Nourimane Jouak filme et partage ses enseignements au quotidien avec sa classe de grande section de maternelle, à Montpellier dans l'Hérault, sur les réseaux sociaux. Fin octobre, elle a abordé la question du consentement avec ses élèves après que l'un d'entre eux a touché les parties génitales d'une petite fille.
Assise au sol devant eux, Nourimane Jouak, professeure des écoles à Montpellier s'adresse à ses élèves. "Il s'est passé quelque chose de grave dans la classe".
Juste avant les vacances de la Toussaint, l'un de ses élèves de grande section, a touché une autre petite fille de la classe entre les jambes au-dessus de ses vêtements. "Comme je voyais que la petite fille commençait à en parler avec d'autres, j'ai préféré l'aborder en classe, explique-t-elle. On a arrêté tout ce que l'on faisait pour l'évoquer ensemble avec les mots justes, pour qu'aucune version tronquée ne circule par la suite, car ils allaient en reparler entre eux et c'est bien normal. Bien souvent les enfants n'ont pas conscience du mal qu'ils ont fait."
Durant 20 minutes, "Maîtresse Nouri", évoque la notion cruciale du consentement avec des mots et des gestes simples. Elle n'en isolera qu'une minute pour la poster sur Tik Tok où la vidéo a totalisé 9 millions de vues, 20 000 sur Instagram.
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D'abord, elle propose aux deux élèves concernés de verbaliser ce qui s'est passé et leur ressenti, tout en recadrant : "Est-ce qu'on a le droit de toucher le zizi ou la vulve de quelqu'un ?" "Non !", lui répond la classe en chœur. Puis, elle renforce sa démonstration par des gestes : "Ça, c'est mon corps, mon corps est à moi et Toi, tu ne le touches pas !" Elle insiste en rappelant aux enfants que leur corps ne doit pas être touché, "par un autre enfant ou même un grand". La classe répète : "c'est mon corps, il est à moi tu ne le touches pas."
Avant d'évoquer cet épisode avec la classe, elle a pris soin de discuter avec les deux élèves concernés. "Souvent, un élève agresseur répète quelque chose qu'il a vu ou vécu, constate l'enseignante qui a déjà évoqué la question du consentement avec une autre classe.
Chaque année, discuter librement en classe permet à certains enfants d’évoquer ce qui avait pu leur arriver avec un frère, un oncle, un père, un frère, etc... cela permet aussi d'alerter les parents sur des choses qui se seraient passées auxquelles ils n'auraient pas prêté attention.
Nourimane Jouak, professeure des écoles à Montpellier
Évoquer le corps et le consentement dès le plus jeune âge
Pour l'enseignante, il n'est pas trop tôt pour évoquer le consentement, même en maternelle, tant que le discours est adapté. "Il faudrait même le faire dès qu'ils acquièrent la propreté, qu'ils commencent à être autonomes pour se laver. Leur parler du consentement, c'est les préserver. Les enfants n’ont pas forcément conscience des limites de leur corps, résume la professeure des écoles. Nous avons donc réfléchi tous ensemble à quelles parties on peut toucher ou non. Et quand on se tient la main pour circuler dans l’école ? Et quand on se touche le bras quand on joue à trape-trape ? Quelles sont les parties du corps acceptables ?"
Un enfant sur cinq victime de violences sexuelles
Elle appuie son propos sur le fait qu'un enfant sur cinq est victime de violences sexuelles en France selon le rapport Sauvé publié l'an dernier, comme l'expliquaient nos confrères de Libération : "On minimise la portée que peut générer le fait d'en parler". Sa démarche vise à participer à la prévention des violences sexuelles : "cela fait trop longtemps que l'on fait porter la faute sur les victimes d'abus ou de violences sexuelles, il est temps que la parole des victimes soit libérée, qu'on les soutienne plutôt que de les enfoncer, il faut qu'on arrête de laisser faire des choses dans la sphère familiale juste parce que l'on a honte d'en parler".
Cette vidéo s'ajoute à une longue série d'autres séquences où elle dépeint son quotidien de professeure des écoles qu'elle souhaite partager tant avec des enseignants que des parents.