Quartiers pop : les mains vertes du Petit-Bard à Montpellier

Pour ce reportage en Occitanie, nous nous rendons à Montpellier. Si comme attendu la chaleur y est humide, les barres HLM du quartier Pergola Petit-Bard n’offrent quant à elles pas grand-chose d’exotique, si ce n’est des balcons fraîchement repeints dans des couleurs vives par le bailleur.

Rien de nouveau sous le soleil, on cache encore une fois un quotidien difficile et excentré du centre-ville par quelques coups de peinture. Il est 15h, la cité est vide, elle est encore au travail ou à l’école. Il ne reste plus qu’un petit groupe de mamans, attelées à faire fleurir des parcelles au milieu de ces blocs de béton. Fadila, présidente de l’association La Main Verte, nous fait signe.

"Ici on cultive avant tout du lien social"


La Main Verte, c’est le cœur du quartier. Les mamans y viennent passer leurs après-midis, faire du sport ou encore apprendre à utiliser un ordinateur. Fadila arrive, le pas boitillant. Une béquille à la main gauche, elle justifie sa difficulté à se mouvoir "Je me suis blessée au judo, j’ai voulu essayer, et je me suis fait mal au genou" avant de poursuivre; "C’est important que nous, les mamans, on ait accès aux activités sportives et culturelles. Ça nous permet aussi de couper avec notre quotidien, de faire une pause et de nous ouvrir l’esprit". Fatima, la trésorière de l'association nous rejoint. "Ce jardin, il est au cœur du quartier. Ici, c’est pas des tomates ou des légumes qu’on cultive c’est avant tout du lien social" puis Fadila ajoute avec énergie "On va quand même vous faire goûter les fruits du jardin".

Il est 17 heures, l'heure du "casse-croûte" marocain. Malgré leur quotidien perturbé par notre visite, nos hôtes du jour n’ont pas dérogé à la règle. Les mamans s’attèlent à préparer le thé, msemens farcis et autres mets traditionnels. Entre deux verres de thé, on remarque que les parcelles de Mina et Qida font l’objet de louanges de la part des autres mamans du quartier. Mina me propose une crêpe et ajoute "Ce qui serait bien, ce serait qu’on prenne des cours de français, ça faciliterait nos démarches administratives, etc… ".

Mina me rappelle ma tante Aicha, une amie de ma mère, son phrasé doux ponctué par des intonations aiguës en fin de phrase accompagnent son regard malicieux. Après l’avoir
coupée, elle me tend une branche de "Fliou" (menthe pouliot) et me laisse deviner son nom. Son odeur a parfumé l’heure du thé de mes étés au bled.

Après nous avoir offert un bouquet, elle nous confie " Ici, j’ai tout ce qu’il faut, souvent je soigne mes maux avec les plantes que je laisse pousser. C’est même mieux que les médicaments de la pharmacie". Fatima revient et nous montre des plants de salades, "C’est des enfants du quartier qui les ont plantées, c’est important qu’on puisse éduquer les jeunes à la botanique et au travail de la terre pour les reconnecter à l’essentiel. ".

" Si tu te maries viens me voir, je ferai une tenue à ta femme "

Fadila arrive derrière la grille et nous fait signe de la rejoindre, " Il faut qu’ils voient la parcelle de Qida " lance-t-elle à Fatima, cette dernière ajoute " Qida nous a appris énormément de choses sur le travail de la terre, elle a un savoir-faire acquis depuis ses jeunes années au Maroc ".


Qida a 66 ans, vient d’Er-Rachidia aux portes du Sahara marocain. Elle ne parle pas français, mais maîtrise le langage de la botanique comme personne. Son sourire n’a d’égal que la dextérité avec laquelle elle fait pousser ses tomates. " J’avais une petite ferme au Maroc, on avait des tomates, des petits pois… ". Au moment où je lui parle, elle retourne la terre de sa parcelle, entre deux coups de pelle et me confie " Ce qui est bien avec La Main Verte, c’est que je peux faire du sport, m’entraîner. J’ai même une machine à coudre dans les locaux, j’y conçois des tenues de fête, des tenues de mariées. Si tu as besoin d’une tenue pour ta future épouse n’hésite pas je peux te la faire, à la condition que tu m’invites au mariage pour que je vienne danser ".

Les rires se dissipent et après quelques coups de pioche abrupts, elle conclut avec son accent rieur et guttural du désert marocain " Ces plants et cette terre ne sont que bienfaits et bénédictions, ils nous ont permis d’avoir un espace à nous les mamans du quartier et surtout de perpétuer notre héritage culturel… ".

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