants font brusquement irruption au pied de l'amphi. L'un d'eux distribue généreusement des impulsions électriques avec son "schocker", une sorte de "taser" destiné au grand public. La peur envahit l'amphi, quelques coups pleuvent et les étudiants paniqués sortent à l'extérieur. C'est là que la première journaliste arrivée sur les lieux, Caroline Agullo, recueille leurs témoignages pour France 3.
 
Caroline Agullo était sur place, cette nuit, après l'évacuation violente de la fac de droit par des hommes armés de bâtons et cagoulés. ©F3LR

Dès l'expulsion de l'amphi, les étudiants désignent deux "complices" du commando cagoulé : Philippe Pétel, le doyen de la fac de Droit, qui a encouragé - à visage découvert - ce "nettoyage" de l'amphithéâtre et Jean-Luc Coronel de Boissezon, un professeur dont la voix - bien connue de ses étudiants - a été identifiée.

Au lendemain de cette évacuation musclée, Philippe Pétel est interviewé par les journalistes de France 3 Philippe Sans et Joane Mériot : même s'il les interprète à sa manière, le doyen reconnait les faits :
 
La réponse un peu ambigüe du doyen de la faculté , Philippe Pétel, au micro de Philippe Sans et Joane Mériot. ©F3LR

Loin de cette suffisance assumée des professeurs de Droit et de la royaliste, les hommes de main se sont montrés beaucoup plus coopératifs avec les enquêteurs. "Embarqués pour faire peur" à de jeunes étudiants selon les déclarations que nous avons recueillies, ils ne s'attendaient pas à devoir faire usage de la force. D'ailleurs un seul d'entre eux était armé du "schocker" électrique. Les autres prétendent avoir - au dernier moment - démonté une palette pour prolonger leurs gesticulations.

Circonspects, les enquêteurs ont ainsi établi une chronologie minutieuse des événements et surtout des échanges téléphoniques, de l'alerte donnée par le professeur de Droit jusqu'aux coups portés. L'intérêt de l'audience sera de clarifier le déroulement de cette nuit d'hystérie et de démentir bon nombre d'invraisemblances.

Une chose est sûre, la faculté de Droit de Montpellier - elle - ne sortira pas grandie du tribunal.
 
 
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